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Hommage à Saint-George, au Sénégal

Le Festival mondial des arts nègres vient d'honorer, à Dakar, un métis au destin d'exception: le chevalier de Saint-George, né au 18e siècle en Guadeloupe du mariage d'une esclave sénégalaise et d'un noble français, qui devint un prodigieux violoniste.

« O, beau métis, prends mon amour », a chanté mardi soir la soprano Martiniquaise Odile Rhino, sur la scène du théâtre national à Dakar, accompagnée par une vingtaine d'instrumentistes.

Cet air est un extrait de l'opéra « Le Nègre des lumières », créé il y a cinq ans à partir de la musique composée par le chevalier de Saint-George et sur un texte du journaliste français Alain Guédé, devenu, en quelque sorte, le « biographe de Saint-George » dont il s'emploie à promouvoir l'œuvre longtemps occultée.

La venue d'un orchestre classique français à Dakar pouvait paraître incongrue, en pleine célébration des arts nègres et de « la renaissance africaine ».

« Je trouve magique, au contraire, que le Sénégal se soit approprié Saint-George et sa musique assez européenne », a commenté Odile Rhino, alors que le programme du Festival présentait le compositeur comme « sénégalais ».

Car Saint-George fut d'abord le fruit d'une union particulière, il y a près de trois siècles: le mariage d'une esclave sénégalaise et d'un esclavagiste français.

Sa mère avait « été raflée en 1729 » et embarquée de force à Gorée (île située en face de Dakar) sur un navire de négriers français, pour gagner les Antilles, a relaté avec passion Alain Guédé, devant le public dakarois.

Quant à son père, il était issu d'une famille de la noblesse française ruinée. Venu en Guadeloupe pour exploiter une plantations de canne à sucre, il y rencontra la jeune esclave et l'épousa. Puis, de retour en France, le comte « décida d'accorder à son fils métis l'éducation traditionnellement réservée aux enfants de la haute aristocratie », a rapporté le biographe.

Violoniste prodigieux, le « mulâtre devint même le musicien favori de la reine Marie-Antoinette ». Enthousiaste, elle voulut le nommer directeur de l'Académie royale de musique mais dut y renoncer, quand « de nombreuses personnalités rejetèrent l'idée qu'un homme à la peau noire puisse diriger le plus prestigieux opéra » de l'époque, a expliqué M. Guédé.

Saint-George connut cependant la gloire de son vivant et devint même « un héros » lorsqu'il s'engagea dans la Garde nationale, après la Révolution française de 1789, créant un régiment de Noirs et Métis afin de « défendre cette République qui avait aboli l'esclavage ».

Pour faire découvrir sa musique au Sénégal, c'est l'orchestre Paris-Classik, dirigé par le violoniste français Bertrand Cervera, qui avait été invité par le Festival des arts nègres et acheminé par un vol spécial.

Mais son rendez-vous avec le public dakarois a été un peu compromis, mardi soir, quand le concert gratuit a été retardé de plus de deux heures, en attendant le président Wade et quatre autres chefs d'Etat africains invités, dont le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi. « Les chefs d'Etat ont souhaité que le concert soit raccourci de moitié, à 45 minutes », a alors dû annoncer M. Guédé au public.

Mercredi après-midi, la vingtaine de musiciens s'est rendue à Gorée, l'île d'où serait partie la mère de Saint-George il y a plus de deux siècles. Et c'est symboliquement à la « maison des esclaves » que l'orchestre a joué une « marche funèbre ».

Biographie de Joseph Boulogne, chevalier de Saint-Georges.

© musicologie.org


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Mercredi 11 Septembre, 2024 18:08