Monaco, le 16 septembre 2022 —— Jean-Luc Vannier.
Cecilia Bartoli. Photographie © Opéra de Monte-Carlo.
Heureux hasard du calendrier, la chaine culturelle franco-allemande Arte.de programmait le 15 septembre une émission spéciale « Cecilia Bartoli & Friends » réalisée par le metteur en scène Fabio de Luca et dédiée à la mezzo-soprano italo-autrichienne afin de célébrer les trente années de sa présence sur les plus grandes scènes du monde.
Ce reportage dévoilait, dans l’après-coup, l’esprit du programme de la saison 2023 de l’opéra de Monte-Carlo, présenté le lendemain salle Garnier par Cecilia Bartoli elle-même. Entourée de son « futur prédécesseur » Jean Louis Grinda, d’Oliver Widmer — son époux à la ville — de Gianluca Capuano, Chef principal des Musiciens du Prince et de Magdalena Grob, en charge de la communication, la directrice générale désignée a exploité plusieurs extraits, fascinants au demeurant, de ce reportage afin d’étayer et d’illustrer le fait que « sa première saison lyrique reflète certaines de ces caractéristiques, telles que je les vois : un regard attentif posé sur l’histoire mais aussi tourné vers son avenir ; une variété de styles et de genres : du prestige, de la grandeur mais aussi de l’intimité; et bien sûr la plus haute exigence d’exécution pour les spectacles présentés ». « Exigence », « énergie », « éthique professionnelle », « précision » mais aussi « humanisme » et « altruisme » furent d’ailleurs des expressions usitées par celles et ceux interrogés sur la diva au cours de l’émission d’Arte.
C’est en quelque sorte entourée de ses plus fidèles amis et célèbres interprètes que Cecilia Bartoli semble avoir construit ce programme, étonnamment riche mais resserré dans un petit semestre : « ce voyage reflète également mon cheminement personnel » a-t-elle précisé. Et quel voyage puisque du 20 janvier au 17 avril 2023, trois siècles musicaux et lyriques seront allègrement franchis !
La saison 2023 débutera avec, pour la première fois en version scénique à Monaco, la production d’Alcina de Georg Friedrich Händel dans une mise en scène de Christof Loy. Autour de Cecilia Bartoli dans le rôle-titre sont réunis quelques-uns de ses chanteurs baroques préférés : Philippe Jaroussky, Sandrine Piau et Varduhi Abrahamyan. Les Musiciens du Prince-Monaco joueront sur des instruments historiques et seront dirigés par le chef principal Gianluca Capuano.
Le 25 janvier, un concert de chœur exceptionnel — Cecilia Bartoli a clairement laissé entendre son désir de renouer avec ce répertoire — avec le Stabat Mater de Gioacchino Rossini lequel permettra au chœur de l’Opéra de Monte-Carlo (Stefano Visconti) et à l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo de relever « un défi très motivant tout en exprimant leur talent ». Maria Agresta, Varduhi Abrahamyan, Celso Albelo et Ildebrando d’Arcangelo en seront les principaux interprètes.
À partir du 19 février, le ténor Jonas Kaufmann — enfin ! — endossera le rôle-titre d’Andrea Chénier d’Umberto Giordano dans une mise en scène signée Pierfranco Maestrini avec Maria Agresta dans le rôle de Madeleine de Coigny. Marco Armiliato en sera le directeur musical.
S’en suivra, le vendredi 10 mars, un récital exceptionnel de piano par Daniel Barenboim à l’occasion de son 80e anniversaire. Pour la petite histoire, telle qu’il la raconte dans le reportage d’Arte, c’est Daniel Barenboim — sur les conseils insistants de son épouse alors qu’il rentrait éreinté et affamé d’une répétition — qui a découvert à la télévision française Cecilia Bartoli alors qu’elle était une très jeune chanteuse.
À peine sept jours plus tard, l’opéra reprendra la production, annulée au printemps 2020 en raison de la pandémie de Covid 19, de La Traviata de Giuseppe Verdi dans la mise en scène de Jean-Louis Grinda avec, pour sa prise de rôle, Javier Camarena dans le rôle d’Alfredo Germont et Aïda Garifoullina dans celui de Violetta. Après quelques décennies d’absence, Plácido Domingo revient sur la scène de l’opéra de Monte-Carlo pour incarner Giorgio Germont.
Le printemps monégasque — et le mois de mars 2023 — sera effectivement chargé puisque tout en poursuivant les représentations de La Traviata, l’opéra de Monte-Carlo offrira le 20 mars — cerise sur le gâteau — une mise en espace de Le Nozze di Figaro de W. A. Mozart par la Wiener Staatsoper dans une distribution typiquement viennoise et avec le Philharmonique de Vienne dirigé par Philippe Jordan.
Le 16 avril débuteront les représentations de Il Barbiere di Siviglia signées Rolando Villazón. Cecilia Bartoli, dans le rôle de Rosina, sera à la tête d’une distribution particulièrement soignée avec, entre autres, Nicola Alaimo, Levy Sekgapane, Alessandro Corbelli et Ildar Abdrazakov.
L’Orfeo de Claudio Monteverdi clôturera le 17 avril la saison lyrique monégasque dans une version des plus singulières où la mise en scène sera jouée par des marionnettistes milanais (Franco Citterio et Giovanni Schiavolin) tandis qu’une distribution vocale de spécialistes italiens (Sara Mingardo, Carlotta Colombo et Renato Dolcini) sera placée dans la fosse d’orchestre où elle prêtera sa voix aux marionnettes.
La continuité dans le changement : tout en remerciant Jean-Louis Grinda qui se félicitait « que des institutions culturelles soient dirigées par des artistes », Cecilia Bartoli n’en fait pas moins souffler un vent nouveau sur l’opéra de Monte-Carlo. En témoigne, notamment dans la forme, l’imbrication de plusieurs productions simultanées comme cela existe depuis fort longtemps en Allemagne ou en Autriche. Tout comme l’annonce d’une collaboration avec les autres institutions culturelles de Monaco dont « des projets concrets » avec les prestigieux Ballets de Jean-Christophe Maillot. Autre caractéristique : Cécilia Bartoli concentre sa première saison sur des œuvres d’un répertoire qu’elle maîtrise parfaitement, gage assuré du plein succès. Un premier semestre époustouflant au regard aussi des interprètes sollicités. Mais l’impérieuse obligation subséquente, avec un tel niveau d’excellence au départ, d’en maintenir la ligne au fil des saisons à venir. Craintes sans doute infondées : faisons même le pari que la mezzo-soprano au regard si malicieux nous réserve d’autres surprises dont elle conserve jalousement le secret !
Monaco, 16 septembre 2022
Jean-Luc Vannier
Histoire de l’opéra français, de la Belle Epoque au monde globalisé : à la fin, c’est la voix qui triomphe ! — Le Bel Canto s’impose pour la saison lyrique 2022-2023 à l’Opéra de Nice — Des grandes œuvres du répertoire lyrique pour la saison 2022-2023 à l’Opéra de Marseille.
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Dimanche 18 Septembre, 2022 9:00