La Vie Parisienne, Théâtre du Petit Monde. Photographie © Philippe Branet.
Il faut toute l’énergie et la versatilité d’une troupe comme celle du Théâtre du Petit Monde pour s’attaquer à dix — chanteurs et comédiens — quatorze avec les musiciens, à une œuvre de la taille de la Vie parisienne qui ne compte pas moins d’une vingtaine de rôles, des chœurs, des ensembles chorégraphiés et s’en sortir indemnes, à quelques décalages près dans les ensembles menés tambour battant, et sans chef, du moins en apparence.
En deux heures, montre en main, la messe est dite. Pourtant, dans son adaptation, le metteur en scène Nicolas Rigas n’a sacrifié aucun numéro de la partition, il les a simplement réduits, ce qui sur des airs pour la plupart à couplets ne crée pas trop de frustration. Mais il en a tout de même conservé quelques-uns presque en entier, dont le délicieux duo « 0 beau nuage qui voyage » de la version de 1873 et, s’il a un peu arrangé le dénouement, c’est pour y introduire, en plus de l’allusion due à Offenbach lui-même au trio des masques de Don Giovanni, une citation du Commandeur et le pardon de la Comtesse à la fin des Noces, remarquablement en situation.
La Vie Parisienne, Théâtre du Petit Monde. Photographie © Philippe Branet.
Le Baron et la baronne de Gondremarck sont devenus un prince saoudien et son épouse en goguette dans un Paris que les très jolis costumes de Nicolas Aubagnac auraient tendance à situer quelque part dans les années folles. Les allusions à l’actualité restent discrètes et à peine pourra-t-on trouver, ça et là, quelque grivoiserie un rien appuyée, mais c’est aussi l’esprit boulevardier et populaire qui, à n’en pas douter, devait régner sur autre mode déjà au temps d’Offenbach. Sur le plateau, tout le monde se démène sans compter et rien que les changements de costume tiennent de la performance. De cette équipe inépuisable, on retiendra le maître d’œuvre de cette aventure, le baryton Nicolas Rigas en Raoul de Gardefeu, une des meilleures voix lyriques du plateau, et son complice, le Bobinet de Martin Loizillon, excellent comédien et chanteur respectable. Olivier Hernandez paraît plus convaincant en bottier alsacien qu‘en Brésilien cousu d‘or pour lequel il lui manque un rien de brillant. La personnalité généreuse de Philippe Ermelier convient idéalement à son prince oriental farfelu et tout en rondeurs. Du côté féminin, Amélie Tatti mène la danse avec son soprano léger un rien pointu en gantière, puis en veuve du colonel, et enfin en maîtresse du brésilien, très sexy en maillot doré façon Alcazar. Beau mezzo de la Metella de Florence Alayrac et agréable Baronne d’Antonine Bacquet. Citons encore la désopilante douairière de Quimper-Kermadec de Salvatore Ingoglia, les cascades de l’Alfonse de Romain Cannone et le séduisant Urbain de Nicolas Aubagnac et tirons notre chapeau à cette entreprise rondement menée qui célèbre un double centenaire, celui au jour près de la naissance d’Offenbach et la création par Roland Pilain en 1919 du Théâtre du Petit Monde dont ce spectacle réjouissant témoigne de l’incroyable vitalité.
Prochaines représentations au Château de Versailles les 28, 29 et 30 juin et à Avignon (Théâtre Notre Dame) du 5 au 28 juillet.
Frédéric Norac
20 juin 2019
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Mercredi 9 Décembre, 2020