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La flûte enchantée (Die Zauberflöte). Livret en français

Présentation — Livret en français, premier acteLivret en français deuxième acteBiographie de Wolfgang Amadeus MozartAudio : Opéra national de Bavière sou sla direction de Wolfgang Sawallisch.

La flûte enchantée, livret d'après la traduction française du livret original par J. G. Prod'homme et Jules Kienlin, éditions Costallat, Paris 1912.

Monostatos, un génie, un prêtre.

acte I

Ouverture

Site sauvage de rochers. Côté cour, au 1er plan, un banc formé par des rochers.

Scène première

Tamino, vêtu en costume grec, entre en courant côte jardin, il porte un arc, mais n'a plus de flèches.

Dessin de scène de 1793 par Gayl et Nessthaler (gravure colorée de Joseph et Peter Schaffer). Tamino, Les trois Dames, Papageno.

no 1. Introduction, Allegro

Tamino
À l'aide ! à l'aide ! Il vient sur mes traces !
À l'aide ! à l'aide ! Je suis sans défense !
Le monstre s'approche !
(Un grand serpent venant de côté cour poursuit Tamino)
Il rampe vers moi (ter)
O Dieux puissants ! de grâce !
O Dieux puissants ! pitié pour moi
(il tombe épuisé et sans connaissance sur le banc de rocher)

Scène II

Tamino sur le banc. Les trois dames, habillées de noir, armées d'épieux à pointe d'argent, paraissent côte jardin.

Les trois Dames

Monstre ! péris frappé par nous !

(Elles transperce de leurs épieux le serpent .)

Victoire l Victoire !
Le monstre est mort, nous triomphons !
Il est sauvé (bis) ,
Vaillantes armes, grâce à vous ! (bis)

Première Dame (l'observant)
Ah ! charmant jouvenceau, doux et beau...

Deuxième Dame
Oui, beau comme jamais je n'en vis !

Troisième Dame
Oui, oui, beau comme une image !

Toutes les trois
Ah ! si mon cœur devait aimer,
C'est lui qu'il choisirait
Allons retrouver notre Reine.
Courons vers notre souveraine !
Peut-être ce garçon charmant
Saura calmer son noir tourment ?

Première Dame
Allez donc et dites-le lui,
je resterai ici entre temps !

Deuxième Dame
Non, non, allez-y vous-mêmes, c'est moi qui veillerai sur lui !

Troisième Dame
Non, non, cela ne se peut, moi seule veux le protéger !

Première Dame
Je resterai ici entre temps...

Deuxième Dame
C'est moi qui veillerai sur lui...

Troisième Dame
Moi seule veux le protéger...

Première Dame
... je resterai...

Deuxième Dame
... c'est moi qui veillerai...

Troisième Dame
... je veux le protéger...

Première Dame
... moi !

Deuxième Dame
... moi !

Troisième Dame
... moi !

Toutes les trois (à part)
Il faudrait que je parte ! Ah ! la bonne idée !
Elles resteraient volontiers seules auprès de lui.
Non, non, cela ne se peut !
Que ne donnerais-je pas pour vivre avec ce garçon,
et le garder pour moi seule !
Mais nulle ne part ! cela ne se peut !
Mieux vaut donc que je parte.
Ô jouvenceau, aimable et beau, ô fidèle garçon,
adieu, jusqu'à ce que nous nous revoyons !

(Les Dames sortent).

Papageno, costume de Johann Baptist Klein, 1793.

Scène IV

Papageno habillé de plumes, portant sur le dos une grande cage pleine d'oiseaux divers, qui dépasse de beaucoup sa tête, arrive rapidement côtécour, droit. Il tient une flûte de Pan à la main.

No 2. Air

Papageno
C'est l'oiseleur, oui, me voilà !
C'est lui, et youp et youp la, la !
Connu de tous, grands et petits,
On m'aime dans tout le pays.
Je sais attirer les oiseaux
Et l'art de lancer les appaux.
Oiseaux des bois, oiseaux des champs,
Joyeusement ma main les prend.

(Il joue de la flûte, puis dépose sa cage)

Des oiseleurs je suis, ouida,
Le pl us gai, heisa, hopsasa !
Dans le pays, toujours fêté
Par les petits et par les vieux.
Fillettes jolies, c'est vous,
C'est vous que guette l'oiseleur
Si j'avais un grand filet, ma foi !
Toutes, je vous aurais à moi !
Que je remplirais volontiers
De belles filles mes paniers !
J'aurais pour les apprivoiser
Du sucre d'orge en quantité,
Et celle dont les jolis yeux
À mon cœur aurait plu le mieux,
Pour femme je la choisirais,
Et tendrement je l'aimerais

(Il joue de la flûte et se dirige côté jardin pour sortir.)


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Scène V

Tamino, Papaguéno.

Tamino, allant à sa rencontre
Holà !

Papageno
Qu 'y a-t-il ?

Tamino
Dis-moi, qui es-tu, joyeux compagnon ?

Papageno
Qui je suis ? (à part) Sotte question !
(haut) Je suis un homme comme toi.
Si je te de mandais aussi qui tu es ?

Tamino
Je te répondrais que je suis un prince de sang royal.

Papageno
Ce que tu dis dépasse mon intelligence.
Explique-toi plus clairement si tu veux que je te comprenne.

Tamino
Mon père est un souverain qui règne sur beaucoup de pays et d'hommes ; c'est pour quoi l 'on m'a ppelle prince.

Papageno
Des pays ? Des hommes ? Un prince ?

Tamino
C'est pourquoi je te demande...

Papageno
Doucement ! Laisse- moi te questionner. Y a-t-il dis-moi, en dehors de ces montagnes, d'autres pays et d'autres hommes ?

Tamino
Des milliers !

Papageno
J'y vais alors, je leur vendrai mes oiseaux ! Bonne affaire !

Tamino
Dis-moi enfin, dans quel pays sommes-nou ?

Papageno
Dans quel pays ? (Il regarde autour de lui). Au milieu de vallées et de montagnes

Tamino
Je le vois bien. Mais quel est le nom de ce pays ? Qui en est le souverain ?

