Caen, 18 mars 2022 —— Alain Lambert
Khalil Chahine 5tet à la Nuit du jaz. Photographie © Gérard Boisnel.
Les frontières musicales étaient bousculées cette 26e nuit du jazz, d’abord puisque le premier invité, Khalil Chahine, est né près de Caen à la maternité de Bénouville quand elle existait encore. Un peu Normand et un peu Égyptien dans son enfance, et content de se produire pour la première fois ici, avec son frère et des amis présents dans le public. Après un trio de morceaux de son dernier cédé, il nous a emmené au Kafé Groppi du Caire où tous les horizons se croisaient autrefois, puis à Gizeh et dans d’autres compositions anciennes, avant de terminer par des thèmes récents, toujours très arrangés et écrits, avec de belles plages d’improvisation, pour lui aux doigts rapides à la Gibson rouge, et pour ses musiciens très impliqués, Stéphane Chausse aux clarinettes, à la flûte et à l’ewi — sax synthétiseur piloté par ordinateur, agréable et intrigant, capable de numériser de multiples sons, flûte orientale, violons, voix… qu’on avait un peu oublié depuis la disparition de Michael Brecker, son initiateur — Claude Egéa à la trompette et au bugle, Christophe Wallemme à la contrebasse et Matthieu Chazarenc à la batterie. Un jazz électrique et classique en bel équilibre.
Jérémy Bruger trio à la Nuit du jazz. Photographie © Gérard Boisnel.
En attendant le changement de plateau, le pianiste régional Jérémy Bruger au piano, accompagné de Raphaël Dever à la contrebasse et de Laurent Bataille à la batterie, nous offre dans les foyers un moment swing et acoustique, retenant cependant sans problème l’attention des spectateurs quasi en récréation, d’autant que le café du rez-de-chaussée a rouvert récemment
Dhafer Youssef en quartet. Photographie © Alain Pelletier.
En final Dhafer Youssef, une expérience musicale non partagée par tous, certains déplorant un musicien « imbu de lui-même ne jouant que pour mettre en valeur son percussionniste ». Pour les autres le bousculement des frontières et des styles musicaux se lit directement sur scène avec des points cardinaux brouillés, sauf au Nord où trône le Norvégien Elvind Aarset avec sa guitare atmosphérique et planante ou rock, nordique à la Terje Rypdal. Par contre le percussionniste brésilien Adriano Dos Santos est positionné à l’Est (mais il a pris la place d’un Indien présent sur le disque, ce qui change l’ambiance) et à l’Ouest se tient le saxophoniste italien Raffaele Casarano au son presque garbarekien. Au Sud le tabouret du oudiste tunisien, quand il chante, mais rarement en fait (et c’est bien) car le reste du temps il parcourt les espaces entre ses complices à reculons, et en jouant, le plus souvent de manière répétitive, poussant chacun d’eux dans ses retranchements mélodiques, harmoniques et rythmiques, ou propulsant le groupe dans une puissante transe où les percussions et les accords de guitare explosent.
En jazz encore au théâtre de Caen la création de Régis Huby avec l’ORN Métamorphose le 28 avril, puis le final de Jazz dans les foyers le 30 avril avec le sextet de Nicolas Folmer entre jazz et électro.
Alain Lambert
18 mars 2022
© musicologie.org
Pierre Christophe rejoue avec brio Erroll Garner — Angelin Preljocaj Le lac des cygnes joliment relu et actualisé — Cinq cédés jazzy pour attendre le printemps — Le beau duo Ray Lema-Laurent de Wilde pour fêter quarante saisons de « Jazz dans les foyers ».
alain@musicologie.org ; Alain Lambert, tous ses articles.
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