musicologie

3 décembre 2010 ——

La mise en vente du théâtre le plus ancien d'Argentine provoque une polémique

La mise en vente du théâtre Solari, le plus ancien d'Argentine, déclaré monument historique national mais resté dans des mains privées à Goya, une ville du nord-est, suscite émotion et polémique.

On en débat à la radio, à la télévision et dans chaque maison. C'est un débat au goût amer : Goya, appelée autrefois la « Petite Paris » pour ses nombreux palais du XIXème construits à l'apogée de son port et du tabac noir, vient de voir plusieurs de ses bâtiments emblématiques être démolis ou défigurés.

C'est en premier lieu ce théâtre, inauguré en 1877, connu pour ses fêtes et ses représentations fastueuses, qui a valu à cette ville de 80.000 habitants d'être comparée à la ville lumière. Le célèbre Théâtre Colon de Buenos Aires, récemment restauré, date, lui, de 1908.

Personne ne comprend qu'un tel bijou de 600 sièges, sorte de Petit Colon bâti dans cette région couverte de palmiers, frontalière du Brésil et du Paraguay, puisse être liquidé, vendu au plus offrant.

Goya est entretemps devenue la ville de plus de 50.000 habitants la plus pauvre du pays. La facade du théâtre, appelé également « Elsa » par un de ses anciens propriétaires en hommage à sa fille, est défigurée par l'ajout de locaux commerciaux et se détériore de jour en jour.

« Moi, je préférerais que ce soit l'Etat qui l'achète, car si c'est un particulier il le fera démolir », déclare à l'AFP son propriétaire, Anibal Olivetti, dans sa maison située à quelques pas du fleuve.

Il place sur sa table des photos de l'époque de gloire du bâtiment, acquis par son grand-père il y a près d'un siècle, et ajoute : « C'est un patrimoine cher à entretenir ».

M. Olivetti se dit las de la mairie, qui le loue depuis 1994 pour le protéger et dont le contrat arrive à échéance le 8 décembre.

Il ne comprend pas davantage l'Etat, qui a déclaré son théâtre « monument historique national » en 2007, sans jamais franchir le pas suivant : l'acquérir et le restaurer.

Le gouverneur de la province de Corrientes, Ricardo Colombi, lui a demandé quel était son prix de vente, mais ne s'est plus manifesté depuis des mois.

« Je ne vais pas attendre dix ans qu'ils se décident », dit M. Olivetti, qui ne souhaite pas dévoiler le prix demandé.

Le secrétaire à la Culture de la ville, Carlos Ginocchi, veut croire à une solution officielle. « Ce serait une énormité de le vendre à une entreprise privée », dit-il.

Mais, au Théâtre, l'inquiétude est vive. « Que se passera-t-il s'il devait ne plus exister ? Il y aura un vide pour notre culture, pour notre histoire », dit Ana Maria Trainini, directrice du ballet de la ville, très émue.

Le président de la Société des architectes, Dacio Agretti, qui répertorie chaque bâtiment démoli ou abîmé dans la ville, en est convaincu. « A chaque fois qu'un élément de notre mémoire disparaît, c'est notre identité qui est atteinte », dit-il.

Tout comme le président de l'Association des amis du Théâtre, Carlos Sanchez, venu débattre des actions à mener pour tenter de le sauver, M. Agretti pense que sans mobilisation tout peut arriver.

Il y a pourtant des raisons d'espérer. A deux rues du théâtre, une tentative de défigurer la facade centenaire du palais du Club Social, pour y faire des locaux commerciaux, vient de rencontrer une vive opposition. « Pour le théâtre, la réaction sera encore plus forte », prévient le nouveau président du Club, Eduardo Muniagurria.

A Buenos Aires, le parlement doit reconduire une loi interdisant toute démolition des bâtiments antérieurs à 1941, preuve qu'une bataille bien plus vaste pour le patrimoine se livre à l'échelle du pays.

© musicologie.org


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bouquetin

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