Papageno
Je n 'en sais rien, pas plu que je ne puis dire comment je suis venu au monde.

Tamino riant
Comment ? Tu ignores où tu es né et quels furent tes parents ?

Papageno
Je n'en ai aucu ne idée ! Touit ce que je sais, c'est qu 'un vieil homme, . mais un joyeux compère, m'a élevé et nourri

Tamino
C'était probablement ton père ?

Papageno
Je n 'en sais rien.

Tamino
N 'as-tu pas connu ta mère ?

Papageno
Je ne l'ai pas connue. On m'a souvent raconté qu'elle servait dans ce château mystérieux qui est là, chez la Reine des Étoiles. J'ignore si elle vit encore. Tout ce que je sais, c'est que, non loin d'ici, est ma chaumière qui m 'abrite de la pluie et du froid.

Tamino
Mais, comment vis-tu ?

Papageno
En mangeant et en buvant, comme tout le monde.

Tamino
Et comment te procures-tu ce dont tu as besoin ?

Papageno
Par échange. Je prends des oiseaux pour la Reine des Éoiles et ses suivantes ; en retour, elles me donnent tous les jours à boire et ù manger.

Tamino, à part
La Reine des Étoiles ?... [Si c'était la puissante Reine de la Nuit ?] (Haut). Dis-moi, mon ami , as-tu d éjà été assez heureux pour la voir, cette Déesse de la Nuit ?

Papageno qui depuis quelques instants a soufflé dans sa flûte à plusieurs reprises. [Cette] sotte question [me] prouve que tu n'es pas du pays.

Tamino
Ne te fâche pas, cher ami. Je pensa is que....

Papageno
La voir ? Voir la Reine des Étoiles ! Ne t'avise pas de me le redemander ! sinon, je t'empoigne, aussi vrai que je m 'appelle Papageno ! Je t'enferme comme un linot dans ma cage, je te vends à la Reine de la Nuit et à ses suivantes ; et, ma foi, elles te feront rôtir ou bouillir à leur gré.

Tamino
Quel homme singulier !

Papageno
La voir ? Voir la Reine des Étoiles ? Quel mortel peut se vanter de l'avoir vue ? [Quel regard pourrait pénétrer son voile noir ?]

Tamino à part
Il n'y a plus de doute ; c'est elle, cette Reine de la Nuit, dont mon père m'a si souvent parlé. [Je ne m'explique pas comment j'ai pu m'égarer ainsi. Cet homme-là n'est certainement pas comme les autres, — peut-être est-il un des serviteurs de la Reine ?]

Papageno à part
Comme il me regarde fixement ! Je commence à avoir peur de lui. (Haut, à Tamino) Pourquoi me regardes-tu ainsi ?

Tamino
Parce que je me demande si tu es un être humain

Papageno
Comment cela ?

Tamino
Tu as des plumes ! Tu n 'es donc qu 'un .... (Il s'approche de lui.)

Papageno
Qu'un oiseau ? N'approche pas de moi ! Méfie-toi [Car je suis fort comme un géant. [Quand j'empoigne quelqu'un...] (A parl.) S'il n'a pas peur de moi tout de suite, je me sauve]

Tamino
[Comme un géant ?] ( Il re garde le serpent.) Serait-ce toi qui m'as sauvé la vie en tuant ce serpent ?

Papageno
Le serpent ? (Il regarde autour de lui et recule de quelques pas, en tremblant.) [Qu 'est cela ?] Est-i l mort ou vivant ?

Tamino
Oh ! pourquoi te dérober ainsi à mes remerciements ? Je te serai éternellemen t reconnaissa nt cl e ton acte de courage.

Papageno
Ne parlons pas de cela. Réjouissons-nous de ce que le serpent soit mort.

Tamino
Mais, je t'en supplie, l'ami, dis-moi comment tu as fait pour vaincre ce monstre ? Tu n'as pas d'armes !

Papageno
Je n'en ai que faire ! Pour serrer fortement, mes mains n'ont pas . besoin d'armes.

Tamino
Tu l'as étranglé ?

Papageno
Étranglé ! (A part.) De ma vie, je n'ai ja mais été aussi fort qu'aujourd'hui !

Scène VI

Les mêmes. Les trois Dames voilées apparaissent côté jardin ; la première porte une cruche pleine d'eau ; la seconde une pierre ; la troisième, un cadenas et un médaillon contenant un portrait.

Les trois Dames, immobiles
Papageno !

Papageno
Ah ! bien ! On m'appelle ! (A mi-voix, à Tamino.) Laisse-nous, ami.

Tamino, à mi-voix
Qu elles sont ces Dames ?

Papageno, à mi-voix
Je n'en sais trop rien. Tout ce que je puis te dire, c'est que je leur livre chaque jour mes oiseaux et qu'elle me donnent en échange du vin, des gâteaux, et des figues.

Tamino, à mi-voix
Elles ont l'air bien jolies.

Papageno de même. Ce n'est pas mon avis ; si elles l'étaient, elles ne se voileraient pas le visage.

Les trois Dames se rapprochant et menaçantes
Papageno !

Papageno, à demi-voix, à Tamino
Laisse-moi faire ! Eh ! qu'ont­ elles donc contre moi ? (Haut.) Tu me demandes si elles sont jolies ? Que te répondrai-je, sinon, que de ma vie, je n'ai vu créatures plus ravissantes. (A part.) Mon compliment va les a doucir !

Les trois Dames, se rapprochant encore, plus menaçantes
Papageno !

Papageno, à part
Qu'ai-je fait de mal aujourd'hui, pour qu'elles soient aussi courroucées contre moi ? (Il leur offre sa cage.) Tenez, mes charmantes, voici mes oiseaux.

Les trois Dames se placent entre Papageno et Tamino

La première Dame, tendant à Papageno la cruche pleine d'eau. Pour tes oiseaux, notre maitresse t'envoie aujourd'hui, pour la première fois, de l'eau claire au lieu de vin pur.

