Giacomo Meyerbeer, Les Huguenots, acte v, Académie royale de musique, estampe de Charles Alexandre
Debacq, , 1836.
Musique de Giacomo Meyerbeer, sur un livret de Eugène Scribe et Emile Deschamps, créés en 1836, Opéra de Paris.
Raoul de Nangis, gentilhomme huguenot dont le serviteur Marcel est encore plus huguenot, est tombé amoureux d’une mystérieuse dame. Celle-ci n’est autre que Valentine, fille catholique du très catholique comte de Saint-Bris, qui est aussi tombée amoureuse du jeune huguenot. Et ça devrait tomber bien puisque Marguerite de Valois voudrait que celui-là épouse celle-là. Mais un malentendu porte Raoul à croire que Valentine aime secrètement le séducteur comte de Nevers, catholique lui aussi. Le huguenot refuse donc le mariage avec Valentine, au grand scandale du père de la fiancée. Valentine sera donc mariée au comte de Nevers comme il était prévu avant que la reine Marguerite de Valois ne s’en mêle.
Les Huguenots, estampe, Fichtenberg éditeur Paris 1836.
Lorsque Raoul se rend compte de son erreur, il est trop tard, Valentine est déjà une femme mariée. Qui plus est, le haineux père de Valentine est en train de préparer le massacre de tous les huguenots. Raoul, caché chez Valentine, a tout entendu. Il se débat alors entre aller avertir ses camarades de religion ou déclarer enfin sa flamme à sa bienaimée. Il finit par partir. Elle le suit. Ils assistent au massacre de la Saint-Barthélemy et s’y font massacrer.
Tout tourne autour de la religion dans Les Huguenots — avec ce titre, il fallait s’en douter, n’est-ce pas ?
Pourtant, la différence de religion n’est pas un obstacle en principe, pour les amoureux, ce serait presque un atout — puisque le mariage entre Raoul et Valentine a été planifié par Marguerite de Valois, reine de Navarre justement pour tisser des liens entre catholiques et huguenots. L’obstacle viendra plutôt des soupçons infondés de Raoul à la fin du 2e acte. Mais le refus de Raoul provoquera le ressentiment du père de Valentine, le comte de Saint-Bris, contre tous les huguenots. Et de là à planifier le massacre de la Saint-Barthélemy, il n’y a qu’un pas, n’est-ce pas ? Ce qui ne manque pas d’avoir lieu dans une scène vibrante. Eh bien, juste après cette magnifique scène de conjuration, Meyerbeer produit quelque chose d’encore plus beau, un des plus merveilleux duos d’amour de l’histoire de l’opéra, décisif pour l’évolution mélodique du genre, avec sa phrase tout empreinte de languide sensualité, « Oui tu l’as dit, oui tu m’aimes ». La différence de religion n’est toujours pas l’obstacle pour les amoureux, mais plutôt le fait que Valentine ait été mariée entre temps au catholique Nevers.
Caroline Carvalho dans Les Huguenots, de Meyerbeer, lithographie de Théo,
Impremerie Bertauts, Paris
1870.
Certes la religion serait censée séparer les amoureux lors du massacre. Eh bien non, c’est là que Valentine décide de renoncer à une religion qui permet une telle barbarie et que les deux amoureux, accompagnés du garant religieux du protestantisme, le huguenot Marcel, trouveront la mort aux mains des féroces catholiques.
Frédéric Léolla
12 avril 2025
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