Nicolas Simon. Photographie © D. R.
Plutôt venté Octandre, d'Edgar Varèse, malgré la contrebasse, où l'amorce de mélodies, entre grave et médium dans chacun des trois mouvements, très vite se perd dans l'intensité de la stridence, avec un flûtiau au paroxysme. Chacun des huit instruments passe du solo à l'orphéon exacerbé, et les sirènes du New York de 1924 ne sont jamais très loin dans cet univers vertical d'où les sons tentent de s'échapper en s'époumonant.
Plus reposée et boisée la pièce de Walter Feldmann, compositeur suisse contemporain, qui a « transformé en musique » en 2016 le poème Esquisse, « le froid » d'Anne-Marie Albiach en transposant sa structure interne, disposition sur la page, ponctuation, consonnes, voyelles... Une contrainte oulipienne qui vire au structuralisme spectral où même les instruments solistes, piano, harpe et surtout marimba, jouant des consonnes, participent de la densité générale sans jamais vraiment s'en dégager.
Le plaisir est plus simple et moins cérébral quand Nicolas Lethuillier, de passage dans son conservatoire d'origine, nous joue en bis au marimba solo la Gigue de la 4e suite pour violoncelle de Johann Sebastian Bach, pleine de vélocité et de résonances bien tempérées.
Nicolas Lethuillier. Photographie © Julien Benhamou.
Pour la Pastorale de Beethoven, intensité, densité et mélodie fusionnent dans une grande fête sonore et sensuelle, quand le compositeur se remémore les « impressions agréables en arrivant à la campagne », alors déjà presque sourd en 1808, n'ayant plus que ses souvenirs des sons divers de la nature. L'orchestre est pleinement quadriphonique, les variations des différents thèmes naissent, surgissent, se transforment d'un coin à l'autre et se combinent presque à l'infini. Même si la dimension descriptive est secondaire, on entend bien, en fin du second mouvement, les chants d'oiseaux, rossignol, caille et coucou, répétés au fond des bois, flûte, clarinette et hautbois. L'orage, qui réveille le percussionniste et la flûtiste piccolo, nous surprend en pleine fête. Avant le chant final, dont le contre-chant ravive le thème du premier mouvement.
Nicolas Simon est à la baguette, ou plutôt au crayon bleu et dirige la quarantaine d'instrumentistes avec souplesse et décontraction, tout comme il nous présente brièvement les œuvres en nous donnant les pistes essentielles pour mieux les entendre.
Retour de l'Orchestre de Caen dirigé par Vahan Mardirossian le 29 mai pour transfigurer la nuit avec Schönberg, Strauss (Richard) et Mahler. Puis le 26 juin pour chanter la nuit avec Elgar, Britten et Haydn. Les autres mardis seront principalement consacrés au Festival d'orgue annuel.
Alain Lambert
17 avril 2018
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