La deuxième Dame, prenant la place de la première
Et moi j' ai reçu l 'ordre de te donner ce caillou au lieu de gâteau. (Elle lui présente la pierre.) Grand bien t'en fasse !

Papageno
Quoi ? dois-je manger ce caillou ?

La troisième Dame prend la place de la deuxième
A la place des figues succulentes, voici un cadenas d'or que j 'ai l'honneur de te mettre à la bouche. (Elle lui suspend le cadenas à la bouche.)

Papageno exprime son désespoir par des gestes.

La premièer Dame
Peut-être désires- tu savoir pourquoi la Reine te punit avec tant de rigueur ?...

Papageno fait des signes d'assentiment avec la lête

La deuxième Dame
C'est pour qu'à l'avenir, tu ne dises plus de mensonges aux étrangers.

La troisième Dame
Et pour que tu ne te vantes pas de hauts faits que d'autres auront accomplis

La première Dame
Dis, est-ce toi qui a vaincu le serpent ?

Papageno fait signe que non de la tête.

La troisième Dame
Qui est-ce alors ?

Papageno fait signe qu'il n'en sait rien

La troisième Dame à Tamino
C'est nous, jeune homme, qui t'avons sauvé. Ne tremble pas : la joie et le bonheur t'attendent. Vois ce portrait que t'envoie notre puissante Reine ; c'est celui de sa fille. (Elle le lui remet.) Puisse-t-il, a-t-elle dit, ne pas le laisser insensible, et le bonheur, la gloire et les honneurs seront sa récompense. Au revoir !

La deuxième Dame
Adieu, Monsieur Papageno !

La deuxième et La troisième Dame prennent la cage et sortent côté jardin

La première Dame
Surtout, ne bois pas trop ! Elle rejoint les autres en riant.

Papageno muet et confus, sort rapidement côte cour

Tamino reste.

Scène VII

Tamino, seul, contemplant le portrait.

No 3, Air.

Tamino
Portrait, ô pur enchantement !
Merveill e à moi seule révélée!
Mon âme, mon âme, dans un rêve heureux,
Se berce et voit s'ouvrir les cieux.
Ce charme, qui m'envahit l'âme,
L'ardeur soudain e qui m'enflamme.
Est-ce la flamme de l'amour ? . . .
Oui, oui, ce feu, c'est bien l'amour !
Divine enfant, toi que j'adore
Puisses-tu bientôt m'apparaître!
D'ivresse sainte tout épris,
Ah! que ne puis-je cent fois te dire
L'espoir de ce cœur qui soupire:
A moi, sois pour toujours à moi ! pour toujours à moi !...

Il veut s'éloigner

Scène VIII

Tamino côté jardin au premier plan. Les trois Dames, venant de jardin, se placent à droite de Tamino

La première Dame
Arme-toi de courage et de constance, jeune-homme ! Notre Reine ...

La deuxième Dame
M'a chargé de te dire ..

La troisième Dame
Que ton bonheur, à présent, était assuré.

La première Dame
Elle a entendu chacune de tes paroles ; elle a...

La deuxième Dame
Lu sur ton visage. Et même, son cœur maternel...

La troisième Dame
A résolu de te rendre le plus heureux des mortels. « Que ce jeune homme, a-t-elle dit, ait autant de courage et de vaillance qu'il a montré de cœur, et ma fille est sauvée. »

Tamino
Sauvée ? Quel est ce mystère encore ? Qu'entends-je ? Celle dont le portrait...

La première Dame
A été ravie il à mère pa r un puissant et méchant génie.

Tamino
Ravie ? 0 dieux !... Est-ce possible ?

La première Dame
Elle était assise, seule, par une belle journée du mois de mai, dans le bois de cyprès, son séjour préféré. Le misérable s'y est glissé inaperçu derrière elle...

La deuxième Dame
Il l'a épiée...

La troisième Dame
Car il n 'est pas seulement méchant, mais il a le pouvoir de prendre n'importe quel le forme imaginable : et c'est de cette façon que Pamina...

La première Dame
Ainsi s'appelle la fille de la Reine, que tu adores.

Tamino
0 Pamina ! t'oi, m'être ra vie !... toi, tombée au pouvoir d'un tel scélérat ! Peut-être en ce moment, es-tu déjà ... effroyable pensée !...

Les trois Dames
Arrête, jeune homme

La première Dame
Ne soupçonne pas la vertu de cette beauté ! Malgré toutes les souffrances qu'endure son innocence, elle est restée pure. Elle ne succombera ni à la séduction ni à la violence.

Tamino
Oh ! dit es-moi où demeure ce tyran ?

La deuxième Dame
Tout près de nos montagnes. Dans une vallée agréable et charmante ; son château est superbe et bien gardé.

Tamino
Venez, femmes, conduisez-moi... Je veux sauver Pamina ! [Le rnisérable tombera sous mes coups,] je le jure par mon amour, par mon cœur !

(Coup de tonnerre. Toul devient sombre.)

Tamino
Dieux ! Qu 'arrive-t-il ?

Les trois Dames
Remels- toi !

La première Dame
Ceci annonce l'arrivée de notre Reine.

Coup de tonnerre plus fort

Les trois Dames
La voici

Violent coup de tonnerre. Changement à vue.

La Reine de la Nuit. Costume de Johann Baptist Klein, 1793.

IIe Tableau

Les montagnes s'entr'ouvent, on voit un ciel bleu étoilé, au milieu duquel apparaît le Reine de la Nuit, surt un trône semé d'étoiles. Beau clair de lune.

Scène IX

La Reine de la nuit, debout, devant son trône. Les trois Dames vont prendre place derrière elle. Tamino, en s'avançant, se trouve placé à droite de la Reine de la Nuit. La Reine de la NUit en même temps que Tamino.

No 4. Récitatif et Air

La reine
Ne tremble pas, Ô cher enfan
Ton esprit ferme est juste, bon
De mon cœur maternel, toi seul, sur terre,
Toi seul pourras calmer la paine amère !

