Jean-Marc Warszawski, 29 novembre 2025

À l’impossible Ornella Volta s’est tenue

Volta Ornella, Erik Satie en notes et en mots (préféce par Jean-Pierre Armengaud). « L'écart absolu », Les presses du réel, Dijon 2025 [624 p. ; ISBN 978-2-84066-753-7 ; 35 €]

Dans les années 1980, Erik Satie est entré dans nos vies, par les nombreux enregistrements discographiques du pianiste Aldo Ciccolini, plus de trente ou quarante ans avant l’intégrale par Jean-Yves Thibaudet (DECCA 2003), puis celle de Jean-Pierre Armengaud (Bayard-musique 2023). C’est en 1989 que les éditions Salabert éditent l’intégrale des pièces pour piano, musiques, notamment les Gymnopédies, qui seront massivement utilisées dans les publicités, génétiques, films.

Mai il y a Ornella Volta (1927-2020), qui, dès 1979, après être passée de l’Italie à la France, publie chez Seghers une première monographie sur Erik Satie, enfin une seconde après celle de Pierre-Daniel Templier (Rieder, Paris 1932). Venue du journalisme, œuvrant dans le monde du cinéma et de l’image, intéressée par les fictions sur les vampires, elle se passionne dès lors pour tout ce qui touche à Erik Satie, rassemblant une documentation phénoménale, traquant le moindre geste, le moindre mot, la moindre virgule, ouvrant un musée, écrivant, organisant des expositions, créant une fondation et les « archives Erik Satie ».

La mort ne lui a pas permis d’achever un ultime ouvrage, une somme en deux parties, dont la première a semblé assez achevée pour être publiée : des écrits annotés, sur-annotés du compositeur qu’on suit au cours de ses œuvres, de leurs textes, de ce qu’il en a écrit, de ce qu’on a écrit de ce qu’il en a dit et de ce qu’on en a écrit.

Ornella Volta était plus documentariste qu’historienne, plus disposée à montrer qu’à expliquer. Pour cela, il faudra attendre, après elle, des plumes plus conceptuelles, comme celle de Jean-Pierre Armengaud (préfacier de l'ouvrage), ou plus biographiques, comme celle récente de Christian Wasselin.

Sa démarche est fondamentalement positiviste, en ce qu’elle vise à donner sens par l’exposition la plus judicieuse possible des artéfacts, en pensant possible une histoire globale comme image fidèle du passé, une démarche totalement abandonnée par l’histographie moderne consciente que faire de l’histoire est une opération idéologique, un débat auquel Ornelle Volta n’a jamais participé, restant dans son rôle de créatrice, conservatrice et guide conférencière des archives Éric Satie.

Cette démarche pourrait mener à l’illisibilité, à l’avalanche de couches et pistes de donnée, de détails inutiles noyant le sujet principal.

Avec cet ouvrage, Ornella Volta a frayé un chemin original entre les inconciliables histoire, biographie, exposition documentaire à la manière d’une visite guidée et commentée dans le musée documentaire, certes parfois un peu touffue, mais ne perdant jamais de vue l’essentiel et n’abordant le digressif que dans sa nécessité.

Nous n’évaluons pas ce que cela apporte de plus à la connaissance que nous pouvons avoir, grâce aux publications d’Ornella Volta des années 1980, du personnage Erik Satie, mais c’est une fort bonne mise à jour, et pour celles et ceux qui n’avaient pas encore appris à lire à l’époque, cet ouvrage est incontournable et s’impose comme nouvel usuel et source essentielle de connaissance sur le compositeur et son environnement.

Pour le centième anniverairfe de la mort de€rik Satie.

Jean-Marc Warszawski
29 novembre 2025.

Musicologie.org, 56 rue de la Fédération, 93100 Montreuil. ☎ 06 06 61 73 41.

ISSN 2269-9910

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