Nikita Boriso-Glebsky. Photographie © Jean-Marc Warszawski.
Certes, il fallait s'armer de patience pour accéder puis se garer, samedi 2 août, à la Chapelle Notre-Dame-de-vie de Mougins qui abritait la première des « Nuits musicales » sur les hauteurs de Cannes. Auxiliaires de la police municipale sympathiques mais dépassés par les problèmes de circulation tandis que leur chef « textoïsait » benoîtement sur son Smartphone ! Rappel d'un précepte chrétien rendant impératif le passage par la souffrance avant d'accéder au bonheur ? Celui-ci se trouvait justement « au bout du chemin » bordé de cyprès : dans la pénombre surgissait, glorieuse de mille feux, la chapelle romane du xvie siècle, « restaurée en 2013 » expliquait en introduction l'Adjoint au maire chargé de la culture et du patrimoine. Tout en rendant un hommage appuyé au directeur artistique du Festival, Gabriel Tacchino, « aux côtés duquel », avouait-il, « il a beaucoup appris ».Au programme de ce concert de musique de chambre — exigez une place dans les dix premiers rangs car l'acoustique au-delà se révèle défaillante — figuraient la sonate pour violon et piano no 1 en sol majeur et le scherzo pour violon et piano en do mineur de Johannes Brahms, puis, en deuxième partie, des arrangements pour piano et violon des quatre préludes opus 34 signés Dmitri Chostakovitch et la sonate pour violon et piano no 1 en fa mineur de Sergueï Prokofiev. Avec deux solistes de talent : le pianiste croate Lovro Pogorelich et le violoniste russe Nikita Boriso-Glebsky.
La partie brahmsienne fut un enchantement : dans les trois mouvements — Vivace ma non troppo, Adagio, Allegro molto moderato — de la sonate no 1 en sol majeur, Nikita Boriso-Glebsky, vainqueur incontestable en 2013 des « Monte-Carlo Violin Masters », joue un violon vénitien Domenico Montagnana de 1723. Il multiplie avec aisance des aigus d'une incroyable douceur, des sons d'une pureté cristalline, comme filtrés, expurgés de toute ingérence ou difficulté technique. Malgré sa suggestion plus ludique, le scherzo en do mineur, permet encore au soliste russe, lauréat des deux prestigieux concours internationaux de violon Jean Sibelius et Fritz Kreisler, de s'amuser — et de nous ravir — avec ses impressionnants coups d'archet dont la puissance n'altère en rien la légèreté des notes.
Lovro Pogorelich. Photographie © Tomislav Čuveljak.
Changement de registre et d'ambiance pour la seconde partie dédiée, sur des arrangements de Dmitri Tsyganov, à des compositeurs russes lesquels nous font entendre des mélodies plus enténébrées, plus angoissantes : les gaillardes stridulations d'un grillon amoureux, peut-être stimulé par les ricochets et autres saltati égrenés sur son instrument par le soliste moscovite avec une déconcertante fluidité, n'ont pas empêché Lovro Pogorelich et Nikita Boriso-Glebsky de nous livrer une interprétation intense et virtuose des quatre préludes de Chostakovitch et de la sonate no 1 de Prokofiev. Et d'accorder généreusement deux « bis » au public qui les acclamait : des extraits d'une pièce de Brahms et du « Salut d'amour », opus 12 (1888), du compositeur britannique Edward Elgar. À l'issue de la performance, Nikita Boriso-Glebsky nous précisait qu'il demeurerait en France tout le mois d'août pour se produire, du 11 au 17, au Festival bourguignon de Buxy « Musicales en Côte Chalonnaise » puis, du 21 au 30, à la onzième Edition de « Musique de chambre à Giverny ». Et de conclure à propos de la concurrence déloyale du grillon au cours de sa prestation : « tout ce qui n'est pas artificiel n'est pas gênant ».
Nice, le 3 août 2014
Jean-Luc Vannier
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