Athénée-Théâtre Louis-Jouvet, 23 mai 2025 —— Alfred Caron
Sybille(s), Athénée-Théâtre Louis-Jouvet. Photographie © François Le Guen.
Le spectacle imaginé par Simon-Pierre Bestion et la dramaturge Raphaëlle Blin, autour de la figure de la Sybille, est d’abord et surtout une interrogation sur le mystère de la mort. La Sybille y est la messagère et la médiatrice entre l’homme, l’au-delà et les dieux. La tonalité rituelle est donnée dès l’introduction par le recours à une musique contemporaine de Zad Moultaka où les percussions jouent un rôle important bientôt suivie d’une reconstitution de la musique ancienne pour l’Oreste d’Euripide. Deux épisodes se succèdent. Le premier, « Tiago », met en scène un père ayant perdu son enfant. Sur la musique de L’Orfeo de Monteverdi dont le texte a été entièrement transposé pour coller au propos, le ténor et danseur Mario Barrientes Espinosa incarne le désespoir et l’incompréhension du père de l’enfant. Le second, intitulé « Clara », la mezzo et violoniste Mathilde Rossignol, nous parle d’une femme à qui sa mort a été annoncée et que sa révolte amène à une sorte de dédoublement entre son être intérieur et son être physique condamné qu’elle voit dans le miroir. Le dernier épisode sera consacré à l’histoire d’Abel et Caïn, nous valant un combat chorégraphié. Aux musiques anciennes, Carissimi, Hildegarde von Bingen, et de nombreuses versions des xve et xvie siècles du Chant de la Sybille espagnol, ont été intégré des fragments de pièces contemporaines, Xenakis, Ferneyhough, Aperghis et des pièces traditionnelles, un chant traditionnel géorgien magnifiquement chanté par Jawa Mala, s’accompagnant au oud et un chant grec byzantin «Kyra mou portaitssa ».
Sybille(s), Athénée-Théâtre Louis-Jouvet. Photographie © François Le Guen.
Pour la plupart les pièces ont été arrangées par Simon-Pierre Bestion pour son ensemble qui ne réunit pas moins de treize instrumentistes, tous chanteurs, que le programme réunit dans de beaux ensembles. On ne peut citer tous les musiciens, mais tous apportent leur note personnelle, tout en se fondant dans l’ensemble avec un sens du collectif qui au-delà de leur virtuosité individuelle, est une de leur grande qualité. La richesse instrumentale répond au désir de montrer la diversité culturelle et géographique des avatars de la Sybille. Xavier marquis par exemple passe au cours du spectacle du hautbois baroque au duduk en passant par la clarinette et la viole de gambe voisine avec l’accordéon. Il se dégage de l’ensemble une sensation hypnotique que renforce une scénographie et des lumières très travaillées, et des mouvements scéniques qui font des musiciens de véritables performeurs, dansant, chantant et déclamant des textes dont on regrette un peu que les projections en fond de scène ne permettent toujours de bien les déchiffrer. Ce qui paraît au prime abord un rien folklorique (costumes, apparitions de la Sybille masquée et vêtue d’un embrouillamini de cordes qui semble la retenir à l’autre monde) devient convaincant par la magie de la musique et du chant et le spectateur-auditeur se laisse prendre par la beauté de l’ensemble sans trop chercher à creuser le sens. Le spectacle achevait sa tournée le 24 mai, mais il pourrait être repris pendant la saison prochaine.
Alfred Caron
Paris, 23 mai 2025
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