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30 juin 2014, par Jean-Luc Vannier ——

La fanfare du 27e bataillon des chasseurs alpins commémore la Grande Guerre à Villefranche-sur-Mer

Fanfare 237e rcaFanfare du 27e BCA à Villefranche-sur-Mer. Photographie © 27e BCA.

Sur la scène du Théâtre de verdure, ils font leur entrée avec une « Marche des soldats » de Robert Bruce, mélodie lente aux origines écossaises du 14e siècle — la célèbre bataille de Bannockburn de 1314 — qui s'inspirait d'un hymne national Scots wha hae avant d'accompagner, à l'époque moderne, un cérémonial militaire. Ainsi débutait, dimanche 29 juin à Villefranche sur mer, l'impressionnante parade réalisée par la Fanfare du 27e bataillon des chasseurs alpins. Une semaine de prestations orchestrales et chorales dans les Alpes-Maritimes afin de commémorer le centenaire de la Grande Guerre. Emmenés par l'adjudant-chef et directeur Éric Moron, une vingtaine d'instrumentistes aux provenances diverses mais tous passionnés de musique, ont ainsi déroulé un programme hétéroclite : Highland Cathedral, air populaire destiné à la grande cornemuse et composé par Ulrich Röver et Michael Korb pour des jeux écossais tenus en Allemagne. Puis, une version chantée de la « Protestation » des années 1880 lorsque l'état-major tenta d'imposer aux chasseurs alpins une tenue identique à celle de l'infanterie. Les « Diables » qui resteront de bleu vêtus, enchaînent avec Honneur au 27e BCA écrit par le caporal et percussionniste Emmanuel Poux pour les traditionnels cors de chasse, l'attribut symbolique figurant sur leur uniforme, puis « 76 trombones » aux forts accents américains issus de la pièce de Meredith Wilson The music man(1957).

fanfare 2e bcaLe baryton Mauritz Grünewald. Photographie © 27e BCA.

Changeant de registre, la phalange militaire fait ensuite incursion dans le disco des années 80 ajoutant aux tubes de Claude François décidément indémodables, une chorégraphie rythmée permettant à ces jeunes recrues de se lâcher sans que leur sage dandinement n'égale toutefois le déhanchement érotisé des anciennes Claudettes. Nettement plus à l'aise dans une démonstration de hakka, les gaillards réitèrent devant l'assistance villefranchoise, leur audace du stade de Gerland à Lyon en avril 2011 devant 40 000 spectateurs afin d'illustrer leur partenariat avec l'équipe lyonnaise de rugby « Le Lou », accédant au top 14. Après une Marching European, composition plus syncopée qui se clôt par un impressionnant tutti, un New York, New York moins « jazzy » qu'un I'm just a gigolo nettement plus « swingué », une Étoile des neiges version rock témoignant de leur Palme d'or au festival « Tattoo » des musiques militaires à Québec en 2013 et une Lady Gaga un peu trop aseptisée, la fanfare du 27e bataillon des chasseurs alpins propose pour terminer une partie lyrique interprétée par le baryton Mauritz Grünewald :  un Con te partiro, « Le Téméraire », la chanson fétiche de tous les Chasseurs lors de leur participation au défilé du 14 juillet 2012 sur les Champs-Élysées et rappelant les marches italiennes par le cadencement rapide de leurs pas : 135 à la minute contre celui plus lent, 88, des légionnaires. Enfin, le chant des Glières, celui très émouvant des « Partisans », celui des « Allobroges », le chant « national » de la Savoie annoncent une Marseillaise qui fait lever l'assistance d'un seul homme.

27e bcaFanfare du 27e BCA à Villefranche-sur-Mer. Photographie © 27e BCA.

Cette présentation d'une bonne heure ne constitue qu'une partie d'un spectacle techniquement plus étoffé et destiné à une tournée de la fanfare en France et en Europe, peut-être même au Canada. Malgré leur statut militaire et une formation opérationnelle qui fait écho à celle des carabiniers du Prince de Monaco, ces instrumentistes consacrent néanmoins l'essentiel de leur temps aux répétitions leur permettant d'accéder à un indiscutable professionnalisme : précision dans les attaques ou les arrêts, ni « roulement » ni « canard », phénomène tant redouté chez les Cuivres, direction large laissant de l'aveu même des exécutants « une souplesse d'interprétation ». Nous regretterons toutefois les liaisons accentuées dans les airs d'outre-Atlantique qui réclamaient davantage d'impulsivité et de spontanéité. Nous retrouvons un décalage identique lorsque nous comparons les exécutions des orchestres militaires français avec, par exemple, les formations orchestrales américanisées de l'Otan.

27e bcaL'adjudant-chef Éric Moron. Photographie © 27e BCA.

Des instrumentistes qui viennent souvent du monde civil de la musique. Ainsi Frédéric, professeur de trompette dans une école du Jura a décidé de rejoindre, il y a plus de six ans, la phalange d'Annecy pour des raisons financières : « Le côté militaire ne gêne en rien la pratique de la musique » confie-t-il. Le tubiste Stéphane, originaire quant à lui de Seine-et-Marne, a choisi le « recrutement par Interne » : « j'aime bien le côté show » et la « variété des morceaux ». Eric, flûte piccolo, ancien professeur de musique lui aussi « adore la montagne », « passion conciliée avec celle de la musique » dans une optique de « stabilisation professionnelle » : « le rapport entre la musique et l'armée invite à une rigueur dans le travail afin d'être plus performant » explique cet originaire de Fitz-James dans l'Oise.  Mentonnais, Franc, réserviste et spécialiste de la trompette d'harmonie, du cor de chasse et du clairon, avait pour sa part, son grand-père dans les chasseurs alpins. Le baryton originaire d'Alsace, Mauritz Grünewald, ancien diplômé des Techniques de Musique et de Danse (TMD) et membre d'une chorale, a entendu parler de la BCA par sa grand-mère : un passage par l'armée vaut, selon lui, « un plus dans le curriculum vitae qui montre qu'on est prêt à travailler et qu'on peut compter sur nous ».

27e bcaFanfare du 27e BCA à Villefranche-sur-Mer. Photographie © 27e BCA.

Nice, le 30 juin 2014
Jean-Luc Vannier
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