Johannes Afflighemensis
v. 1053 - v. 1121
Jean d'Afflighem ; Johannes Cotto.
La dédicace du Musica cum tonario à Fulgentius a ouvert un débat sur la
personnalité de Johannes Afflighemensis. Fulgentius est-il
« Angelorum antiste » (abbé des anges, comme le pense
Joseph Smits van Waesberghe
ou Joan Malcolm), dénomination courante en Flandre, ou est-il, comme il est
écrit dans les manuscrits « Anglorum antiste » (abbé des
anglais).
Son traité, De musica cum tonario, était connu par Jacques de Liège, et répandu
dans les abbayes cisterciennes. Ce qui laisse penser que Johannes
Affligemensis fut membre de la communauté cistercienne d'Afflighem. La
rédaction de son traité est contemporaine de la création de l'ordre de
Cîteaux (1098). Le surnom « Cotto » est tardif.
Écrits relatifs à la musique
De musica cum tonario (vers 1100-1121)
Plan du traité (Gerbert)
- I. Qualiter quis ad musicae disciplinam se aptare debeat.
- II. Quae utilitas sit scire musicam, et quid distet inter musicum, et
cantorem.
- III. Unde sit dicta musica, et a quo et quomodo sit inventa.
- IV. Quot sint instrumenta musici soni.
- V. De numero litterarum, et de discretione earum.
- VI. Qualiter mensurandum sit monochordum.
- VII. Unde dicatur monochordum, et ad quid sit utile.
- VIII. Quot modi sint, quibus melodia contexitur.
- IX. Quot sint vocum discrepantiae, et de Diapason.
- X. De modis, quos abusive tonos appellamus.
- XI. De tenoribus modorum, et finalibus eorum.
- XII. De regulari cursu modorum, atque licentia.
- XIII. Super graeca notarum vocabula expositio.
- XIIII. Quid faciendum sit de cantu, qui in perpetuo cursu
deficit.
- XV. Quod stultorum ignorantia saepe cantum depravet.
- XVI. Quod diversi diversis delectentur modis.
- XVII. De potentia musicae, et qui primitus ea in Romana ecclesia usi
sint.
- XVIII. Praecepta de cantu componendo.
- XIX. Quae sit optima modulandi forma.
- XX. Qualiter per vocales cantus possunt componi.
- XXI. Quid utilitatis afferant neumae a Guidone inventae.
- XXII. De pravo usu abiiciendo, et superfluis quorundam modorum
differentiis.
- XXIII. De diaphonia, id est organo.
- XXIIII. De primo modo, et eius discipulo cum differentiis.
- XXV. De tertio tono et quarto, et eorum differentiis.
- XXVI. De quinto et sexto, et eorum differentiis.
- XXVII. De septimo et octavo, et eorum differentiis.
L'incertitude des neumes
Les mélodies notées en neumes ne peuvent être déchiffrées avec sûreté:
Bien des fautes s'introduisent par suite de lapsus de mémoire
Critique des lettres romaniennes
Les neumes ne donnent aucune certitude mais les
lettres placées au-dessus n'évoquent pas moins de doutes, surtout quand
plusieurs mots commencent par la même lettre, de sorte que la
signification de celui ci s'ignore... ainsi c est le début de plusieurs
mots, comme cito (vite), caute (avec prudence), clamose (d'une voix
forte); de même l dans levia (légèrement), le niter (avec douceur),
lascive (d'un ton lascif), lugubriter (d'un caractère lugubre)
etc.(Gerbert II p. 259)
Utilisation des lettres pour la mélodie (tonaire)
La finale
La note la plus importante dans la composition est
la finale qui devra être la tonique. Elle a une plus longue durée que les
autres et les notes précédentes doivent s'adapter si heureusement qu'elles
semblent tenir leur caractère spécial de la dernière. C'est d'après celle
ci que se réglera toute la composition
La teneur
La teneur est généralement à la quinte de la finale en
authente, à la tierce en plagal. Mais la teneur des 3 et 4es tons (mi) est
sur ut et la.
Solmisation et représentation des
intervalles
D'après Johannes Afflighemensis, les syllabes ut, ré,
mi, fa, sol, la, sont d'usage courant. Au chapitre VIII, il les utilise
pour démontrer les intervalles:
Dans ce schéma, deux systèmes se complètent.
Linéairement, les intervalles tels qu'on les définit sur le monocorde,
comme des fractions d'un segment de droite et le mouvement de la voix qui
représente leur concrétisation musicale. Les mouvements de la voix
ascendante et descendante sont discriminés, intensio pour la voix qui
monte, remisio pour la voix qui descend. Bien que les trois
« ut » de départ soient, par rapport à l'unisson représentés à
un même niveau, la représentation diastématique n'est pas proportionnelle,
pas plus que la représentation linéaire. Ce schéma peut se lire ainsi :
Demi-ton mi-fa intensio, fa-mi remisio. Pour l'intervalle intitulé
Semitonium cum diapente, demi-ton et quinte, ou sixte mineure pour le
vocabulaire moderne, il est indiqué mi-fa intensio et fa-mi remisio, ce
qui est, actuellement un demi ton. Il faut garder en mémoire non pas que
le si n'existait pas (ce qui est vrai mais suppose à tort qu'il manquait)
mais que tout demi ton est appelé mi-fa. Or, à partir de mi, et en
montant, la sixte mineure contient 1/2 ton mi-fa, 1 ton fa-sol, 1 ton
sol-la, 1 ton la-mi (à cause du 1/2 ton suivant), 1/2 ton mi-fa
Organum
On appelle cette manière de chanter vulgairement
organum, parce que la voix humaine par des dissonances bien adaptées
ressemble à l'instrument que l'on appelle orgue.
