Conservatoire Jean-Baptiste Lully de Puteaux, Salle Gramont, 10 juin 2022 — Frédéric Norac
Conservatoire Jean-Baptiste Lully de Puteaux, Ein Deutches Requiem, Julien Van Mellaerts, Aèdes, Les Siècles. Photographie © D.R.
La version du Deutsches Requiem qu’interprètent l’Ensemble Aedes et l’orchestre Les Siècles a été réalisée par le musicologue Joachim Linckelmann, spécifiquement pour eux en 2010, à partir de la version pour deux pianos et de celle postérieure pour grand orchestre symphonique. On pourrait presque la qualifier de « version de chambre » bien que les deux phalanges se présentent dans un effectif assez respectable, trente-deux du côté des choristes et vingt-cinq pour les instrumentistes, dont un par pupitre pour les vents. Peut-être cette version gagnerait-elle à être donnée dans une acoustique plus généreuse, susceptible de valoriser de façon globale l’union des deux ensembles et de donner à l’œuvre de Brahms cette ampleur qui sans l’alourdir en renforcerait le caractère romantique. Telle quelle, la fusion n’est que partielle et il en résulte une vision plutôt analytique de la partition dont l’émotion n’émerge que de façon intermittente, plus nettement dans les interventions solistes que dans les passages purement chorals, bien que l’homogénéité du chœur soit absolument parfaite. L’orchestre sur instruments d’époque offre des sonorités plus affirmées et plus colorées que sur instruments modernes et c’est dans ce contraste que se situe sans doute toute l’originalité de la démarche.
Du côté des solistes, la voix cuivrée aux aigus un peu serrés d’Axelle Fayo n’a pas ce caractère céleste auquel nous ont habitué les grandes versions « classiques » de l’œuvre, mais elle apporte justement une humanité très convaincante à ses interventions, tout comme le baryton bien timbré de Julien Van Mellaerts dans son interrogation angoissée sur la vie humaine puis dans son annonce de la Résurrection.
Comme s’il prenait un peu à rebours l’histoire de la musique, Mathieu Romano choisit de commencer son programme par le très beau chœur à bouche fermée de Wolfgang Rihm, Mit geschlossenem Mund, pour huit voix a cappella de 1982, dont la modernité n’est pas sans évoquer les pièces chorales de Ligeti, et d’enchaîner sans solution de continuité avec une version orchestrée par Franck Krawczyk du fameux Lied de Mahler Ich bin der Welt abhanden gekommen dont la sérénité légèrement mélancolique est bien rendue par la soprano et les bois exemplaires des Siècles et qui, à son tour, semble préluder par sa tonalité au caractère plus sombre du premier mouvement du Requiem. En réponse aux applaudissements nourris qui saluent cette interprétation, Matthieu Romano offre en bis un Choral de Brahms d’autant plus émouvant qu’il est chanté par le chœur et les instrumentistes réunis en un groupe indifférencié.
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