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28 mars 2025 — Frédéric Léolla

Mélanges

Sexe et opéra (XII. 6) : Lakme

Léo Delibes, Lakmé, Théâtre de l'opéra comique, 14 avril 1883, lithographie d'Antonin-Marie Chatinière, 1883.Léo Delibes, Lakmé, Théâtre de l'opéra comique, 14 avril 1883, lithographie d'Antonin-Marie Chatinière, 1883.

Musique de Leo Delibes, sur un livret de Edmond Gondinet et Philippe Gille d’après Rarahu ou le mariage de Pierre Loti, créée 1883, Paris,Opéra-Comique.

La Lakmé est un must quand on parle d’amours inter éthniques à l’opéra.

Le jeune officier Gérald tombe amoureux de Lakmé, la très (trop ?) jeune fille du derviche indien Nilakantha. Or non seulement celui-ci voue une haine féroce aux Anglais, mais en plus il considère sa fille comme une enfant sacrée que nul mortel ne doit atteindre. Lakmé, tombée elle aussi sous le charme de l’anglais, finira par se rendre compte de l’impossibilité de leur amour et se suicidera, non sans avoir protégé avant son Gérald des foudres des Indiens.

Le schéma est assez classique. Depuis Walter Scott on sait que les histoires d’amour entre personnes de groupes ethniques, ou religieux, différents ne peuvent (ne doivent ?) finir bien.

Nellie Melba dans le rôle de Lakmé.Nellie Melba dans le rôle de Lakmé, 1er janvier 1900. Elle prit le rôle au Théâtre de la Monnaie à bruxelles le 8 mars 1888.

C’est peut-être pour cela même que les compositeurs, dans de pareils cas, peuvent se donner à cœur joie dans l’évocation du plaisir, de l’amour foudroyant et puissant qui ne peut avoir une issue socialement acceptable et qui par là même ne peut non plus être contaminé par des intérêts matériels : on fait appel à la partie « animale » du spectateur, à ses plus profonds instincts.

Léo Delibes, Lakmé, « Duo des fleurs », Nadine Sierra et Pretty Yende, Les Frivolités parisiennes, sous la direction de Giacomo Sagripanti, Philharmonie de Paris, 6 mars 2023.
Léo Delibes, Lakmé, air des clochettes, Sabine Devieilhe, Les Siecles, sous la direcdtion de Francois-Xavier Roth.

Cela est déjà évoqué depuis le début de la Lakmé dans un très charmant quintette (« Ah ! Beaux faiseurs de systèmes ») autour du contraste entre l’amour bourgeois à l’occidentale et l’amour à l’indienne (ou plutôt ce que les occidentaux fantasment sur l’amour en Inde, car il est connu que les règles en matière de mariage peuvent être même plus rigides en Inde qu’en Europe).

Ainsi, Delibes, qui est un des mélodistes les plus accomplis de tout l’opéra français, a une excuse formidable pour nous envahir de faux exotismes, de douces cantilènes, de mélodies d’un charme fou, très immédiates, avec trois duos d’amour, un par acte.

Mais il y a aussi dans Lakmé des allusions à la sexualité naissante de l’adolescente (« Pourquoi dans les grands bois ») au désir féminin, qui sont d’une rare délicatesse.

Il n’y aura pas de bouleversement de la musique grâce à cet opéra, mais il y a, il y a eu et il y aura toujours, pour le public, un entraînant plaisir à l’écouter et à le voir.

Léo Delibes, Lakmé, « Tout est fini... », la mort de Lakmé, Joan Sutherland (Lakmé), Henri Wilden (Gerard), Clifford Grant (Nilakantha), Sydney Opera, sous la direction de Richard Bonynge, 1976.

plume_04 Frédéric Léolla
28 mars 2025

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Mercredi 2 Avril, 2025 0:59