Break the rules en répétition. Photographie © ORN.
Break dance et beatbox sont deux des nombreuses dimensions de la culture populaire américaine devenue universelle. L'Orchestre régional de Normandie a invité sur un répertoire classique trois danseurs hip-hop et un beatboxer, ce qui pourrait sembler étrange sinon paradoxal.
Quand le noir s'éclaire de bleu, les archets de l'orchestre sont sagement assis et débutent l'aria des variations « Goldberg » de Bach. Puis un premier danseur, Caesar Souamy vient esquisser quelques pas de menuet, bientôt rejoint par Cault N'Zelo qui l'observe ironiquement avant de le mimer, dans un style plus saccadé et swingué aussi, jusqu'à ce que le duo s'affranchisse ensemble des bonnes règles, s'amusant avec le public de ses nouvelles figures improvisées.
Sur le superbe concerto grosso d'Händel apparaît le 3e larron, Elias, parmi les musiciens, une sorte de violoniste automate qui semble s'endormir et basculer, et que les deux autres vont essayer de ranimer en divers tableaux mimés ou dansés.
Pendant l'interlude l'espace sonore revient tout entier à Mirsa, virtuose de la beatbox, micro contre les lèvres, capable de produire une multitude de rythmes et de sons qu'il peut aussi enregistrer et repasser tout en ajoutant ses variations.
Le second tableau s'ouvre sur la Symphonie de chambre de Chostakovitch avec l'orchestre en solo. Ensuite Mozart, Nino Rota et L'été de Vivaldi, nos trois performers inventent toutes sortes de figures syncopées, saccadées, ondulées, respirées, brisées, glissées, au ras du sol parfois sur des acrobaties d'Elias.
Dans l'intermède, l'altiste Cédric Catriss sort de l'ensemble pour les rejoindre, et les faire trembler en accentuant le vibrato des phrases de Vivaldi, avant d'improviser jazz, proposant des riffs que Mirsa vient enrichir et amplifier.
Le dernier tableau s'ouvre encore sur l'orchestre solo, la très belle Suite Holberg de Grieg. La Simple symphonie de Britten voit le retour des trois compères, particulièrement sur le 2e moment en pizzicato sans archets qui leur convient parfaitement. Sur L'hiver de Vivaldi, le chef, Dylan Corlay, cède la place au beatboxer qui met les musiciens debout pendant que les danseurs virevoltent et pirouettent comme des feuilles mortes ou des flocons.
Break the rules en concert. Photographie © ORN.
Après l'ovation finale du public, familial comme dab, autant conquis par les danseurs que par les musiciens, c'est une reprise de L'hiver où le pseudo-chef ne se contente pas de diriger, mais se mêle aux musiciens, y ajoutant ses étonnantes sonorités pulsées, une façon de faire qui existait aussi au XVIIIe quand le Normand Nicolas Chédeville, par exemple, ajoutait vielle à roue et musette à ses arrangements des Saisons amusantes. Une belle leçon de culture populaire.
À suivre à la Renaissance, le festival À partir du réel va se dérouler de la mi-décembre jusqu'en février, plutôt théâtre, mais avec trois moments musicaux et dansés : Cheptel le 16 janvier, La manufacture le 19 et Désobéir le 1er février.
Quant à l'ORN, il met en musique Buster Keaton à Saint-Aubin les Elboeuf le 14 décembre, à Mézidon Canon le 15, Tourlaville le 19, Bernay le 20 et Caen le 21. En janvier, ce sera Pierre et le loup au Québec, puis des valses, avant un hommage à Allain Leprest, mi-Cotentinais mi-rouennais trop tôt disparu, chanté par Clarika, Romain Didier, Cyril Mokaiesch et Enzo Enzo.
Alain Lambert
11 décembre 2019
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