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Théâtre des Champs-Élysées, 30 septembre 2021 —— Frédéric Norac.

Benjamin Bernheim aux Grandes Voix

Mathieu Pordoy et Benjamin Bernheim au festival de Salzburg, août 2021.

Avec ce récital entièrement consacré à la mélodie — une première pour lui à Paris — Benjamin Bernheim, nouveau prince des ténors lyriques français, ouvrait la saison des Grandes Voix 2021-2022.

À en juger par son programme, le chanteur semble avoir un faible pour le répertoire romantique tardif et le décline en trois langues, le français, l’allemand et l’anglais.

Dans la Poème de l’amour et la mer de Chausson, il joue à parts égales avec le piano inspiré de Mathieu Pordoy qui offre un cadre quasi pictural à ce monologue tour à tour exalté et tourmenté où Chausson magnifie les vers très fin de siècle de Maurice Bouchor mais s’il en restitue avec beaucoup de conviction les tonalités contrastées, c’est quasiment sur un mode fantomatique, l’orchestre et ses couleurs malgré la qualité du pianiste manquant quelque peu.

Ses trois mélodies de Duparc touchent à la perfection tant pour la clarté de l’articulation que pour le jeu sur les demies teintes avec un sommet dans « La Vie antérieure » dont il exprime avec beaucoup de profondeur la douloureuse mélancolie. Mais « L’invitation au voyage » et Phidylé sont également de véritables pièces d’orfèvrerie. Chez Brahms, outre un allemand parfaitement naturel, on apprécie une grande capacité à varier les ambiances qui prend toute sa dimension au fil de cinq Lieder dont le plus intense est sans doute « Immer leise wird mein Schlummer » opus 105 n2. Avec les deux mélodies d’inspiration populaire de Britten « The Salley Gardens » et « The last rose of summer », l’ambiance s’allège un peu vers une délicate nostalgie. « Love went a-riding » de Frank Bridge est enlevé avec toute la fougue et l’humour de son texte ambigu. Est-ce de la timidité ou un excès de sérieux ? Toujours très concentré, l’interprète ne communique guère. S’il affiche une forte complicité avec son accompagnateur hors pair, il ne s’ouvre vers le public qui pourtant lui fait fête, autrement que par quelques sourires de satisfaction. À l’issue d’un concert qui paraît un peu court, il se lance, en guise de bis dans « Un voyage à Paris » de Poulenc dont la fantaisie lui échappe un peu et qui, bien sûr, est un clin d’œil à son retour en France après une série de Contes d’Hoffmann à Hambourg. La soirée se conclut sur « Pourquoi me réveiller » du Werther de Massenet, d’une belle intensité, mais un rien démonstratif, annonçant sa prochaine prise de rôle à Bordeaux en janvier prochain.

plume 7 Frédéric Norac
30 septembre 2021


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