23 juin 2021 —— Jean-Marc Warszawski.
Ferruccio Busoni, L'énigme, Steven Vanhauwaert (piano), Deux élégies, Indianisches Tagesbuch, Fantasia nach J. S. Bach, Contrappuntistica. Hortus 2020 (HORTUS 191).
Steven Vanhauswaert et né en Belgique, il est passé par le Conservatoire royal de Bruxelles, avant d’aller voir de l’autre côté de l’Atlantique, où un important concours à Los Angeles lance sa carrière. Depuis, ses récitals, concerts et classes de maître le mènent un peu partout dans le monde. Il met à ses programmes des compositeurs contemporains et vivants, et des œuvres qui ne courent pas les récitals et les éditions discographiques, comme le montre la dizaine d’albums qu’il a à ce jour enregistrés.
Ferruccio Busoni était un monstre sacré du piano connu aussi pour ses nombreuses transcriptions pour le piano des œuvres de Johann Sebastian Bach (mais aussi de Ludwig van Beethoven, Wolfgang Amadeus Mozart, Franz Liszt, etc.). Ce qui a occulté son œuvre de compositeur, bien entendu pour le piano, mais aussi pour grand orchestre, musique liturgique, musique de chambre, concerto, opéra… Son catalogue compte un peu plus de trois-cents numéros.
Il était également un penseur de son art, cherchant à dépasser le carcan de la forme et de la tonalité académique, sans être dans ses propres œuvres particulièrement radical de ce point de vue. L’artiste écrit-il, doit inventer des règles, mas n’en suivre aucune.
L’idée de cet album est de s’intéresser au compositeur avec des œuvres écrites entre 1907 et 1914. Busoni pensait avoir trouvé « sa vision personnelle » avec les six élégies (BV 249), composées en 1907 et publiées l’année suivante par Breitkopf & Härtel. La Berceuse (BV 252) composée en 1909, a été ajoutée plus tard, faisant passer les six élégies à sept.
Symboliquement et symétriquement, la première ouvre le programme, la septième le clôt. Les quatre numéros du premier livre de l’Indianisches Tagesbuch, Journal (intime) indien, nous mènent en demi-teintes vers Bach avec une fantaisie qui s’en inspire très librement et brillamment, jusqu’à la monumentale Fantasia Contrappuntistica, qui peut être la contribution imaginaire de Ferruccio Busoni à la partie de l’Art de la fugue que Bach n’a pas achevée.
Dans l’ensemble, l’oreille nous dit l’influence du dernier Liszt, la maîtrise du contrepoint, et Bach. On n‘est pas dans une musique qui développe ses thèmes, ou les mélodise, mais qui les promène et les dispose, comme des sujets de contrepoint, même en l’absence de contrepoint. Une harmonie qui ne brise pas les digues, mais qui tout de même prend des libertés avec ce qu’on appelle les hiérarchies tonales et les résolutions académiques, ajoutant à l’impression de promenade libre, sans parcours déterminé, sans programme ni climax dramatique.
Il y a des moments qu’un Érik Satie pourrait jalouser, d’autres dont les répétitifs ou les minimalistes pourraient réclamer l’héritage. Cette musique, originale, donne l’impression d’une simplicité servie par une technique et des possibilités virtuoses transcendantes. Il y a un sentiment d’intimité touchant et attachant, mais aussi la présence d’un grand architecte.
Jean-Marc Warszawski
23 juin 2021
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Mercredi 23 Juin, 2021 3:20