En son temps — et cela reste vrai aujourd'hui — Giovanni Battista fut beaucoup plus connu que son frère aîné Giuseppe (le Sammartini de Londres). Il passa toute sa vie à Milan, où il dirigea la musique de nombreuses églises, et, outre quelques ouvrages de scène, il composa beaucoup de musique religieuse. Mais « l'essentiel de sa production relève du domaine instrumental. Il apparaît comme l'un des symphonistes les plus inventifs de la période préclassique et fait en quelque sorte le lien entre Vivaldi et le jeune Haydn. »1
Sa réputation de compositeur fut grande dans toute l'Europe, à Vienne, à Paris et à Londres, et son aura de pédagogue le fut tout autant. De 1737 à 1741, il fut le maître de Gluck, et, par la suite, d'autres futurs grands, comme Jean-Chrétien Bach, Boccherini et le jeune Mozart, passèrent par son fief milanais pour bénéficier de ses conseils.
Environ deux cents sonates en trio, une vingtaine de sonates pour violon (ou flûte) et basse continue et au moins autant de duos pour flûtes, plus vingt-et-un quatuors à cordes (ou pour flûte et cordes) et six quintettes pour trois violons, alto et violoncelle. Dans cette abondante production, on reconnaît une réelle importance — au moins historique — aux sonates en trio qui introduisent ou développent de nouveaux principes de construction musicale, en particulier la division du mouvement de sonate en sections contrastées, annonçant le style classique à venir.
C'est cependant surtout vers les Quartetti (ou Notturni) et autres Quintetti que se porte aujourd'hui l'itérêt des interprètes. Des œuvres qui, pour une bonne part, relèvent du dernier tiers de la carrière du musicien et où la solidité de l'écriture se double d'un « modernisme » captivant. « L'impression est la même qu'à l'écoute du meilleur Boccherini. Mais si les deux compositeurs se rencontrent parfois (exubérance, côtés dansants, parfums populaires, profonds mouvements lents), la différence de générations se perçoit toujours, Sammartini apparaissant en général plus savant. »2 Savant, notre musicien l'est assurément, mais il se montre souvent aussi subtil qu'inspiré, deux des plus beaux exemples étant sans doute ses Quintetti no 3 en sol majeur, et no 5 en mi majeur.
Giovanni Battista Sammartini, Quintette no 5 en mi majeur par l'Accademia d'Arcadia.Peut-être à tort, on fait peu de cas de l'œuvre concertante de Sammartini qui pourtant, à côté de quelques concertini, compte divers concertos, dont six pour violon, deux pour flûte, un pour quatre violons et un autre pour deux violons et deux hautbois, ces deux derniers annonçant le genre de la symphonie concertante.
Giovanni Battista Sammartini, Concerto en mi♭majeur (J-C 73) pour 2 violons, 2 hautbois, 2 cors, 2 trompettes, cordes et basse continue, La Serenissima (Adrian Chandler, dir.)En fait, le nom du musicien reste avant tout associé à ses symphonies, un domaine dans lequel il joua en Italie un rôle de pionnier. On en a conservé soixante-huit, qui se répartissent en trois périodes créatrices allant des années 1720 aux années 1760. Les plus anciennes, écrites pour cordes seules et d'esprit baroque, rappellent parfois Vivaldi. Par la suite, alors que l'orchestre s'enrichit de cors, de trompettes et/ou de hautbois, les traits baroques s'estompent peu à peu et la « forme sonate » tend à s'affirmer de plus en plus. « Dans les ultimes symphonies, l'élément mélodique prend une importance accrue. Le style nerveux et incisif de Sammartini, et ses libertés dans le traitement de la forme, le rapprochent souvent du jeune Haydn, bien que ce dernier, à la fin de sa vie, ait nié avoir été influencé par le musicien milanais. »3 Au total, on a là, des symphonies de jeunesse aux toutes dernières, beaucoup d'œuvres intéressantes, parfois même surprenantes, qui témoignent d'une personnalité réellement originale.
Giovanni Battista Sammartini, Symphonie en ré majeur (J-C 22), par l'Accademia d'Arcadia (Alessandra Rossi Lürig, dir.)1. Vignal Marc, dans « Le Monde de la musique » (276), mai 2003.
2. Ibidem, (212), juillet-août 1997.
3. Vignal Marc, dans dans François-René Tranchefort (direction), « Guide de la Musique symphonique », Fayard, Paris 2002, p. 675.
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Vendredi 12 Juillet, 2024