4 janvier 2022 —— Michaël Sebaoun.
Anne-Louise Brillon de Jouy, The Piano Sonatas rediscovered, Nicolas Horvath (piano). Grand Piano 2021 (2 v. GP872-73).
Enregistré les 12-23 octobre 2020, à Misy-sur-Yonne.
Le pianiste Nicolas Horvath, qui enregistre, pour le label Grand Piano, Czerny et Philip Glass, Debussy, Hélène de Montgeroult ou encore Alvin Lucier, révèle au disque la compositrice française Anne-Louise Brillon de Jouy (1744-1824).
Pianiste et claveciniste, tenant salon à Passy, marié à Jacques Brillon de Jouy et mère de deux filles qu’elle entoure de peinture et de musique, auteure de près de quatre-vingt-dix œuvres (essentiellement de la musique de chambre et des pièces vocales), Anne-Louise Brillon de Jouy et sa musique ne rayonnent alors, question de convention sociale, que dans un cadre privé.
Nicolas Horvath a rassemblé sur un double CD, à partir de manuscrits inédits, treize sonates (v. 1760-70). Elles forment le Troisième recueil de sonates pour le pianoforte avec accompagnement ad libitum (un accompagnement de violon non employé ici). Ces sonates suivent presque toutes la forme en deux mouvements, conforme au modèle italien. Et l’on est confondu par l’imagination de la compositrice. La Sonate en La mineur (précédant le recueil) sonne, dans sa simplicité harmonique, comme du Schubert avant l’heure. La Sonate no 1 en do mineur oscille entre Mozart et Beethoven, pas encore né. La Sonate no 3 en do majeur atteint presque à l’immatérialité de Mozart, tandis que la Sonate no 6 a des allures de Fantaisie. La tempétueuse Sonate no 10 en sol mineur, avec son thème en rythmes pointés et en syncopes, balaie tous les registres du clavier.
L’Andante de la Sonate no 7 en si bémol majeur, avec ses nombreuses appoggiatures, émeut.
Nous soulignerons, dans ce recueil, la fantaisie du style, les figures imprévues, la variété des registres explorés du piano tout autant que celle des états expressifs.
L’interprétation de Nicolas Horvath est-elle irréprochable ? Peut-être que non. Une (très) relative impétuosité caractérise parfois son jeu, qu’une prise de son légèrement sèche ne corrige pas. Ce sont peu de choses en regard du plaisir infini que procure ce corpus de sonates.
Madame Brillon, « l’une de ces reines du siècle avec son humanité intemporelle », écrit dans la notice Christine de Pas. « Les femmes régnaient alors, la Révolution les a détrônées », poursuit la musicologue, citant la peintre Elisabeth Vigée Lebrun. La musicienne se retire alors à Villiers-sur- Mer, en Normandie.
Sous les doigts de Nicolas Horvath et à la faveur de ce premier enregistrement mondial, Anne-Louise Brillon de Jouy rejoint aujourd’hui l’Histoire de la musique.
Nous remonte alors en mémoire le portait de la compositrice peint par Fragonard, L’étude, portrait rayonnant de la musicienne, tête légèrement inclinée, yeux baissés, toute d’élégance vêtue.
Anne-Louise Brillon de Jouy, Sonate en la mineur, II. Allegro con motto. Michaël Sebaoun
4 janvier 2022.
© musicologie.org.
Biographie d'Anne-Louise Brillon de Jouy
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Vendredi 3 Février, 2023 19:03