Je pleure ma fille chérie,
Hélas ! pour moi plus de bonheur !
Plus rien ne m'attache à la vie (bis)
Un traître, hélas ! me l'enleva.
Je vois encor ma fille,... de crainte... tremblante...
D'angoisse brisée... sans force,sans défense !...
Je vois le monstre me la prendre
« Pitié ! » (bis) ... dit-elle, et ce fut tout.
Ce cri en vain se fit entendre .
Hélas ! ma fille avait disparu.

Oui, c'est toi, toi seul qui pourras me la rendre !
Sois d'une mère le vengeur ! Oui !
Soi de ma fille le sauveur...
Reviens vainqueur, je t'en fais la promesse :
Elle sera toujours à toi, toujours à toi !...

Elle retourne vers son trône. Violent coup de tonnerre. Tamino, ému, reste au premier plan.

IIIe Tableau

Les montagnes se referment, il fait jour. Décor du premier tableau.

Scène X

Tamino seul.

Tamino, après un silence
Qu'aije vu ? Est-ce un rêve ? [Suis-je le jouet de mes sens égarés ?] Dieux bons ! ne me trompez pas ! [je succomberais cette fois. Si c'est une nouvelle épreuve, Guidez mon bras, raffermissez mon courage, et le cœur de Tamino sera toujours rempli de reconnaissance pour vous.].

Il se dirige côté jardin pour sortir. Papageno vient au-devant de lui.

Scène XI

Tamino, Papageno à sa droite

No 5. Quintette

Papageno, penaud, montrant le cadenas attachcé à sa bouche
Hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm !

Tamino
Le malheureux, pour son mensonge.
Le malheureux n'a plus de voix.

Papageno
Hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm !

Tamino
Je ne puis rien, sinon te plaindre,
Je suis trop faible pour t'aider

Papageno
Hm ! hm ! hm ! hm ! hm ! hm !

Les trois Dames entrent, côté jardin ; la première porte une flûte et un carillon.

Scène XII

Les mêmes. Les trois Dames se placent entre Tamino et Papageno.

Première Dame à Papageno
La Reine te pardonne
Elle lui enlève le cadenas de la bouche
Et te délivre par ma main.

Papageno
De ma langue on me rend l'usage

Seconde Dame
Bavarde, mais jamais ne mens plus !

Papageno
Jamais plus je ne mentirai

Les trois Dames
Rapelle-toi cette leçon.

Tous
Si tout menteur, en ce bas monde,
Devait subir le même sort
Le mal délivrerait la terre
Et seul l'amour y règnerait (bis).

Première Dame, à Tamino, en lui donnant la Flûte d' or
O Prince, accepte cette flûte,
De notre Reine le présent.
Garde cette Flûte magique !
Que dans le vie elle te guide
Puissant et fort tu seras par elle
Puissant et fort sur l'esprit des hommes
La tristresse dissiperas,
Et l'orgueilleux abaisseras.
Oh ! cette flûte magique
Vaut plus qu'un trône et plus que l'or
Et le bonheur par elle
Au monde est assuré.

Papageno
Maintenant, ô belles Dames,
Puisje m'en aller d'ici ?

Les trois Dames
Non ! tu n'es pas encor libre ! ...
Notre Reine sans retard
T'envoie ainsi que le Prince,
Vers le château de Sarastro.

Papageno.
Non, merci, je n'y tiens pas
Car vous-mêmes m'avez dit
Que c'est un tigre cruel
S'il me voit chez lui paraître,
Ce Sarastro sans vergogne,
Me fera plumer et cuire
Et dévorer par ses chiens !

Les trois Dames
Sur toi le Prince veillera.
Tu lui serviras d'écuyer

Papageno
Le diable emporte votre Prince !
Moi, je tiens à ma peau !
Il pourrait bien, sur mon honneur,
Me pte qui contient le carillon
Prends ce trésor, il est à toi.

Papageno
Ah ! Ah ! Qu'y a-t-il là-dedans ?

Les trsoi dames
Ce sont des clochettes.

Papageno
Et pourrai-je jouer moi-même ?

Les trois Dames
Tu certainement, tu le pourras.

Ensemble
Ces clochettes, cette flûte
Seront {votre} {notre} sauvegarde
Au revoir ! Séparons-nous (ter).

Elles s'éloignent côté jardin, Tamino et Papaguèno côt" cour, puis reviennent

Tamino
Mais, belles Dames, dites-nous ...

Papageno
Qui nous montrera le chemin ?

Tamino et Papageno
De ce château qui nous montrera le chemin ?

Les trois Dames, revenant
Trois beaux enfants, jeunes, beaux et sages,
Vous guideront dans vos voyages.
Avec courage suivez leur pas,
Et leurs avis n'oubliez pas !

Tamino et Papageno
Trois beaux enfants, charmants et sages,
Nous guideront dans nos voyages .

Les trois Dames
Avec courage suivez leurs pas,
Et leurs avis n'oubliez pas !

Tamino et Papageno
Séparonsz-nous, jusqu'au revoir !
Adieu ! Adieu ! jusqu 'au revoir !

Ensemble
Adieu, adieu , j'usqu'au revoir !

Les trois Dames sortent côté jardin, Tamino et Papageno côté cour. Rideau

IVe Tableau

La chambre de Pamina, dans le palais de Sarastro, de style égyptien. Elle est richement meublée. Au fond et au milieu, une porte. côté cour, au premier plan, un guéridon et une ottomane.

Scène XIII

Deux esclaves apportent de riches coussins, puis une magnifique table orientale et d'épais tapis. Un troisième esclavesuit.

Troisième esclave
Ha! ha! ha!

Premier esclave
Pst! Pst!

Deuxième esclave
Pourquoi ris-tu?

Troisième esclave
Notre bourreau, ce Maure qui nous épie tous, sera sûrement pendu ou empalé demain. . . . Pamina ! Hahaha! . . .

Premier esclave
.. Eh bien? . . .

Troisième esclave
La belle enfant !... Hahaha !...

Deuxième esclave
Eh bien, quoi ?

Troisième esclave
Elle s'est évadée !

