La scène de Aschenputtel (ancienne production). Photographie © Barbara Braun.
Ils les redoutent et ils les aiment. Car il s'agit toujours d'une expérience émouvante, forte, ponctuée de réactions spontanées sinon perturbantes. De même que la psychanalyse avec des tout-petits remue nécessairement le thérapeute en formation, le jeune chanteur lyrique doit se confronter au public d'enfants : auditoire authentique, imprévisible, fulgurant. De jeunes Berlinois pouvaient ainsi découvrir, mardi 5 novembre dans la petite salle du Staatsoper de Berlin, « Aschenputtel », une Cendrillon d'Ermanno Wolf-Ferrari « pour les plus de 6 ans » dans une mise en scène « interactive », astucieusement élaborée par Eva-Maria Weiss.
Narine Yeghiyan (Cendrillon). Photographie © Stephanie Lehmann.
Lorsque les fées, telles de petites lucioles, arpentent les gradins parmi les visiteurs ou lorsque le Prince propose aux petites écolières avec l'aide son Grand Chambellan, d'essayer la « pantoufle de verre » : le concours vire à l'émeute ! De grands moment de l'enfance : devant la cruauté frénétique de la belle-mère, une petite fille verse quelques larmes et se réfugie auprès de son accompagnateur. Une autre, jouant les grandes dames, regarde la scène à quelques mètres avec des jumelles. Sans parler du premier baiser du Prince avec Cendrillon au bal : un « Ah » ému monte des tribunes !
Michael Smallwood (Le Prince). Photographie © James Kriegsman.
Avec une petite formation musicale sélectionnée de la Staatskapelle Berlin, le maestro David Robert Coleman fait des prodiges. Ce sont surtout les voix de tous ces jeunes artistes qui retiennent l'attention. De très belles voix féminines en devenir à l'image, dans le rôle titre, de la soprano arménienne Narine Yeghiyan, de la mezzo-soprano Carolin Löffler — l'affreuse belle-mère fut très applaudie par l'auditoire en culotte courte ce qui en dit long sur la psyché infantile — ou de Katrina Krumpane et de Lena Haselmann, respectivement Hartwige et Neidtrude.
La prestation aux riches accents wagnériens de l'australien Michael Smallwood (Le Prince) porte en germe celle d'un remarquable « heldentenor ». Dans le personnage du Grand Chambellan, la voix du jeune baryton Michael Rapke est tout aussi prometteuse même si celui qui incarnait l'un des députés des Flandres dans le récent « Don Carlo » du Deutsche Oper, devra probablement choisir entre le registre de baryton et celui de basse dont certaines des intonations graves annoncent l'émergence.
Michael Rapke (Le Grand-Chambellan). Photographie © Courtoisie.
Si les adultes encadrant les enfants leur ont parfois demandé un peu de silence, il fut superflu de solliciter leurs applaudissements : ils le firent à tout rompre avec leurs mains et en battant des pieds sur les estrades. Succès garanti.
Berlin, le 5 novembre 2013
Jean-Luc Vannier
musicologie.org
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Jeudi 1 Février, 2024