La première étape de notre parcours s'arrêtait avec Frescobaldi ; celle-ci vise à explorer la production musicale des deux derniers tiers du xviie siècle, en débordant marginalement sur les premières réalisations ècle suivant.
Ce premier âge baroque nous apparaît d'une richesse foisonnante. C'est que la musique instrumentale a désormais pris son essor, et surtout gagné son autonomie. Mais il y a plus, car la richesse de cette époque tient aussi à toute une série d'évolutions qui vont peu à peu modifier en profondeur le paysage musical.
Pour en donner un aperçu à travers un raccourci non dénué de poésie, nous reprendrons ci-dessous quelques lignes par lesquelles, dans son Histoire de la musique, Émile Vuillermoz concluait sa présentation du xviie siècle :
En s'achevant, le xviie siècle laisse donc aux musiciens européens une série de modes d'expression de la plus grande variété. Beaucoup d'entraves ont été brisées, beaucoup de bastilles ont été prises. La dictature de la polyphonie vocale est terminée. Les instruments, si longtemps méconnus, sont désormais à l'honneur et engendrent toute une littérature nouvelle d'un raffinement extrême.
Le lyrisme est né avec la cantate, l'oratorio, les récits, les airs et le théâtre chanté.
Dénoué et rendu indépendant par l'harmonie verticale, le fil de la mélodie qui, jusqu'ici, était savamment replié et entortillé sur lui-même par le métier à dentelles du contrepoint, flotte et ondule désormais librement avec une souplesse parfaite.
La notion de l'accord est si bien admise et son caractère individuel si nettement affirmé qu'un simple indice placé sur sa basse suffit désormais à l'évoquer mathématiquement et à le placer tout vivant dans la main de l'exécutant, avec son système nerveux, ses élans secrets
La dissonance expressive vivifie et humanise
Les matériaux de construction de la sonate, du trio et de la symphonie sont rassemblés és à pied d'œuvre.»1
Qu'on s'en réjouisse ou non, car elles ne sont pas forcément vues comme synonymes de progrès, ces évolutions vont être très progressives. Très heureusement, les vertus du contrepoint ne seront pas toujours oubliées, loin s'en faut. Même chez Corelli, qui a tant contribué à l'évolution du langage musical et à la promotion de nouvelles formes — sonates et concertos — promises à un brillant avenir, l'ancien style polyphonique est loin d'être sacrifié au profit du nouveau style de la monodie accompagnée. Purcell lui-même demeurera très attaché à la polyphonie à l'anglaise lorsqu'il se coulera dans le moule italien de la sonate en trio pour écrire ses 22 sonates. Et bien entendu, en regardant du côté des musiciens allemands ou français, on pourrait multiplier les exemples allant dans le même sens. En outre, les formes nouvelles — sonate, concerto, symphonie — mettront encore un temps certain à s'imposer, de sorte que par exemple la bonne vieille suite instrumentale, cette forme si typique de l'époque baroque, a encore de beaux jours devant elle.
En attendant J.-S. Bach et ses plus illustres contemporains, ce « xviie siècle baroque », marqué par des personnalités telles que Buxtehude, Froberger, Pachelbel, Corelli, Grigny, Louis Couperin et Purcell, nous offre un patrimoine musical extrêmement divers et des plus précieux.
Notes
1. Vuillermoz Émile, Histoire de la musique.Fayard, Paris 1960 (1949).
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Jeudi 28 Mars, 2024