2025 —— Alain Lambert.
Tout a été organisé pour que le film sorte la bonne année (le 25 juin), à défaut du mois de janvier. Un film qui raconte une histoire vraie, mais sans être un de ces tristes biopics qui fleurissent autour des stars (Elvis, Amy, Nina…). Seul Un parfait inconnu tient la route, récemment. On en reparlera bientôt à propos de la réédition du livre qui lui a servi de base (Bob Dylan électrique, Rivages Rouge 2025).
Ici on est dans l’idée de ce qu’avait tenté Bertrand Tavernier en 1986 avec Autour de minuit, l’amitié d’un jeune journaliste à Paris pour un musicien américain qu’il aide à survivre un temps, histoire fictive avec Dexter Gordon et François Cluzet, mais inspirée d’une autre bien réelle.
Köln 75 d’Ido Fluk, raconte l’histoire de Vera Brandes (jouée par Mala Emde), qui, à 16 ans, fan de jazz à Cologne, devient productrice de concerts, et qui, ayant entendu celui en solo de Keih Jarrett (John Magaro) à Berlin en 1974, fait tout, vraiment tout, pour le faire venir dans l’opéra de sa ville l’hiver suivant, en janvier, pour ce qui deviendra le mythique Köln Concert, l’album de piano solo le plus vendu et le plus connu, même par ceux qui n’aiment pas le jazz.
Un journaliste musical fictif, Michael Watts (Michael Chernus), apporte en complément à la narration de Vera, dans l’émotion, celle de l’érudit qui redonne un peu de contexte pour les spectateurs néophytes. Et rend le film accessible à tout un chacun. Ce personnage se permet même de monter dans la 4L de Manfred Eicher, le producteur du futur fameux double album, emmenant Keith Jarrett de Lausanne à Cologne, car ils ont revendu les billets d’avion pour pouvoir continuer la tournée ensuite. Ce qui explique pourquoi le pianiste, qui a très mal au dos, refuse de jouer sur un Bösendorfer de répétition déglingué, alors que le directeur de l’opéra, absent ce soir-là, devait, pour le prix énorme de la location, fournir un instrument de concert. D’où le rôle important de Vera pour permettre à ce concert quasi annulé de devenir culte.
Un film rapide, vivant, suggérant l’improvisation dans le scénario, le filmage et le montage pour donner un rythme souvent trépidant, haletant, avec des sauts dans le temps, des citations musicales. L’histoire de Vera plus que celle de Keith, qui n’en est qu’un moment mémorable. D’autant que, si le musicien a donné l’autorisation d’en utiliser l’histoire, il ne préfère pas ce concert-là et n’a pas autorisé à faire entendre sa propre musique. Le réalisateur a donc fait jouer à quatre reprises un autre improvisateur solo, Stefan Rusconi, qui s’en tire plutôt bien. Les autres séquences sonores nous plongent dans les premières années soixante-dix, des années de revendication que Vera, en difficulté familiale, vit pleinement avec ses amis.
Alain Lambert
17 juin 2025
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