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Caen, le 4 avril 2024. —— Alain Lambert.

Jeanne Desoubeaux Là où je vais la nuit. Le mythe d’Orphée joliment revisité

Où je vais la nuit.Où je vais la nuit. Photographie © Thierry Laporte.

Il est important que la musique de théâtre soit appropriée au texte et au contexte symbolique de la pièce. Par exemple, dans le Dom Juan de David Bobée vu récemment, l’idée était de faire du personnage de Molière un provocateur cynique à l’image d’abord d’un rocker style James Dean, puis d’un punk façon Johnny Rotten (des Sex Pistols), une fois ses cheveux hérissés par la purée. Ce qui ne colle pas vraiment avec la jolie musique électro planante utilisée en bande-son, laissant un goût d’inachevé.

Par contre, dans Où je vais la nuit, les choix musicaux sont vraiment assumés, d’autant qu’il s’agit d’une pièce musicale inspirée de l’opéra de Gluck, Orphée et Eurydice, dans sa version française pour les textes. Le jour des noces d’Odette et Eugénie, cette dernière meurt et Odette/Orphée s’en vers vers les Enfers pour l’en ressortir. Une noce d’aujourd’hui donc, avec pendant l’installation du public le quatuor Orphée, Eurydice, Nikita et Simon sur l’estrade, décorée pour accueillir en chansons d’amour les invités. Ensuite, les réductions des airs de l’opéra qui vont suivre vont garder cette spontanéité de l’orchestre de bal, entre pop et barock.

Jeanne Desoubeaux, pour l’adaptation et la mise en scène, a choisi de tout centrer sur le premier lamento d’Orphée, puis son imploration aux dieux-cyclopes, dont on n’entendra pas le chœur, enfin sur le duo aveugle entre elle et son aimée. Des touches de musique baroque retravaillée pour les intermèdes, mais dans l’ensemble, une réduction sobre, clavier contrebasse ou piano, violoncelle, jouée par Jérémy Arcache et Benjamin d’Anfray. Qui convient parfaitement à la voix de Cloé Lastère. Quant à la chanteuse lyrique Agathe Peyrat, Eugénie/Eurydice, peut être en fait-elle un peu trop dans le bel canto, car c’est dans la simplicité qu’elle devient émouvante.

Après l’échange de regards et la seconde disparition d’Eyridice, la pièce se termine abruptement par la chanson de Philippe Katerine lui donnant son titre. Toujours cette recherche de sobriété que Rousseau aurait appréciée [voir notre chronique], même si l’air d’Orphée, épuré après la rencontre du musicien et du philosophe, nous trotte quand même dans la tête.

Une belle adaptation, intelligente et sensible, coproduite par le théâtre de Caen dans le cadre du dispositif C’est déjà demain pour accompagner les jeunes artistes du terroir normand. Cette année Jeanne Désoubeaux, d’origine caennaise, qui proposera aussi dans le cadre de Tous à l’opéra Carmen, opéra-paysage itinérant les 17 et 18 mai en plein air sur la place Champlain de la Pierre Heuzé de Caen (gratuit sur réservation theatre.caen.fr).

plume 14 Alain Lambert
2024
© musicologie.org


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