Premier et deuxième esclave
Évadée ?

Premier esclave
Sauvée ?

Troisième esclave
Bien sûr ! C'est bien mon vœu le plus sincère

Premier esclave
Oh ! merci ! Dieux bons ! vous avez entendu ma prière !

Troisième esclave
Ne vous ai-je pas toujours dit qu'un jour viendrait pour nous, où nous serions vengés et que le vilain Monostatos serait puni ?

Deuxième esclave
Qui dit le Maure de cette histoire ?

Premier esclave
Car il doit la savoir ?

Troisième esclave
Naturellement! Elle s'est sauvée sous ses yeux. Au dire de quelques-uns de nos frères qui travaillaient dans le jardin, et qui ont tout vu et entendu de loin, le Maure est sûr de son affaire, même, si les serviteurs de Sarastro arrivaient à reprendre Pamina.

Premier et deuxième esclave
Comment cela ?

Troisième esclave
Tu connais ce bouffi plein de luxure et ses façons. Mais la jeune fille a été plus fine que je ne croyais. Au moment où il pensait arriver à ses fins, elle a appellé Sarastro : ce nom a troublé le Maure qui est resté immobile et muet ; et pendant ce temps... Pamina a couru vers le canal et s'est jetée dans une gondole. Elle a pu gagner le petit bois de palmiers.

Scène XIV

Les mêmes, la voix de Monostatos au dehors.

Monostatos
Holà ! Esclaves !

Premier esclave
La voix de Monostatos !

Monostatos, dehors
Holà ! Esclaves ! apportez des fers !

Les trsoi esclaves
Des fers ?

Premier esclave, courant vers la porte du milieu
Pas pour Pamina, je pense ? (Regardant au dehors.) O dieu ! voyez, mes frères, on a rattrapée, la malheureuse !

Deuxième et troisième esclave, regardant au dehors
Pamina: Terrible spectacle !

Premier esclave
Voyez comme ce démon impitoyable lui tord ses tendres mains. ... Je ne puis supporter cette vue. (Il sort en courant, côté jardin)

Deuxième esclave le suivant
Ni moi non plus.

Troisième esclave, de même
Voir cela est un vrai supplice d'enfer !

SCENE XV

Monostatos, Pamina, esclaves au milieu et au fond.

No 6. Trio

Monostatos, entraînant Pamina avec violence
Douce colombe, viens ici !

Pamina, à sa gauche
Oh! quel martyre, quel tourment !

Monostatos
C'en est fait de ta vie !

Pamina
La mort ne m'épouvante,
Mais de ma mère prends pitié !
Elle en mourra de chagrin !

Monostatos
Esclaves, qu'on l'enchaîne
(Les Esclaves se précipitent pour saisir Pamina.)
Succombe sous ma haine.

Pamina
Prends-moi plutôt la vie !
Si rien, barbare, ne t'émeut !

Monostatos
Sortez, sortez ! Laissez-nous seuls ici !

Les Esclaves sortent par le milieu, emportant les fers. Papaguêno apparaît a la même porte, sans être remarqué de Monostatos, qui contemple Pamina en silence.

SCENE XVI

Monostatos, Papageno.

Papageno
Où suis-je ici: Puis-je savoir ?
Eh ! mais ! voici du monde
Tant pis ! je vais entrer.
(Il s'approche.)
O belle et jeune enfant,
Plus blanche que la craie !
(Monostatos, en se retournant, fait peur à Papageno, et réciproquement.)

Monostatos et Papageno
Hou ! c'est le diable assurément !
(Ils se sauvent tous deux, en se regardant a la dérobée, vers la porte du fond; ils se boitculent et s'enfuient de cotés opposés.)
Pitié ! Epargne-moi ! (bis)
Hou ! hou ! hou ! (bis)

SCENE XVII

Pamina, seule, s'éveillant.

Pamina, parlant comme dans un rêve. Mère ! Mère ! Mère ! (Elle revient à elle et regarde tout autour.) Quoi ? Mon cœur bat encore ? [Il n'est pas encore anéanti ?] Revient-il à la vie pour souffrir encore ? Cest trop cruel pour moi ! . . . Plutôt la mort!

Papageno, qui est arrivé a pas étouffés, observe en se tenant au milieu de la scène.

Pamina, costume de Johann Baptist Klein, 1793

SCENE XVIII

Pamina, Papageno, à sa gauche.

Papageno
Étais-je assez bête de me laisser effrayer ainsi ? Il y a des oiseaux noirs par le monde, il peut bien y avoir des hommes noirs ! (Apercevant Pamina.) Hé, que vois-je ? Notre belle princesse est encore ici. (À Pamina.) Noble fille de la Reine de la Nuit . . .

Pamina, se levant
La Reine de la Nuit ? . . . Qui donc es-tu ?

Papageno
Un envoyé de la Reine qu'entourent les étoiles.

Pamina, avec joie
De ma mère ? Quel bonheur ! Quel est ton nom ?

Papageno
Papageno.

Pamina
Papageno ? Papageno ? Je me rappelle avoir souvent entendu ce nom, mais je ne t'ai jamais vu.

Papageno
Je ne te connais pas davantage.

Pamina
Ainsi tu connais ma mère bien-aimée ?

Papageno
Si tu es la fille de la Reine de la Nuit, — oui.

Pamina
C'est bien moi

Papageno
Je vais m'en assurer tout de suite. (Il la compare au portrait que le Prince a reçu auparavant, et que Papaguéfio porte pendu au cou par un ruban) Yeux bleus ... ils sont bleus ; lèvres roses. . . les lèvres sont roses ; cheveux blonds . . . c'est cela, cheveux blonds. Tout est exact, sauf pour les mains et les pieds. D'après le portrait, tu ne devrais avoir ni pieds ni mains, puisqu'ils ne sont pas représentés.

Pamina
Permets.
Papageno lui montre le portrait.
C'est bien moi ; mais, comment ce portrait est-il venu entre tes mains ?

Papageno
Ce serait trop long à te raconter; il est passé de main en main.

Pamina
Mais comment dans la tienne ?

