Né le 6 janvier 1900 à Chasselay (près de Lyon), mort le 17 août 1936 à Debrecen (Hongrie).
Il reçoit ses premières leçons de piano de sa mère qui est une élève de Félix Le Couppey et d'Antoine-François Marmontel.
Il étudie les sciences naturelles à l'Université de Lyon, mais sa rencontre avec édouard Commette, l'organiste de Saint-Jean de Lyon, qui devient son professeur d'harmonie, lui ouvre d'autres perspectives.
Entre 1920 et 1922, au cours de son service militaire à Strasbourg, il étudie la composition sous la direction de Guy Ropartz et le contrepoint avec Marie-Joseph Erb.
De retour à Lyon, il étudie au Conservatoire avec Georges-Martin Witkowski et Florent Schmitt, dont il devient un proche.
Il prend une part active dans la vie musicale lyonnaise, notamment au Salon d'Automne, qui programme les musiques nouvelles.
Il s'installe à Paris en 1923, et participe à la création du « Triton », un groupe de musiciens engagé dans la promotion des compositeurs contemporains.
Il est critique musical pour « Paris-Soir », « Musique et Théâtre » et « Chantecler ».
Il meurt dans un accident de voiture. Francis Poulenc compose ses Litanies à la Vierge noire à sa mémoire.
Pierre-Octave Ferroud, Fables, par Marie-Catherine Girod, 1. Tempo molto moderato di marcia, un poco burlesco, 2. Tempo di Valz, 3. Allegro giusto, 4. Allegretto moderato, 5. Allegro assai, 6. Comodo.Landormy Paul, La musique française après Debussy. Gallimard, Paris 1943 (6e édition), p. 322-327
Je rencontrai, il y a quelques années, P.-O. Ferroud à Salzbourg, recueillant religieusement la leçon des immortelles beautés de la Flûte, de Figaro et d'Obéron en même temps qu'il professait au Mozarteum un cours sur les procédés de composition de l'école française contemporaine. Ce moderne très audacieux s'apparente, de près, aux classiques.
Pierre-Octave Ferroud est né le 6 janvier 1900 à Chasselay, bourg d'un millier d'habitants à 15 kilomètres au nord de Lyon.
Un homme de franche allure. Sa musique, comme lui-même, va droit au but, sans détour et s'impose avec force. La solidité, l'équilibre indéfectible de son caractère se retrouvent dans ses créations, qui s'imposent tout d'une venue.
Sa vie elle-même va en droite ligne, sans arrêt, sans recul, sans sursaut.
Son père exerçait la médecine et voulut que tout d'abord son fils fît d'excellentes études classiques. Il souhaitait qu'il les poursuivît au moins jusqu'à la licence de physique et chimie. Ce père, bon humaniste, très cultivé, mourut au début de la guerre.
Pierre-Octave redoublait alors sa rhétorique, attendant l'âge d'obtenir une dispense pour passer son baccalauréat.
Première rencontre à noter dans cette jeunesse studieuse : celle du R. P. Henri Costa de Beauregard, depuis professeur à la Faculté catholique des lettres de Lyon, qui eut une influence décisive sur la formation du goût du jeune étudiant.
Cependant Mme Ferroud, qui avait été l'élève de Le Couppey et de Marmontel, initiait son fils à la musique. A 4 ans, elle lui posait les mains sur le piano. A 8 ans, il jouait par cœur les Préludes et les Fugues du Clavecin bien tempéré. Il songea un instant à la carrière de virtuose. Un accident le détourna de ce projet. En mettant en marche un moteur d'automobile, il subit le choc violent d'un retour de manivelle qui lui luxa le poignet. C'était en 1917. Il en conserva une certaine raideur qui lui interdisait les exercices prolongés.
Mais déjà il songeait à la composition. Son premier maître d'harmonie fut l'organiste de la primatiale Saint-Jean de Lyon, Edouard Commette, que ses admirables enregistrements ont rendu célèbre.
A ce moment, Pierre-Octave Ferroud, étudiant à la Faculté des sciences, se liait avec le violoncelliste Jean Witkowski, le fils de l'auteur du Poème de la Maison.
De mars 1920 à février 1922, service militaire. Ferroud est incorporé au 6e régiment d'infanterie coloniale, qui tient garnison à Strasbourg. Deux années qui ne sont point perdues pour la musique. Guy Ropartz, directeur du Conservatoire de Strasbourg, accueille au mieux le jeune soldat qui lui est recommandé par Witkowski père.
D'ailleurs, le colonel de son régiment s'entend avec le chef de musique pour lui accorder toutes sortes de facilités. C'est ainsi que Ferroud peut commencer ses études de contrepoint dans la classe du professeur Erb.
