Paris, 17 avril 2025 — Frédéric Léolla
« Les Contes de Perrault », mise en scène de Valérie Lesort. Photographie © Fabrice Robin.
Les lecteurs de musicologie.org le savent bien, l’Histoire de la Musique est pleine de créateurs (et de créatrices, bien sûr) justement ou injustement oubliés. Ce n’est pas dans ces lignes qu’il faut entamer le débat sur la prétendue vérité ou justice de la postérité, mais dans tous les cas cela fait du bien de pouvoir juger par soi-même en écoutant des œuvres que le répertoire n’a pas retenues — ou pas, pour l’instant…
Ce fut le cas, cet avril 2025, des Contes de Perrault, une féérie oubliée du très oublié Félix Fourdrain.
C’est grâce à l’enthousiasme des Frivolités parisiennes (le mélomane avide de savoir ne leur sera jamais assez reconnaissant de tout le travail qu’elles font, ces Frivolités parisiennes fondées par Benjamin El Arbi et Mathieu Franot, qui, en se servant de leurs petits moyens, patiemment, savent ressusciter avec brio des œuvres jadis triomphantes et aujourd’hui méconnues) et grâce au Théâtre de l’Athénée, l’Opéra de Reims et autres théâtres courageux qui depuis des années leur laissent carte blanche au moins une fois par saison.
On ne peut que louer l’équipe réunie à l’occasion de ces Contes de Perrault, à commencer par le brillant travail de mise en scène de Valérie Lesort, qui retouche les dialogues sans en trahir l’essence, qui a l’intelligence des mouvements scéniques et sait mener ses acteurs vers un histrionisme contrôlé de bon aloi, et qui a su s’entourer de collaborateurs tout aussi brillants : Vanessa Sannino à la scénographie efficace et aux costumes savoureux ; Pascal Laajili, aux effets de lumière intelligents ; Vanessa Sannino, Julie Boissy et Joris Thouvenin à la vidéo ; Rémi Boissy avec des chorégraphies simples et amusantes ; Carole Allemand aux très jolies marionnettes ; Maurine Baldassari au maquillage qui fait mouche.
« Les Contes de Perrault », mise en scène de Valérie Lesort. Photographie © Fabrice Robin.
Musicalement, le résultat est tout aussi brillant. À la tête de l’orchestre des Frivolités parisiennes, Dylan Corlay en tire un joli son, une grande précision et une belle homogénéité. Les différents solistes instrumentaux y brillent. Et Corlay gère très bien l’équilibre entre esprit et sentiment, entre canaille et élégant.
Les petits chœurs sont bien efficaces. Quant aux solistes vocaux, ils vont du bon au très bon, tous possédant le secret du chanté-parlé, de l’alternance entre dialogue et chant et de la limite entre gouaille et finesse. Saluons peut-être, tout particulièrement, Enguerrand de Hys qui sait composer un Prince charmant au timbre justement charmant, Roman Dayez qui campe un Olibrius puissant, Anaïs Merlin qui passe du chant sentimental aux couplets cocasses dans toute une ribambelle de rôles, Julie Mathevet aux vocalises bien maîtrisées, ou Philippe Brocard — chanteur qui semble né pour ce répertorie, tant il y brille chaque saison — dans ses hilarants couplets du bicarbonate.
L’œuvre de Fourdrain/Bernède et de Choudens paraît ainsi comme un bijou, serti de mélodies très immédiates, de celles que le spectateur retient presque malgré lui, utilisant un précieux alliage d’imagination, de références communes (les contes de Perrault), de sentiments et d’humour, qui s’adresse aussi bien aux grands qu’aux petits.
Un superbe spectacle.
Si je peux me permettre, je crois qu’il reste encore quelques représentations à Dijon. Lecteurs dijonnais, ne ratez pas ce rendez-vous : vous m’en saurez gré.
Frédéric Léolla
17 avril 2025
Paris, jeudi 17 avril 2025. Théâtre de l’Athénée. Les contes de Perrault, féérie lyrique. Musique de Félix Fourdrain. Livret d’Arthur Bernède et Paul de Choudens d’après plusieurs contes de Charles Perrault. Mise en scène de Valérie Lesort. Scénographie et costumes, Vanessa Sannino. Lumières, Pascal Laajili. Création vidéo, Vanessa Sannino, Julie Boissy et Joris Thouvenin. Chorégraphie et mouvements, Rémi Boissy. Marionnettes et masques, Carole Allemand. Maquillage, Maurine Baldassari. Avec Anaïs Merlin (Cendrillon, Petit poucet, Chaperon rouge), Julie Mathevet (fée Morgane), Romain Dayez (Olibrius), Enguerrand de Hys (Le prince charmant), Camille Brault (le chat botté), Lara Neumann (Madame de Houspignoles), Eléonore Gagey (Aurore), Hortense Venot (Javotte), Richard Delestre (Croquemitaine, Meunier, Huissier), Philippe Brocard (La Pinchonnière, Barbe-Bleue), Lucile Komitès (La reine Guillaumette), Geoffroy Buffière (Le roi Guillaume), Marion L’Héritier, Hortense Venot, Claire Naessens, Zoé Cassard, Célian D’Auvigny, Guillaume Durand, Angelo Heck (chœur), Benjamin Gouy-Pailler y Julie Galopin (danseurs). Orchestre Les Frivolités parisiennes. Conseil musical, Christophe Mirambeau. Cheffe de chant, Delphine Dussaux. Direction musicale, Dylan Corlay.
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