Papageno
D'une façon étonnante. Je l'ai pris ... comme un oiseau.

Pamina
Pris ?

Papageno
Il faut que je te raconte cela avec détails. Ce matin, comme d'habitude, je me rendais au palais de ta mère pour lui livrer mes oiseaux . . .

Pamina
Pour lui livrer ? . . .

Papageno
Oui ; c'est moi qui apporte depuis des années à ta mère et à ses suivantes tous ces jolis oiseaux . . . J'étais occupé à leur remettre mes oiseaux, lorsque je vis devant moi un personnage, qui se faisait appeler prince. Ce prince a su plaire à ta mère au point qu'elle lui a fait cadeau de ton portrait, en lui ordonnant de courir à ta délivrance. Son ardeur à exaucer ce désir fut aussi prompte que la naissance de son amour pour toi.

Pamina
Son amour ! (Joyeuse.) M'aime-t-il vraiment ? Oh ! dis-moi encore qu'il m'aime ; il est si doux d'entendre ce mot d'amour.

Papageno
Je n'en doute pas. Cela est bien naturel pour une jeune fille. — De quoi te parlais-je ?

Pamina
D'amour.

Papageno
C'est cela, d'amour. Quelle mémoire j'ai ! Bref, ce grand amour pour toi a été le coup de fouet qui nous a mis en route. Nous sommes donc arrivés ici promptement, pour te dire mille choses agréables, te prendre dans nos bras, et si cela est possible, te ramener, plus vite encore, dans le palais de ta mère.

Pamina
Tout cela est fort bien, cher ami, mais si ce jeune homme inconnu, ce Prince comme on l'appelle, a pour moi de l'amour, pourquoi tarde-t-il tant à venir me délivrer de mes fers ?

Papageno
C'est Là le hic ! Quand nous avons pris congé des trois jeunes dames, elles nous ont dit que trois beaux enfants nous serviraient de guides et nous indiqueraient ce qu'il faudrait faire.

Pamina
Ils vous l'ont dit ?

Papageno
Ils ne nous ont rien dit, car nous n'en avons pas vu un seul. Mais le Prince a été assez avisé pour m'envoyer en éclaireur t'annoncer notre arrivée [variante : Eh ! bien, le Prince t'aime éperduement et il m'envoie pour t'annoncer son arrivée]

Pamina
Ami, tu as joué gros jeu : si Sarastro te voyait ici..

Papageno
Il m'épargnerait le voyage de retour, c'est probable !

Pamina
Tu périrais au milieu des souffrances les plus atroces.

Papageno
Pour l'éviter, nous pourrions fuir à temps.

Pamina
Quelle heure indique le soleil : Le soleil n'approche-t-il pas de midi ?

Papageno
Il en est proche.

Pamina.
Nous n'avons donc pas une minute à perdre. C'est l'heure à laquelle Sarastro a l'habitude de revenir de la chasse.

Papageno
Sarastro, dis-tu, est absent ? Mais alors, nous avons gagné la partie. Viens, belle princesse, tu ouvriras de grands yeux quand tu verras le beau jeune homme.

Pamina. [Eh bien! essayons de fuir.] (Ils font quelques pas, puis Pamina se retourne.) Mais, si tout cela n'était qu'un piège ? Si tu n'étais qu'une méchante créature de Sarastro. (Elle le regarde avec méfiance.)

Papageno
Moi ? À quoi penses-tu ? Je suis la meilleure créature de la terre.

Pamina
Mais non, ce portrait me convainc, il n'y a pas de doute, car il vient de ma bonne mère.

Papageno
Belle demoiselle, si jamais vous deviez avoir encore l'affreux soupçon que je pourrais être un traître, pensez fortement à l'amour, et vous ne douterez plus.

Pamina
Pardonne-moi, ami, si je t'ai offensé. Je vois [à chacun de tes traits] que tu as un cœur d'or.

Papageno
Je le sais bien que j'ai un cœur d'or, mais à quoi cela me sert-il ? Je voudrais parfois, de désespoir, m'arracher toutes mes plumes, quand je pense que Papageno n'a pas encore sa Papagena.

Pamina
Pauvre homme! Tu n'as donc pas de femme ?

Papageno
Pas même une amie! Comment aurais- je une femme ? Oui, cela est triste. Un homme de ma condition voudrait bien aussi avoir du bon temps.

Pamina
Patience, ami. La Providence ne t'oubliera pas, et t'enverra une amie, plus tôt que tu ne le penses.

Papageno
Pourvu que ce soit bientôt !

No 7. Duo

Pamina
Au cœur de l'homme qu'il enflamme,
L'Amour enseigne la Bonté.

Papageno
Aimer qui l'aime pour la femme,
C'est le devoir le plus sacré.

Ensemble
L'amour règne en nos cœurs, toujours!
Nous ne vivons que par l'amour.

Pamina
L'amour sur tous domine en maître,
Tout être lui doit son tribut.

Papageno
Il est la voix de la nature,
Sa loi suprême et son parfum.

Ensemble
Le monde entier subit sa loi,
Le couple humain est sa splendeur ! (bis)
Seul l'amour nous rend heureux !
Homme et femme, par l'amour,
Sont vraiement pareils aux dieux ! (bis.)

(Ils sortent par la porte du millieu)

Ve Tableau

Bois sacré, dans lequel se trouvent trois Temples. Celui du milieu, le plus grand, porte l'inscription : Temple de la Sagesse. Sur le Temple de gauche on lit : Temple de la Raison. Sur le troisième, à droite: Temple de la Nature. Les trois Temples sont reliés par des colonnades.

Scène XIX

Les trois enfants viennent de côté cour, portant des palmes argentées; ils accompagnent Tamino, qui porte la flûte attachée à son cou.

No 8. Finale

Les trois enfants
Au but ce chemin te conduit —
Sois homme, le danger commence,
Observe bien tous nos avis :
Constance, force et silence.

Tamino
Jeunes enfants, répondez-moi :
Pamina, puis-je la sauver ?