Décrit l'organum vaguant d'après le mouvement contraire et par monnayage :
Deux ou trois notes de la vox organica correspondent à une note de la vox
principalis.
Les cercles de Aribon : Au Chapitre XII
Johannes Afflighemensis reprend la démonstration des
cercles exposée une trentaine d'année auparavant par Aribon
Ethos des modes
Le premier est grave, noble, tranquille. Le troisième
marque l'indignation sévère.
Grèce ancienne
Correspondance entre les notes du clavier (Lettre) et
les tensions définies dans les théories de l'antiquité grecque. Les
lettres sont différentiées par octave (lettres majuscules, minuscules,
doubles minuscules), tandis que les arcs de cercle indiquent les quartes
ou tétracordes.
Démonstration des intervalles
Manuscrits
- Ms. Diez B. Sant. 151, Berlin, Staatsbibliothek Preußischer
Kulturbesitz (édition Waesberghe, tonaire)
- Ms. Mus. Ms. theor. 215, id., (éd. Waesberghe, tonaire)
XIIe siècle
- Ms. 213, Heiligenkreuz, Stiftsbibliothek, XIIe ou du XIIIe siècle, f.
143v-144r, Chapitres II et V, Videtur congruum ut quid utilitatis
[...]
- Ms. 21, Rein, Stiftsbibliothek, v. 1190, f. 19v-47r
- Ms. Cpv 51, & Ms. Cpv 2502, Wien, Österreichische
Nationalbibliothek, XIIe siècle, f. 62v-70v
- Ms. F IX 36, Basel, Bibliothèque universitaire, XIIe siècle pour cette
partie, f. 2r-64v
- Ms. K 505, Karlsruhe, Badische Landesbibliothek, origine à Bamberg,
XIIe-XIIIe siècles, f. 1-35 & tonaire f. 35-40 (fragments; épître à
Fulgence d'Afflighem)
- Ms. 8° Cod. Ms. 375 (Cim 13), München, Universitätsbibliothek, origine
allemande, XIIe-XIIIe siècles, f. 8v-27 & 35-37v, tonaire
- Ms. lat. 79, Leipzig, Universitätsbibliothek, XIIe siècle
- Ms. Cotton Vespasian A. II, London, British Library, originaire de
Caterbury, XIIe siècle, f. 131-138 (fragment)
- Ms. Ashburnham 1051, Firenze, Biblioteca Medicea Laurenziana,
XIIe-XIIIe, f. 75v-88v
- Ms. Regulae lat. 1196, Roma, Biblioteca Vaticana, XIIe siècle, f.
11r-40v
- Ms. ML 171 C 77 (Philipps 1281), Washington, Library of Congress,
Music Division, origine flamande, XIIe et XIVe siècles. f. 1-29v
XIIIe siècle
- Ms. F IX 54, Basel, Bibliothèque Universitaire, XIIIe-XIVe siècles, f. 2r-3, chapitres III, II, XVII
- Ms. Clm 2599, München, Bayerische Staatsbibliothek,
origine allemande, XIIIe siècle, f. 77-92 & f. 92v-94, tonaire
- Ms. VIII D. 12, Napoli, Biblioteca nazionale, fin XIIIe
siècle, f. 1r-20
- Ms. lat. 4357, Roma, Biblioteca Vaticana, origine
française ou italienne, fin XIIIe-début XIVe siècle. f. 57r-64r
XIVe siècle
- Ms. a VI 44, Salzburg, Abtei Sankt Peter, daté 1490, f. 26r-41r, Chap.
II, XVII, IV
- Ms. Amplon 93 XIV C 2/2, Erfurt, Wissenschaftliche
Allgemeinbibliothek
- Ms. Amplon 94 XIV, Erfurt, Wissenschaftliche Allgemeinbibliothek
- Ms. Hs. II. 375, Mainz, Stadtbibliothek, daté avec prudence de 1466,
f. 12 (fragments) & f. 61-65v, Ysidorus tertio Ethymologiarium Musica
est modulandi peritia in cantu sonoque consistens
- Ms. 98 th. 4°, Regensburg, Bischöfliche Zentralbibliothek, Proskesche-
Musikbibliothek, origine allemande, daté 1457-1476, f. 258-261
- Ms. 42, Saint-Dié, origine italienne supposée, fin XIVe siècle, f.
59rv
XVe siècle
- Ms. 1861, Kraków, Biblioteka Jagiełłonska, origine supposée à
Cracovie, v. 1445, f. 100-122, avec tonaire
- Ms. I.Q.43, Wrocław, Biblioteka Uniwersytecka, fin XVe siècle, f.
109-134, avec tonaire
Éditions
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[édition
électronique TML / Université d'Indiana]
- SMITS VAN WAESBERGHE JOSEPH, Johannis Affligemensis de musica cum
tonario Dans «Corpus Scriptorum de Musica» (1) American Institute of
Musicology, Rome 1950
[édition
électronique TML / Université d'Indiana]
- TRAUB ANDREAS, Zur Kompositionslehre im Mittelalter. Dans «Beiträge
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- WITKOWSKA-ZAREMBA ELZBIETA, Pojecie muzyki w Krakówskich traktatach
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- WOLF JOHANNES, Geschichte der Mensural-Notation von 1250-1460. Leipzig
1904, Hildesheim-Wiesbaden 1965, p. 1, 109.
Jean-Marc Warszawski
Novembre 1995-17 août 2006
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Samedi 10 Août, 2024