musicologie

dimanche 21 février 2021

Les apports artistiques de Michael Jackson

Appel à articles
Date limite 1er mars 2021
Site web

Le nombre des études universitaires portant sur Michael Jackson s’est accru ces dernières années, coïncidant sans doute, tout à la fois, avec une prise de conscience de son impact au sein de l’industrie musicale, de l’Histoire de la musique et de la société, et un intérêt croissant développé à son égard par les cultural studies. Pour autant, nombre des études le concernant ciblent bien moins ses apports artistiques que la fluidité dite anxiogène de son image artistique (Dalmazzo 2009, 2010 ; Scott 2012), de son startext (Raphael 2012) ou que sa capacité à brouiller tous les codes simultanément (Fast 2010, 2012). Michael Jackson intéresse essentiellement les domaines de la « race » (Zulu ed. 2010 ; Brackett 2012 ; Woodward 2014) du genre (Scott 2012), du sexe (Fuchs 1995), de l’altérité « étrange » (Fast 2012 ; Jefferson 2006) et ce, même dans le cadre musical (Roberts 2011 ; Malela 2012 ; Gondwe 2013 ; Petitjean 2019) ou chorégraphique (Takiguchi 2014). Ses chansons et ses courts-métrages musicaux ont été passés au crible d’interprétations tantôt orientalistes (Faust 2012), tantôt nationalistes (Rossiter 2012), tantôt post essentialistes ou post constructivistes (Fuss 1989 ; Awkward 1995) et les précédentes revues qui lui ont été consacrées (Zulu ed. 2010 ; Hawkins & Fast eds. 2012) ont largement souscrit à ces prismes mélaniques et musico-coloristes. Si son œuvre sonore et visuelle a, certes, évolué dans un contexte où genre et pigmentation ont toujours été connectés, Michael Jackson n’a, cependant, jamais eu de cesse de se battre pour ne pas être enfermé dans une niche marketing monoraciale. Et pour ce faire, il n’a eu de cesse de répercuter et de déployer un vivier de références pluralistes, interagissant avec la fragmentation et la rotation des genres au sein du courant dominant (Mercer 1994 : 95), jouant, plutôt que brisant les catégories (Brackett 2012), et proposant un art éminemment pluridisciplinaire, combinatoire et fédérateur.

En consacrant un numéro spécial à Michael Jackson, NaKan propose de décaler un regard et un faisceau d’approches trop souvent mélano-centrés pour générer une réflexion davantage tournée vers l’œuvre et les mediums d’expression de l’artiste, comme autant de canaux offrant une possibilité de contextualisations et d’analyses historiques et stylistiques. Les défis de cette édition résideront dans la capacité des contributeurs à renouveler le discours sur cette question « raciale » en s’éloignant du contexte étatsunien par exemple, et à proposer des approches disciplinaires ou pluridisciplinaires de la production sonore, chorégraphique, vidéographique et scénique de l’artiste, per se. C’est là tout l’enjeu des trois champs d’investigations et d’analyses qui sont proposés.

Réception et perception de la production jacksonienne hors des États-Unis

S’il n’est pas possible de dégager Michael Jackson de toute problématique identitaire et communautaire, et pour cause, il nous semble intéressant d’interroger l’effectivité et la validité de ces considérations hors des États-Unis, dans des pays où le marché du disque n’est pas forcément segmenté, où les agents et musiques issus des communautés et des marges côtoient, sans discrimination, les plus généralistes. L’identité de Michael Jackson et le caractère pluri-stylistique et décatégorisant de ses expressions artistiques ont-ils fait l’objet d’un traitement et d’une approche différents par le public ou les médias ? A-t-il été (ou est-il) possible d’y envisager son œuvre sous le même angle que la pop d’artistes comme Madonna, Whitney Houston, Prince, ou George Michael, c’est-à-dire au-delà de leurs contours identitaires (généralement moins conflictuels) ? Est-il parvenu, dans les pays d’Europe où il remportait de vastes succès (Angleterre, Italie, Allemagne, France) ou sur d’autres continents, à atteindre l’idéal artistique post-racial qu’il visait ? (McLaren 1992 : 77 ; Lewis Jones, 2005 : 233, 279-280)

