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Salle Gaveau, 14 janvier 2015, par Frédéric Norac ——

Un ensemble est né : Le Concert de la Loge Olympique

Le Concert de la Loge OlympiqueLe Concert de la Loge Olympique. Photographie © Yannick Coupannec.

On connait Julien Chauvin, sa fine silhouette et son catogan, sa curieuse façon très physique et très engagée de jouer, tantôt perché sur la pointe des pieds, tantôt en pliant exagérément les genoux, et bien sûr la superbe sonorité qu'il fait valoir comme premier violon du Cercle de l'Harmonie qu'il lui arrive aussi parfois de diriger. Après dix ans de bons et loyaux services auprès de Jérémie Rhorer, le musicien a décidé de voler de ses propres ailes et de rassembler autour de lui un ensemble à sa mesure. Baptisé « le Concert de La Loge Olympique », en référence un orchestre créé par le Chevalier de Saint-Georges et deux nobles mécènes en 1785, et commanditaire notamment des Symphonies parisiennes de Haydn, cet ensemble se propose de faire revivre le répertoire français des années prérévolutionnaires et les œuvres de compositeurs de cette période, tombés dans l'oubli, comme Cambini, Reicha, Duport ou Kreutzer.

Dès lors il peut sembler curieux de le voir inaugurer sa saison avec un programme entièrement consacré à Haendel, compositeur relevant essentiellement de l'esthétique baroque et actif dans les années 1710-1735. Au-delà du paradoxe, il faut reconnaître que La loge olympique, hors toute considération de choix de répertoire, convainc pleinement. Limité, pour ce concert, à 29 instrumentistes, 14 cordes, 4 bois auxquels s'ajoutent théorbe et alternativement clavecin et orgue joués par le même musicien, il offre un son d'une extraordinaire plénitude, d'une totale homogénéité et des pupitres solistes remarquablement colorés. Ils ont largement l'occasion de se distinguer dans ce programme dont les parties instrumentales sont conçues dans une absolue continuité avec le programme vocal de Karina Gauvin qui en est la soliste et la vedette et qui, n'étaient les applaudissements pour la chanteuse, ne sera jamais vraiment interrompu.

Julien Chauvin Julien Chauvin. Photographie © A. Laveau.

On passe ainsi sans solution de continuité de l'ouverture de Giulio Cesare à un air de cet opéra, d'une suite de Water Music à un air de Rodelinda ou à deux airs de Rinaldo dans la deuxième partie, d'un concerto pour orgue (opus no 2) où quelques notes parasites ne réussissent pas à gâter la performance du positif, à un air de Salomon où le hautbois s'associe au basson ou d'un concerto grosso (opus 6 no 1) à un air d'Alcina, exactement dans l'esprit de l'Académie ou du concert à bénéfices  qui était celui de beaucoup de concerts au XVIIIe siècle. Tout ce beau monde joue debout à l'exception des violoncelles et du théorbe.

 Karina Gauvin, que nous avons appréciée récemment dans la Clémence de Titus, se situe  parmi les grandes interprètes haendéliennes du moment, tant pour la maîtrise technique que pour l'engagement, mais la voix manque un peu d'ampleur et le timbre de personnalité. On pense à Arleen Auger, parfois, en moins éthéré, voire, dans Alcina, à Renée Fleming mais sans cette sensualité exacerbée que pouvait y faire valoir l'Américaine. La chanteuse du reste met un peu de temps  à s'échauffer et ne révèle toute l'étendue de son potentiel que dans « Ah mio cor ». Mais partout ailleurs elle est irréprochable, et même excitante dans les airs virtuoses comme l'air de tempête de Lotario « Scherza in mar" » la seule rareté d'un programme sans grande surprise. En second bis, la soprano donne le célèbre « Lascia ch'io pianga », dédié par elle-même à la France traumatisée par les récents attentats. Les paroles paraissent en effet de circonstances « Laisse moi pleurer mon sort amer et soupirer ma liberté ». Jolie conclusion d'un concert de qualité certes mais au relief limité, faute d'un peu plus d'originalité dans le répertoire.

plume Frédéric Norac
14 janvier 2015
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