Festival de Saint-Denis, Basilique, 25 juin 2021 —— Frédéric Norac.
Véronique Gens et les Surprises. Photographie © D. R.
Depuis ses débuts dans les années 1980, avec William Christie dans les chœurs des Arts Florissants puis en soliste comme second puis premier dessus, la carrière de Véronique Gens a parcouru bien du chemin, partant du Baroque pour arriver jusqu’au Romantisme (Berlioz, Gounod et même Wagner) et à Poulenc, en passant par Mozart et l’époque classique. Ce concert « Autour de Lully », où elle incarne les grandes héroïnes de la tragédie lyrique du xviie siècle français (Armide, Cybèle, Cérès, Médée), était donc comme un retour aux origines, mais cette fois au tout premier plan.
Ce répertoire qui exige une articulation impeccable, une expressivité de tous les instants basée sur le mot, lui reste profondément idiomatique et s’incarne parfaitement dans sa voix centrale, tout à la fois douce et pénétrante, et capable de s’enfler pour exprimer les fureurs de ces personnages féminins trahis ou méprisés, avides de vengeance et de drame.
Louis-Noel Bestion de Camboulas a conçu son programme comme une série de séquences autour d’un opéra où il associe à une grande scène (récitatif et air), essentiellement de Lully, mais également de quelques-uns de ses contemporains, Desmarets (Circé), Pascal Collasse (Achille et Polyxène) ou Charpentier (Médée), la musique instrumentale de leurs contemporains (Destouches, Rebel et Francoeur), sans solution de continuité. Évitant habilement ainsi la sensation de patchwork qui guette ce type de concert, il crée une totale symbiose entre tous ces musiciens comme avec ce magnifique chœur du Sommeil de La Diane de Fontainebleau de Desmarets s’enchaînant à l’air de la Nuit du Triomphe de l’Amour de Lully, et nous entraîne dans une sorte d’opéra imaginaire.
Le concert permet d’entendre des extraits d’opéras de Lully qui ne sont pas nécessairement parmi les plus connus, Persée, Proserpine, Le Ballet du Temple de la Paix, Le Ballet de la Naissance de Vénus, à côté de quelques-uns plus célèbres comme Armide et son célèbre récitatif, Atys, Amadis ou Alceste.
Le chœur des Surprises réduit à sept voix apporte ponctuellement son soutien à la soliste et, malgré son petit effectif, déploie une étoffe vocale richement colorée de même que l’ensemble instrumental, impeccable au plan rythmique comme dans les amples ritournelles, malgré une acoustique qui aplatit un peu les différents plans sonores.
En guise de bis, une passacaille s’imposait . Elle a de faux airs de celle d’Armide de Lully, mais c’est en fait celle d’Acis et Galatée. Pour offrir un supplément du brio de son ensemble, le chef se lance dans un « tambourin » plein d’entrain et de fougue de Rebel et Francoeur qui termine sur une note légère un concert qui vaut un triomphe à la soliste comme à l’ensemble.
Concert diffusé sur Culturebox à partir du 2 juillet et repris à l’Opéra de Massy le 6 juillet.
Un disque consacré à ce programme largement inédit devrait paraître fin août chez Alpha.
Frédéric Norac
25 juin 2021
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