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Paris, Théâtre des Champs-Élysées, 22 mars 2024 — Frédéric Norac

Une Passion (bien) tempérée : la Saint Matthieu par Francesco Corti et le Freiburger Barockorchester

Avec le Printemps et l’approche de Pâques, voici venir le temps des Passions. Le TCE ouvrait le ban avec une Saint Matthieu réunissant les forces du Freiburger Barockorchester et de la Zürcher Sing-Akademie. Certes, tout est en place : l’excellent orchestre et les chœurs sont sagement séparés en deux groupes comme le préconise la partition, le chef dirige du clavecin et le positif, placé juste en face de lui, l’accompagne dans les récits, les instruments solistes assurent leurs « obligati » avec toute la virtuosité requise. Le chœur zurichois se montre d’une belle homogénéité dans les chorals, mais parait un peu léger dès qu’il est séparé en deux pour les chœurs. Le geste souple du chef ne force jamais sur les contrastes, mais cherche une atmosphère tempérée et nettement quiétiste. C’est un choix et il se défend, d’autant plus que l’orchestre y répond à merveille. Flûtes, hautbois, violon et violes de gambe sont tous remarquables, mais il faudra attendre la seconde partie pour que l’ensemble se réveille, sans doute grâce à l’animation qu’apportent les interventions des petits personnages et du caractère plus théâtral des épisodes évoqués. Ici les solistes apparaissent et disparaissent, à pas lents, au fil de leurs airs dans un esprit quelque peu rituel. Enfin la représentation émerge du récit et les dernières « scènes » prennent un véritable relief. La première partie nous avait laissé une impression mitigée. Où sont passés l’inspiration mystique, le drame, la grandeur ? La turba qui soulève l’ensemble à l’arrestation du Christ ne souffle pas plus fort qu’un ventilateur en position moyenne. Du côté des solistes, pas de reproche majeur. Maximilan Schmitt est un Évangéliste bien disant, le Christ de Yannick Debus domine le plateau de sa haute stature et de son baryton bien timbré, la soprano Kateryna Kasper, belle voix assez corsée, s’écoute un peu chanter et évoque plus la Maréchale de Strauss que l’âme du Chrétien pénitent. Avec sa voix blanche et quasi enfantine, Philippe Jaroussky parait un peu léger tout de même pour les parties d’alto où lui manque une certaine largeur dans le registre grave et le ténor Zachary Wilder un peu raide dans sa première intervention s’améliore pour les suivantes. Seul, Andreas Wolf avec son baryton-basse « stentorien » détonne quelque peu dans cet ensemble appliqué et donne la sensation de s’investir dans les aspects dramatiques de cette Passion. Le chœur final qui réunit la totalité de l’effectif donne une véritable sensation d’engagement et de communion qui a mis quelque temps à émerger et qui fait oublier quelques moments moins convaincants.

plume_07 Frédéric Norac
22 mars 2024
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