Les trois enfants
Ton seul courage est ton secours.
Constance, force et silence.
Ne tremble pas, suis ton chemin.
Et conduis-toi avec vaillance ! (bis.)
(Les trois enfants sortent côté cour, en avant-scène.)

Scène XX

Tamino seul, des voix

Tamino
Que leur sagesse soit gravée A tout jamais dans ma pensée.
Où suis-je donc ? Que vais-je voir ?
Ces trois palais, aux dieux voués,
Ces hautes colonnes, ces portes altières, Indiquent le séjour des Arts des Sciences. Où vit la Sagesse, où trône l'esprit,
Le vice succombe, le mal est proscrit !
(Il se dirige vers le Temple de gauche.)
Sans crainte, ces portes, je vais les franchir ! Mon cœur est sincère et noble mon but. Frapper ce scélérat ! Pamina libre!
O chère aimée te sauver !                                    :
(Il s'est rapproché du Périple de droite.)

Une voix
Arrière !

Tamino
Arrière ? arrière ? Qu'une autre porte s'ouvre !
(Il se dirige vers le Temple de gauche.)

Une voix
Arrière ?

Tamino
Eh ! quoi ? ne puis-je entrer ?
Voici mon dernier espoir:
Frappons au Temple du milieu !
(Il se dirige vers le Temple du milieu. La porte. s'ouvre. Un Prêtre à la barbe et aux cheveux blancs s'avance vers lui.)

Scène XXI

Le prêtre, Tamino à sa gauche.

Un prêtre
Étranger téméraire,
Dans ces parvis que cherches-tu ?

Tamino
Mon bien, l'amour et la vertu !

Le prêtre
Nobles paroles, mais, dis-moi,
Comment veux-tu les conquérir ?
Tu n'as d'amour ni de vertu.
La mort, la haine te conduisent !

Tamino
Je cherche un misérable !

Le prêtre
Il n'en est point dans nos demeures.

Tamino
Ici Sarastro règne en maître.

Le prêtre
C'est vrai, Sarastro règne ici.

Tamino
Lui, dans ce temple consacré ?

Le prêtre
Il règne dans ce temple saint.

Tamino
Tout est mensonge et perfidie !
(Il fait un mouvement pour sortir.)

Le prêtre
Veux-tu déjà partir ?

Tamino
Oui, je veux fuir, libre et fier,
Loin de ces lieux impurs.

Le prêtre
Demeure ! explique-toi !
L'erreur trouble tes sens.

Tamino
Sarastro vit ici:
Cela suffit pour moi.

Le prêtre
Pour l'amour de toi-même,
Écoute, réponds-moi :
Sarastro, tu le hais ?

Tamino
Je le hais à jamais.

Le prêtre
Pour quelle cause, dis-le moi ?

C'est un despote, un tyran !

Le prêtre
Il faut m'en donner une preuve !

Tamino
La preuve est sa fureur cruelle
Contre une mère qu'il poursuit !

Le Prêtre
Une femme a troublé tes sens ?
Enfant, des propos d'une femme
Ignores-tu le peu de sens ?
Si tu savais par quels desseins
Sarastro se laisse guider ... 

Tamino
Trop clairs pour moi sont ses desseins.
Il arracha, malgré ses larmes,
Pamina des bras de sa mère.

Le prêtre
Jeune homme, c'est la vérité.

Tamino
Vit-elle: Vit-elle encor ?
Ou bien, faut-il pleurer sa mort ?

Le prêtre
Je ne puis rien te révéler.
Mon fils, je dois rester muet.

Tamino
Pourquoi te taire ?
Quel tourment !

Le prêtre
Je suis lié par mon serment.

Tamino
Quand reverrai-je la lumière ?

Le prêtre
Bientôt, par notre main conduit,
Tes yeux au jour seront ouverts.
(Il se retire par la porte du milieu)

Scène XXII

Tamino seul, Les voix

Dessin de scène de 1793 par Gayl et Nessthaler (gravure colorée de Joseph et Peter Schaffer). Tamino rassemblme les animaux au son de sa flûte.

Tamino
O longue nuit ! Quand donc l'aurore,
Enfin, pour moi, va-t-elle éclore ?

Chœur
Bientôt, bientôt, ou jamais !

Tamino
Ah! bientôt ou jamais !
Voix invisibles, dites-moi
Si Pamina vit encor :

Les voix
Pamina (bis) vit encor !

Tamino
Elle vit ! (bis) ô Dieux ! à vous merci !
(Il prend sa flûte)
Ah! que ne puis-je, sur ma flûte,
Dieux tout-puissants, à votre gloire
Vous dire la reconnaissance
De mon cœur plein d'ardeur!...
(Il joue de la flûte. A l'instant, des bêtes sauvages et des oiseaux de toute espece apparaissent. Tamino cesse de jouer. Les bêtes se retirent.)
De quel pouvoir puissant et doux,
O chère flûte, tu disposes !
Ta voix agit sur tous les êtres.
(Il joue de la flûte)
Mais, las ! Pamina, mais Pamina ne vient pas !
Mais Pamina ne répond pas !
(Il joue encore.)
Pamina ! (bis) entends-moi ! entends-moi !
(Il joue.)
J'appelle en vain !
(Il joue)
Rien ?
Où te retrouverai-je enfin ?
(Il joue.Papagena répond, du coté droit, avec sa flûte de Pan.)
Ah! c'est Papageno, sans doute ?
(Il joue)
Pamina peut-être le suit ?
Il va me l'amener ici ?
Vers lui allons, le son me guidera !

Il sort rapidement, au fond côté cour. Papageno et Pamina arrivent après sa sortie. Ils sont libres de tout lien.

Scène XXIII

Pamina, Papageno à sa droite

Pamina et Papageno
Par la fuite, évitons L'ennemi qui nous poursuit !
Vers Tamino, hâtons-nous pour }
Nous échapper, nous échapper de leurs mains.} bis

Pamina
Cher Tamino !

