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Paris, Grand Salon des Invalides, 16 décembre 2019 —— Frédéric Norac.

Programme de secours pour ensemble désarmé : héroïnes au bras armé

Le Consort, Grand Salon des Invalides. Le Consort, Grand Salon des Invalides.

Les concerts à thème ont souvent du mal à trouver leur cohérence. À plus forte raison lorsqu’un musicien sur quatre déclare subitement forfait. Ceux de l’ensemble Le Consort ont dû recomposer leur programme en dernière minute suite a la défection de leur premier violon, Théotime Langlois de Swarte, malade. Exit donc les sonates en trio de Dandrieu qui devaient en composer l’essentiel de la partie instrumentale et lui donner une unité. Elles sont remplacées par une sonate en trois mouvements de Francoeur — ouverture rondeau et presto — et par un bizarre pot-pourri qui voit se succéder l’adagio d’une sonate de Haendel pour hautbois, jouée à la viole de gambe, un mouvement d'un sonate Marcello transcrit par Bach pour le clavecin et une sonate de Scarlatti. Avouons que le compte n’y est pas tout à fait et que la substitution vous a un petit air de remplissage, d’autant plus que tout cela n’a guère eu le temps d’être travaillé et que malgré le talent et la finesse du toucher du claveciniste Justin Taylor, quelques traits paraissent un peu savonnés dans Scarlatti. Fort heureusement le programme vocal tient largement ses promesses, n’était la disparition de l’air de la Judith Triumphans de Vivaldi que compensent largement deux généreux bis, tous deux sur le versant tendre dont un Vivaldi non identifié (pourquoi les interprètes n'annoncent-ils jamais clairement leurs bis ?) et le célèbre « Ombra mai fu » de Serse de Händel, assez loin donc de ces « Héroïnes au bras armé » qui font le thème du concert.

Elles seront trois au final, quelquefois contre armées contre elles-mêmes comme la Lucrèce de Händel, et vous ont un petit air « Me too » (violée, outragée, trompée). On retiendra particulièrement les deux Médée, celle de Charpentier dont Eva Zaicik nous offre la longue plainte « Quel prix de mon amour », et celle, moins connue, de Clérambault dont elle déchaîne les fureurs avec beaucoup de conviction et dans un français restitué, très finement travaillé, qui n’handicape jamais la compréhension du texte. La belle voix longue et richement timbrée de la mezzo, se montre expressive aussi bien dans les tourments de la Lucrezia qui ouvre son programme que dans les fureurs jalouses de Junon de Semele de nouveau de Händel qui le conclut. À défaut de cohérence, elle apporte au concert le rayonnement de sa personnalité, un engagement et une virtuosité qui savent s’adapter au baroque français et italien et l’ensemble bien que réduit la soutient avec une évidente complicité, réussissant à sauver le concert par son engagement et sa conviction, avec une mention toute spéciale pour Sophie de Bardonnèche qui assume les parties de premier violon au pied levé avec brillant et assurance.

Frédéric Norac
16 décembre 2019
© musicologie.org


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