Une Sarabande pour orchestre réduit obtient le prix à un concours organisé entre les jeunes compositeurs lyonnais par la Société des grands concerts, et elle est exécutée en octobre 1921 sous la direction de Witkowski.
Et déjà Ferroud mettait sur le chantier un recueil de pièces pour piano intitulé Au Parc Monceau.
Mais le voici démobilisé. Ferroud rentre à Lyon, où il s'ennuie, — il commence de s'ennuyer, du moins. Il ne s'ennuie pas longtemps, car, un beau jour, débarque le nouveau directeur du Conservatoire, Florent Schmitt. Un homme rude et d'un abord quelquefois un peu hérissé. Mais ce n'est qu'un aspect extérieur. Il faut voir le fond, pénétrer jusqu'au cœur. Une étroite amitié a bien vite fait de lier les deux hommes, très différents d'âge, mais par bien des côtés analogues de caractère. Ferroud n'entre pas au Conservatoire. Il ne devient pas l'élève de Schmitt. Il est plus et mieux, son disciple et son confident. Auprès d'un tel maître, Ferroud trouve l'occasion des meilleures leçons. Leçons presque toujours sans plan, sans méthode, à bâtons rompus, mais bourrées d'indications justes et pénétrantes.
Lyon est d'ailleurs alors un milieu très favorable au développement d'un artiste. Il faut lire le très remarquable article de René Dumesnil à ce sujet. Un mouvement artistique très ardent anime la vieille cité lyonnaise. Il est conduit par un groupe dont font partie Mme Mauvernay, le docteur Edmond Locard, François Maire, président du Salon d'Automne, le peintre Courbet-Des-combes, Lucien Février-Jourdain, peintre aussi et musicien à la fois, l'avocat Paul Creyssel, Maggie Guiral, Tancrède de Visan, Laurent-Vibert, Louis Agrettant, Jacques Reynaud, qui, un peu plus tard, devait fonder à Paris la revue Latinité, dont Ferroud, en même temps que de Paris-Soir, devint le critique musical, d'autres encore... Le Salon d'Automne lyonnais de 1922 donne trois concerts où l'on entend 15 œuvres nouvelles françaises ou étrangères. C'est Ferroud qui a établi le programme, et en même temps il veut faire connaître au public les récents progrès de la musique enregistrée : il fait entendre le Chant du Rossignol de Strawinsky, transcrit pour le pleyela. A ce propos, il entre en relations avec Robert Lyon qui l'appelle à Paris pour diriger, à la maison Pleyel, l'enregistrement des œuvres pianistiques.
Nous sommes en 1923. Ferroud a quitté définitivement la province. A Paris, Ferroud retrouve Florent Schmitt. Il achève la partition de Foules, ébauchée à Lyon. A la fin de l'année, il se marie et quitte la maison Pleyel. Dans l'intimité du foyer conquis, il se met d'arrache-pied au travail.
S'il s'était d'abord laissé prendre à la séduction intrinsèque des accords savoureux, Ferroud en vint assez vite, comme tous ceux de sa génération, à mettre l'harmonie au service du contrepoint. « C'est par le contrepoint, déclare-t-il lui-même, que la musique atteint à cet universel dont elle est la langue, l'harmonie gardant toujours une couleur nationale. »
Il y a là une remarque intéressante et qu'on pourrait étendre encore davantage, il me semble, car ce n'est pas seulement d'un pays ou d'une nation que l'harmonie est comme la couleur distinctive, mais aussi d'un âge, d'un temps, d'une époque. Qu'est-ce, en effet, qui date plus exactement une musique de Monteverdi, de Lully ou de Rameau que son système harmonique ? Ce qui n'est d'aucun temps, ni d'aucun pays, c'est la superposition des tracés mélodiques en un contrepoint d'un tissu solide, voilà ce qui fait le plus sûrement aimer les œuvres à travers les siècles. Songez au contrepoint de Bach ou à celui d'un Costeley et d'un Roland de Lassus.
C'est ainsi que Ferroud compose une Sonate de violoncelle écrite en contrepoint à trois parties, l'une confiée au violoncelle, l'autre à la main droite du piano, la dernière à la main gauche, comme dans les sonates piano et violon de J.-S. Bach, contrepoint qui n'a rien de pesant, qui est au contraire souple et léger, qui, en ces trois mouvements : capriccio, intermezzo, rondo, vole aérien et libre avec une imprévisible fantaisie.
Ne cherchez à cette musique aucune signification extérieure. Ni littérature, ni peinture. Cette musique ne signifie rien qu'elle-même. Elle ne traduit en aucune façon des états d'âme. Aucun romantisme. De la musique pure. La musique des musiciens. Art objectif, si vous voulez. Pur jeu où il ne s'agit que d'attraper la beauté. Rien que cela ! Avouons qu'ici Ferroud y atteint à merveille.