Papageno
Chut ! silence, ce moyen vaut mieux peut-être.
(Il souffle dans sa flûte ; la flûte de Tamino répond, du lointain)

Papagenoe et Pamina
C'est sa flûte ! Pas de doute !
C'est Tamino qui répond !
(étendant la main côté cour.)
Les Dieux bons nous la ramènent !
Allons vite à sa rencontre,
Allons vite, vite, vite ...
(Ils se dirigent côté cour.)

Monatstos se dresse devant eux.

Scène XXIV

Les mêmes, Monostatos à la droite de Papageno, puis des esclaves.

Monostatos, ironiquement
Allez vite, vite, vite ...
Ah! je vous attendais là!
Vite, apportez-moi des chaînes.
Le Maure va vous apprendre,
De Monostatos la crainte.
(Appelant vers la droite.)
Apportez des fers, des chaînes!
Ho! esclaves, par ici!
(Les esclaves apportent des chaînes.)

Pamina et Papageno
Ah ! pour nous, tout est fini !

Papageno
Si j'osais ! ... Qui ne risque rien n'a rien ...
(prenant son glockenspiel.)
Viens, mon gentil glockenspiel,
Fais tinter à leurs oreilles
Et résonner tes sonnettes!  ...

Monostatos et esclaves
(se mettant à danser)
O belle musique, musique, doux son !
La, la, la ...
(Ils s'éloignent en chantant et en dansant.)

Scène XXV

Papageno, Pamina se place à la droite de Papageno

Pamina ET Papageno
Puissent tous les braves gens,
Leurs ennemis vaincre,
Et par de tels talismans,
Dissiper leurs craintes!
Ils passeraient tous leur vie
Dans la plus douce harmonie (bis).
La concorde et l'harmonie
Apaiseraient l'âme,
Et feraient par sympathie Le bonheur du monde.
(On entend soudain une marche brillante.)

Chœur (au dehors)
Gloire à Sarastro, Sarastro vive!

Papageno
Eh! quoi, quelle alarme !
Je tremble! je tremble !

Pamina
Ami, ami! c'est fait de nous !
Tout est pardu ! Sarastro vient !

Papageno
Ah ! si j'étais souris,
Je pourrais disparaître,
Rentrer dans ma coquille,
Si j'étais escargot !
Dis-moi, qu'allons-nous dire :

Pamina
La vérité ! (bis) au prix de notre vie !

Scène XXVI

Les mêmes, Sarastro et sa suite. Les Prêtres arrivent par les portes du milieu, et côté cour, les hommes d'armes et la foule, de côté jardin. Les femmes suivent derrière le char de Sarastro, à gauche; les esclaves arrivent des côtés cour et jardin. Sarastro fait son entrée le dernier, sur un char triomphal, traîné par des lions.

Dessin de scène de 1793 par Gayl et Nessthaler (gravure colorée de Joseph et Peter Schaffer). Entrée de Sarastro.

La foule
Gloire à Sarastro! Sarastro vive !
C'est lui, notre maître, qui nous fait notre joie
Qu'il fasse connaître sa force en tout lieu !
Il est notre maître, il est notre dieu !
(Sarastro descend de son char.)

Pamina (à genoux)
Maître, j'embrasse tes genoux !
Pitié ! ne me condamne pas !
Le seul coupable, le voilà!
Ce vilain Maure veut me séduire ...
Voilà pourquoi j'ai voulu fuir.

Sarastro
C'ést bien ! relève-toi, ma fille.
Je sais le souci de ton âme,
Je sais le secret de ton cœur.
Je sais qu'un autre a ton amour ;
Aussi, nul ne peut te contraindre,
Mais je te garde en mon pouvoir.

Pamina
Mais loin d'ici est mon devoir.
Ma tendre mère ...

Sarastro
Est à ma merci !
Et tu perdrais tout ton bonheur,
Si je te renvoyais près d'elle.

Pamina
Combien m'est doux ce nom de mère !
Je l'aime ... (bis).

La foule
... Un être d'orgueil !
Il faut qu'un homme vous dirige.
Femmes, sans lui, tout n'est qu'erreur,
Tout n'est qu'erreur, dans votre vie.

Monastasos et Tamino entrent au fond côté cour. Les précédents, Monastatos et Tamino à la droite de Sarastro.

Monostatos, entrant avec Tamino
Rusé jeune homme, viens ici,
Devant Sarastro, notre maître.

Pamina
C'est lui !

Tamino
C'est elle !

Pamina
J'en doute encor.

Tamino
Ai-je rêvé ?
(Ils se rapprochent.)

Tamino et Pamina
Presse sur mon cœur !
Je me sens mourir de bonheur !
Quelle surprise !

Monostatos, les séparant
Quelle témérité !
L'un près de l'autre ! Séparons-les !

(Il s'agenouille devant Sarastro)
Seigneur, ton esclave demande
Que ta main frappe le coupable.
Il a voulu, ce scélérat (montrant Papageno),
Grâce à cet oiseau de malheur,
Aider Pamina dans sa fuite !
Mais, j'ai su dejouer leur ruse !
Tu connais, Maître, ma valeur ...

Sarastro
Tu vas en recevoir le prix !
(Faisant un signe.)
Hé ! qu'on lui donne, sans tarder ...

Monostatos
Ta bonté, Maître, me suffit.

Sarastro
Soixante et dix sept coups de bâton.

Monostatos
Seigneur ! Ce n'est pas ce que j'attendais ! ...

Sarastro
Tais-toi ! J'accomplis mon devoir.
(Des Esclaves entraînent Monostatos par la gauche, et sortent avec lui.)

Sarastro. Costume de Johann Baptist Klein, 1793

Scène XXVIII

Les mêmes moins Monostatos.

Chœur
Sarastro le Sage, aux Justes propice,
Aux traîtres sévère, agit sans faiblesse.

Sarastro
Au temple des épreuves
Conduisez ces deux étrangers.
Les yeux couverts d'un voile noir,
Qu'ils soient d'abord purifiés!
(Deux prêtres sortent a droite, puis reviennent, portant des voiles noirs dont ils recouvrent la tête de Tamino et de Papageno.)

 

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Samedi 24 Avril, 2021