Contextualisations historiques et impact contemporain

Les productions musicales, scéniques, vidéographiques et chorégraphiques de Michael Jackson constituent autant un jalon que le sommet d’une dynamique historique et séculaire d’évolutions stylistiques et d’emprunts combinatoires complexes alimentant désormais le supra-genre de la pop (Brackett 2000 : 68). Les conventions et influences qui innervent son œuvre sont nombreuses et traversent des champs disciplinaires aussi variés que la grande musique, le ballet, la comédie-musicale, les beaux-arts ou le cinéma. Certaines se sont même agrégées autour de son personnage charismatique jusqu’à en devenir indissociables et à être assimilés à une véritable signature. Et c’est essentiellement par deux médiums que cette esthétique kaléidoscopique et caméléon (Malela 2012 : 19) a été portée et popularisée massivement : les courts-métrages musicaux et la scène…

…Des courts-métrages souvent diffusés en mondovision et conçus avec un cahier des charges cinématographique dont on pourra se demander s’ils constituaient, de toute façon, une mutation inéluctable de leur fonction publicitaire initiale ou s’ils ont véritablement été déclencheurs d’un changement de paradigmes de la part d’artistes contemporains dont les vidéos ont souvent été mises en balance (Madonna aux USA, Duran Duran en Angleterre, A-Ha en Norvège, Mylène Farmer en France).

… Une scène pensée dans une certaine tradition d’art total, combinant spectacle vivant, live (musique, danse, cirque, magie) et technologie (vidéo, effets spéciaux), abolissant l’espace-temps (Smith 2012 : [1]) et créant un véritable espace de rituel, parfois codifié, et de communion spirituelle ou profane (Coman 2011). Une approche artistique marquée par des dynamiques pluridisciplinaire, poly-expressive, voire synesthésique (Harper 1989), le rattachant à des pratiques ethniques africaines autant qu’elles remettent en question les carcans et les échelles hiérarchiques entre les arts dits nobles et les plus commerciaux et populaires. Qu’en est-il de l’impact de ses spectacles pluridisciplinaires à grande échelle ? Comment ont-ils pu marquer, dès le Victory Tour en 1984, l’inversion des rapports de force entre artistes et organisateurs de concert qu’on leur reconnaît (Greenburg 2014 : 80-95 ; McLaren 1992 : 144-145) ? Est-ce le fruit d’efficaces stratégies de communication, d’une capitalisation sur un succès commercial déjà considérable doublé de contrats publicitaires lucratifs, d’un contenu artistique audacieux ? Ont-ils véritablement eu un effet sur la manière de penser et de promouvoir le spectacle pop ?

Héritage artistique

Enfin, l’œuvre de Michael Jackson mérite, près de 12 ans après sa disparition, d’être interrogée en tant que legs. Quelle est la teneur de l’héritage laissé par la conception artistique jacksonienne sur la scène actuelle ? Nombreux sont les artistes qui, ces dernières années, le citent comme influence ou le mettent en scène plus ou moins directement dans leurs productions musicales, textuelles ou visuelles (Bruno Mars, Chris Brown, Justin Bieber, Justin Timberlake, Usher, The Weeknd, Akon, Drake, Beyoncé, MKTO, Black M, Soprano, Christine and the Queens…). S’agit-il d’un simple outil de légitimation, de capitalisation artistique, de simples évocations nostalgiques, de clins d’œil ou s’agit-il d’une véritable pierre d’achoppement, des stigmates d’une pop marquée durablement par ses avancées et créations ? Existe-t-il un legs jacksonien et comment peut-il être défini ?

CONTRIBUTIONS

Pour entrer en résonance avec ces questionnements, les contributions pourront prendre la forme d’articles originaux, d’études de cas, d’analyses, de synthèses, d’entrevues ou de recensions dans ces champs disciplinaires connexes dont une liste non exhaustive suit :
° Sciences du langage : musicologie, chorégraphie

° arts visuels et vivants

° cultural studies

° sciences humaines et sociales : histoire, sociologie, et une diversité de champs connexes

° sémiotique et sémiologie

° littérature comparée

Processus de sélection et calendrier

La sélection des propositions se fera en deux temps.

° Du 1er février au 1er mars 2021 : envoi des abstracts et notices biobibliographiques

Les propositions de contribution devront comporter un titre et un résumé d’environ 400 mots maximum dans la langue habituelle de l’auteur. Elles devront être assorties d’une brève notice biobibliographique, n’excédant pas 150 mots.

° Du 1er mars au 10 mai 2021 : sélection des propositions.

Les propositions retenues feront l’objet d’un article de 35 000 signes maximum, espaces comprises. Une notification parviendra aux auteurs au plus tard le 10 mai 2021.

Les propositions d’articles, assorties d’une courte notice biobibliographique, sont à envoyer à nakancontributions@gmail.com.

Pour toute information nécessaire, merci d’adresser un email à nakancontributions@gmail.com.

www.nakanjournal.com


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Samedi 20 Février, 2021