Jean-Luc Vannier, Monaco, 20 novembre 2025.
Faste et émotion honorent Joséphine Baker pour la Fête nationale monégasque
Rachel Valery (Josephine Baker). Photographie © OMC-Marco Borrelli.
Lorsque les invités d’une salle aussi vaste que celle du Grimaldi Forum gratifient un spectacle par une immense ovation debout, applaudissant et se trémoussant au rythme d’une musique palpitante, c’est aucun doute la preuve qu’il s’est passé quelque chose. Quel contraste avec l’entrée en scène, dans une atmosphère aussi hivernale que les températures du moment sur la Côte d’Azur, de Rachel Valery qui incarnait Joséphine Baker. C’est donc une réussite pleine et entière qui a salué, mercredi 19 novembre, ce « Bonsoir Monte-Carlo », une « Grande revue » spécialement conçue par l’opéra de Monte-Carlo pour le 50e anniversaire de la disparition de Joséphine Baker et ce, dans le cadre de la Fête nationale monégasque qu’honoraient de leur présence S.A.S. Le Prince souverain Albert II de Monaco, son épouse La Princesse Charlène et S.A.R. La Princesse de Hanovre, tous accompagnés d’autres membres de leur famille.
Bonsoir Monte-Carlo. Photographie © OMC-Marco Borrelli.
Outre la participation exceptionnelle de la soprano Pretty Yende qui a interprété deux des plus belles chansons du répertoire de J. Baker — « J’ai deux amours » et « Demain » —, cette production fastueuse, mise en scène sous la forme d’un Music-Hall parisien signée David Livermore, avait aussi fait appel aux décors — « Art déco » et « Années folles » — de Gio Forma, déjà responsable de ceux qui agrémentaient le récital de J. Kaufmann pour la Fête nationale de l’année passée ainsi qu’aux vidéos de D-Wok. Dans de somptueux costumes confectionnés par Gianluca Falaschi dont le raffinement avait déjà marqué la production d’Adriana Lecouvreur à Monte-Carlo en novembre 2017, une vingtaine de danseurs dans une chorégraphie élaborée par Erika Rombaldoni, se dépensaient sans compter sur les tempi saccadés de l’orchestre philharmonique de Monte-Carlo placé sous la direction électrisante d’Yvan Cassar.
Sur un livret subtilement équilibré entre récit, danse et chant par Nicolas Engel dont le scénario débute en 1974 au Sporting Club de Monaco avant d’effectuer de nombreux retours en arrière, Rachel Valery, armée de son redoutable talent de comédienne rôdé dès sa première aventure professionnelle avec Fame et Le Musical en 2008 avant de prendre part à des productions aussi célèbres que celles de Chicago, sait nous faire rire par ses réparties drolatiques face à son jeune admirateur Brice Lefort ou à son amant Grégory Benchenafi.
Pretty Yende. Photographie ©OMC-Marco Borrelli.
Mais elle parvient avec autant de conviction à nous arracher une larme lorsqu’elle nous retrace, entre deux chansons, les multiples défis qu’elle a dû, depuis sa tendre enfance — magnifique Margaux Froissart dans le rôle de Joséphine enfant —, relever toute sa vie comme femme de couleur dans le monde artistique américain ainsi que son émouvante découverte de Paris en 1925 — elle y anime son propre cabaret au 40 rue Fontaine en présence de J. Cocteau, de Robert Desnos ou de Colette — où elle se libère des carcans chorégraphiques, en interprétant notamment sa célèbre « danse des bananes » dans le plus simple appareil. Sans oublier son engagement dans les renseignements français pendant la Seconde Guerre mondiale et ce, sur fond du « Chant des partisans » qu’accompagnent les irréprochables chœurs de l’Opéra de Monte-Carlo (Stefano Visconti). Elle est encore plus bouleversante lorsqu’elle narre avec une rare sensibilité, les adoptions successives de ses douze enfants — sa « tribu arc-en-ciel » —, la ruine qui l’oblige à quitter son domaine des Milandes en Dordogne et son accueil en Principauté par la bienveillance altruiste de la Princesse Grace de Monaco — rôle campé par Sophie Payan — dont le portrait géant qui apparaît à ce moment précis provoque des applaudissements spontanés et particulièrement nourris du public.
Yvan Cassar (Direction). Photographie ©OMC-Marco Borrelli.
Malgré son entrée hautement symbolique au Panthéon français en 2021, Joséphine Baker repose toujours à Monaco. « Bonsoir Monte-Carlo » tout en rendant justice et hommage à cette statue féminine d’envergure, s’évertue, par surcroît, à nous faire partager un témoignage vivant, profondément empreint d’humanisme et d’espoir. Des messages qui réconfortent en ces temps lestés d’incertitudes et lourds de menaces.
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ISSN 2269-9910

Mardi 25 Novembre, 2025 1:40