Il lui arrive aussi de chercher l'expression et, tout en écrivant de la musique qui soit d'abord de la musique, de nous émouvoir par surcroît profondément. Je n'en veux pour preuve que ces Trois Poèmes intimes de Gœthe, que Ferroud a composés sur le texte allemand dans une intention singulièrement pénétrante. Mais admirez comme ici l'expression s'associe étroitement au souci de la forme et de la pure beauté. Et ce n'est pas sans raison que l'auteur de ces trois mélodies les considérait comme une sorte de sonatine vocale en trois parties.
Ces deux ouvrages : la Sonate pour violoncelle et piano et les Trois Poèmes intimes de Gœthe, forment, par leur contraste même, un éloquent sommaire de l'œuvre de Ferroud. Elles en marquent les deux tendances extrêmes qui se complètent sans se contrarier.
Cette œuvre, elle est fort abondante et j'en veux citer les titres principaux :
Pour le piano : Trois études (1918-1923), Sarabande (1920), Au Parc Monceau (1921), Prélude et Forlane (1922), Types (Vieux beau. — Bourgeoise de qualité. — Businessman) (1922-1924), Sonatine en ut dièse (1928), Tables (1931).
Pour le chant : A contre-cœur (1922-1925), Cinq Poèmes de P-J. Toulet (1927), Trois Poèmes de Paul Valéry (1929), Trois Poèmes intimes de Gœthe (1932), Trois Chansons de Jules Supervielle (1932).
Musique de chambre : Trois Pièces pour flûte seule (1921-1922), Sonate en fa pour violon et piano (1928-1929), Sonate en la pour violoncelle et piano (1932), Trio en mi pour hautbois, clarinette et basson (1933), une œuvre pour laquelle j'éprouve une particulière sympathie. Encore du beau contrepoint. Des sonorités un peu rudes; de la verdeur dans les timbres et dans les rythmes, quelque chose d'agreste dans le sentiment, une sorte de saveur paysanne.
En 1934, Pierre-Octave Ferroud commençait un Quatuor à cordes, où l'on devait retrouver le Ferroud ferme et dru que nous aimons, parfois un peu brusque dans son dédain des petites habiletés trop faciles. C'est ainsi qu'il négligera souvent les longues préparations pour moduler. D'une tonalité il nous transportera sans transition dans une autre, de son choix, qu'il affirmera sans réplique. Il l'a dit lui-même : « Moduler comme un tank n'est pas plus blâmable que de tourner trop longtemps autour du pot. »
Pour l'orchestre : Sarabande (1920-1926), Au Parc Monceau (1921-1925), Foules (1922-1924).
Cette dernière œuvre, Foules, est une vaste composition très caractéristique du style de l'auteur et de sa façon de comprendre le rôle de la musique. Le titre semble indiquer qu'il n'a point hésité à faire de la peinture ou de la littérature. Prenons-y garde. Ferroud a évité ici l'éparpillement des impressions, l'émiettement de la matière musicale qui résulteraient d'une description détaillée s'attachant à un minutieux inventaire de la réalité. Sous lev titre de Foules « il évoque le grouillement d'une ville moderne, le halètement des souffles, la pulsation des cœurs », mais dans une vue synthétique, dans un aperçu schématique qui ne retient de l'âme collective d'une cité vivante que l'essentiel, le principal, l'universel. Le sujet proposé n'est ici qu'occasion à musiquer, rien de plus. Un point de départ pour l'inspiration qui se libérera bien vite de tout lien trop étroit avec la vision première. Toujours la même tendance à la musique pure que nous avons déjà indiquée.
Dans le domaine de l'orchestre, citons encore la belle Symphonie en la de 1930, une des œuvres les plus accomplies de Ferroud.
Pour le théâtre, ce pur musicien a peu écrit. Notons : le Porcher, ballet dansé par la troupe de Jean Borlin au théâtre des Champs-Elysées en novembre 1924; Chirurgie, opéra-bouffe en un acte de Denis Roche et André-G. Block, d'après Antoine Tchékov, représenté le 20 mars 1928 à l'Opéra de Monte-Carlo, et Jeunesse, ballet en deux tableaux, scénario d'André Cœuroy et Serge Lifar, représenté à l'Opéra en 1931.
Mais Ferroud était-il très attiré par le théâtre ? Sa conception de l'art musical semblait devoir faire de lui plutôt un symphoniste. Et nous voyons que ce qui l'a d'abord intéressé au théâtre,
Jean-Marc Warszawski
29 mars 2011
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Lundi 2 Octobre, 2023