Bach nous a également laissé trois concertos pour deux clavecins (BWV 1060 à 1062), deux pour trois clavecins (BWV 1063 et 1064), et un pour quatre clavecins (BWV 1065) , tous conçus (« fabriqués »…) à la même époque que les concertos pour un seul clavecin, dans les mêmes conditions et pour les mêmes besoins des concerts du Collegium Musicum. À ceci près qu'au jeu des transcriptions / adaptations, le musicien ne s'est pas contenté ici de puiser dans ses propres compositions : le célèbre concerto pour quatre clavecins en la mineur BWV 1065 est un arrangement du concerto pour quatre violons opus 3 no 10 de Vivaldi, et on soupçonne que les deux concertos pour trois clavecins — le BWV 1063 en re mineur et surtout le BWV 1064 en ut majeur — pourraient aussi avoir leur source dans des œuvres d'un autre compositeur.
Dans cette série de six œuvres, il faut à coup sûr placer très haut les trois doubles concertos : le BWV 1062 en ut mineur, transcription du magnifique concerto pour deux violons BWV 1043, se distingue par son extraordinaire richesse polyphonique ; le BWV 1060, lui aussi en ut mineur, probablement issu d'un concerto pour violon et hautbois, et d'ailleurs très souvent joué dans une reconstitution pour ce couple d'instruments, constitue un autre sommet dans l'œuvre concertante pour clavier de Bach ; quant au BWV 1061 en ut majeur, qui semble avoir pour origine une œuvre pour claviers sans accompagnement d'orchestre, il compte également parmi les joyaux de cette production, avec une particularité notable : la partie d'orchestre y étant assez secondaire, l'œuvre est souvent jouée à deux claviers seulement, sans réelle perte de substance.
Le superbe quadruple concerto BWV 1065 n'est pas loin de se situer sur les mêmes hauteurs, et sidère l'auditeur attentif par l'habileté avec laquelle le musicien distribue les rôles entre les quatre claviers pour éviter à l'œuvre toute surcharge pondérale. On sera peut-être plus tiède à l'égard des deux triples concertos, sans aller — loin s'en faut — jusqu'à donner quitus à un éminent critique dénommé Hector Berlioz qui, en son temps, après avoir entendu jouer un mouvement du BWV 1063 en re mineur avec, aux claviers, Chopin, Liszt et Hiller, écrivit sans vergogne : « C'était navrant […] de voir trois talents admirables […] réunis en faisceau pour reproduire cette sotte et ridicule psalmodie. »
Concerto en ut mineur BWV 1062 (III. Allegro assai), Trevor Pinnock et Kenneth Gilbert, The English Concert.
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Samedi 27 Janvier, 2024
