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Caen, 13 octobre 2019 —— Alain Lambert.

Un festival PAN !  percutant au château de Caen

Trois jours de jazz au château de Caen, une première pour cette 8e édition du festival du collectif régional, après la disparition de la Fermeture Éclair, lieu alternatif dans lequel il avait vite trouvé ses marques. Mais les villes changent, et les châteaux, passés un certain âge, leur résistent. Un cadre magnifique venu du XIIe siècle, et un auditorium confortable à la bonne acoustique dans le Musée des beaux arts.

Mean Steel au festival PAN! 2019. Photographie © Christian Mariette.

Le vendredi soir débute avec les norvégiens de Mean Steel, deux poly-instrumentistes jouant l'un, Ola Asdahl Rokkones, des saxs baryton et ténor, de l'ordinateur pour la bande son concrète, et un peu de grosse caisse, l'autre, Hans Urban Anderson, du baryton aussi, du violoncelle et de la batterie. Leur répertoire, les compositeurs de la Norvège du nord. Une musique très écrite qui sonne souvent paradoxalement comme du free jazz très improvisé. Une bonne initiation à la musique dite expérimentale, avec un humour très pince sans rire du saxophoniste, et en très bon français.

Fabrice Moreau au festival PAN! 2019. Photographie © Christian Mariette.

Un quartet ensuite, celui du batteur et compositeur Fabrice Moreau, déjà entendu à Caen avec Jean-Philppe Viret ou Airelle Besson. Le voilà en leader avec Ricardo Izquierdo au sax ténor, Jozef Dumoulin au piano, Matyas Szandai à la contrebasse pour un jazz très arrangé, tout en finesse, un jeu de reflets instrumentaux un peu à contre-jour pour s'y abandonner nuitamment. Tandis que dehors la lune brille au-dessus des remparts et que le vent est tombé.

Lê Quan Ninh au festival PAN! 2019. Photographie © Gérard Boisnel.

Le samedi débute en soirée par un gang chapeauté et tambouriné qui déambule dans l'enceinte, les Percus et Chemises. Dans le hall du Musée, l'improviste percussionniste Lê Quan Ninh a plein d'objets pour racler, frotter, chuinter son gros tambour, des cymbales, des pommes de pin, des tiges métalliques... et des baguettes aussi pour de temps en temps percuter. Les sons vont et viennent, naissent et se transforment dans cette lente sculpture des textures.

Darrifourq, Hermia, Ceccaldi, au festival PAN! 2019. Photographie © Christian Mariette.

Puis c'est le trio fou mené par Sylvain Darrifourq à la batterie avec Manuel Hermia aux saxophones et Valentin Ceccaldi aux quatre cordes et à l'archet, un jazz cyclorytmique qui peut passer de l'excès frénétique, sax enragé, violoncelle abrasif, tambours martelés à des plages plus bruitistes et attentives, du cri au silence. Un son très contemporain, tout à la fois hanté, habité et communicatif, qui prolonge en trio l'univers précédent du percussionniste solitaire.

Yoann Serra 4tet au festival PAN ! 2019. Photographie © Christian Mariette.

Un quartet plus classique les suit, celui du batteur et compositeur Yoann Serra, accompagné de Karim Bial au piano, Pierre Marcus à la contrebasse et David Sauzay au ténor, très convaincant, comme ses collègues, dans la recherche du son du quartet mythique de John Coltrane sans rechercher à reprendre les thèmes et les tics mais à retrouver l'esprit, les longues impros de saxo, le piano rythmique, la contrebasse puissante et la batterie offensive.

Eul'Swing au festival PAN ! 2019. Photographie © Lucie Thibert.

Le dimanche est dédié aux musiciens du collectif PAN, avec d'abord un ensemble tout terrain,  Eul'Swing, qui reprend les grands standards intemporels pour les enchanter encore et partout dans la région, jusqu'à St Vaast cet été, lors des Traversées Tatihou. Célestine Roland est au chant, Adrien Faure, polyvalent au piano et à la trompette, Jean-Baptiste Cosnefroy à la contrebasse et Nesta Mondelice à la batterie.

Avant les mots au festival PAN ! 2019. Photographie © Lucie Thibert.

Autre ambiance avec le duo Avant les mots, Guylaine Cosseron, voix et percussions et Emmanuel Ricard, percussions, un spectacle tout public, même pour les tous petits, ébahis devant ces deux musiciens improbables, l'une qui bruite façon dessins animés les objets divers qu'elle manipule, l'autre qui lui crée un décor percussif inouï. L'histoire sans parole progresse doucement vers les balbutiements et les vocalises de diva sur fond éthéré de structure Baschet. Un joli moment dans l'atrium du Musée sous le regard curieux des visiteurs du dimanche.

Le grand bal du festival PAN! 2019. Photographie © Lucie Thibert.

La soirée se clôt sous le barnum dehors quand finit l'averse et que le soleil revient. Plusieurs musicos du collectif ont invité des ami(e)s pour un bal plein de reprises plutôt rock et funky. Karine, Amélie, Agnès, Valery, Guylaine, Fady, Nesta, Bruno, Pascal, Simon, Yann, Samuel(s), Anthony, Walter, Isaac, Françoi(s), Manu, Adrien... Du reggae, de la valse, de la bossa, de Proud Mary à Harvest en passant par African Marketplace ou Pinball Wizzard, tous les goûts et tous les rythmes sont dans leur nature. Un beau festival, donc, et dans un chouette lieu.

Toujours dans l'auditorium du Musée, ce sera PAN l'automne le 22 novembre avec deux concerts, Dans les arbres, un quartet franco-norvégien et Frédéric Blondy en piano solo.

 

Alain Lambert
13 octobre 2019


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