musicologie

4 décembre 2010 ——

Le maqâm irakien, un art séculaire, savant et populaire à la fois

Forme musicale à la technique complexe, le maqâm irakien, dont l'origine remonte probablement aux Abbassides, était encore dans la première moitié du XXe siècle un des piliers culturels de l'Irak car il était apprécié de toutes ses communautés et ses classes sociales.

Cette musique, dont des variantes existent dans de nombreux pays du Moyen-Orient, se pratique en Irak sur des instruments apparus il y a plusieurs millénaires.

Beaucoup d'artistes irakiens font remonter son origine aux Abbassides (VIIIe-XIIIe), mais si tel est le cas, il faut la situer vers la fin de cette glorieuse dynastie renversée par les hordes mongoles en 1258, estime Mouaffaq al-Beyati, directeur de la Maison du maqam à Bagdad.

« On trouve dans les textes du maqâm du vocabulaire qui n'avait pas cours sous les Abbassides », explique ce passionné, auteur de deux ouvrages, non traduits, sur cet art.

Pour l'ethnomusicologue irakienne Scheherazade Hassan, cette forme musicale s'est surtout construite au fil des siècles, enrichie des influences des trois grandes civilisations -arabe, perse et turque- au milieu desquelles Bagdad a bâti son identité.

« Au XXe siècle, le maqâm était un des piliers culturels structurant la vie de la cité », note-t-elle. S'il était pratiqué par des érudits, du fait de la complexité de son apprentissage, il avait également une dimension très populaire.

La « communauté du maqam », comme elle l'appelle, rassemblait les artistes qui se rencontraient au café, des mécènes qui organisaient des récitals, et tout un public d'amateurs plus ou moins connaisseurs.

Son répertoire compte une cinquantaine de « maqâmats » plus ou moins canoniques aux textes éminemment poétiques, qu'interprête un chanteur -respectueusement appelé « Qare » (lecteur)-, expert des techniques d'ornementation.

« Auparavant, le maqâm accompagnait toutes les célébrations de la vie, de la naissance à la mort », se souvient avec nostalgie le musicien Taha Gharib. « Car cette musique, profane et religieuse à la fois, parle de l'existence. »

Aujourd'hui encore, le maqâm n'appartient à personne, mais à l'ensemble des communautés qui se trouvent sur le territoire irakien. Creuset de multiples influences, il est apprécié de tous, qu'ils soient Arabes, Kurdes ou turcomans.

« D'un point de vue historique, le maqâm a poursuivi un idéal culturel qui était de favoriser le respect de la diversité ethnique et sociale », explique Mme Hassan. « Car le maqâm est un mélange, l'expression d'une identité collective. »

Son déclin dans la seconde moitié du XXe siècle peut s'expliquer en partie par les changements sociaux en Irak, avance-t-elle, en citant notamment « l'émergence d'une classe moyenne qui allait dans des salles de concert où ont commencé à se jouer des choses plus accessibles ».

© musicologie.org


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bouquetin

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