Mikołaj Zieleński, Rosarium Virginis Mariæ, ensemble La Tempesta, sous la direction de Jakub Burzyński. Divox 2018 (CDX 71401-6).
Enregistré à l'église évangélique réformée de Varsovie, du 21 au 24 juillet 2014.
Mikołaj Zieleński est un compositeur polonais actif au début du 17e siècle, peu connu au-delà de la Pologne, et pratiquement inconnu en France, où l’on est assez ignorant de nos voisins orientaux et de leur histoire.
On connaît d’ailleurs très peu de choses chose quant à sa vie, sinon ce qu’il en a écrit dans la préface de ses œuvres publiées en 1611 à Venise, sur les deniers de son patron, le Primat de Pologne, l’archevêque de Gniezno, mais on ne sait pas à quels lieux ses musiques étaient destinées, certainement à la chapelle privée du prélat à Łowicz, mais peut-être aussi à la cathédrale de Gniezno. L’ampleur et la démesure d’une partie de ses œuvres pourraient le laisser penser.
Il a composé 120 œuvres vocales (accompagnées ou non), réparties en deux cycles distincts pour l’année liturgique, le premier, l’Offertoria totius anni […], regroupe des œuvres monumentales à plusieurs chœurs et nombreuses parties au-delà des quatre traditionnelles, et les Communiones totius anni […] plus intimistes.
Jakub Burzyński qui dirige l'ensemble, a eu l’idée de présenter un choix d’œuvres de ces deux cycles, sous la forme, ou en illustration de la méditation du rosaire, un exercice de piété (et pédagogique), remontant saint Dominique (1170-1221). Cette « couronne de fleurs » ou « chapeau » d’où vient mot chapelet, évoque les moments importants du dogme chrétien du point de vue de Marie, assortis de 150 Ave Maria, grain après grain du chapelet. Ces épisodes sont classés en 3 en trois cycles : les « Mystères joyeux » (l'Annonciation, la Visitation, la Nativité, la purification de Marie, le recouvrement de Jésus au Temple), les « Mystères douloureux » (l'agonie de Jésus, la flagellation, le couronnement d'épines, le portement de la croix, la crucifixion et la mort de Jésus), les « Mystères glorieux » (la Résurrection de Jésus, l'Ascension, la Pentecôte, l'Assomption de Marie, le couronnement de Marie).
Ceci pour expliquer la forme, car il n’y a pas de prière du rosaire dans les cycles de Mikołaj Zieleński.
Jakub Burzyński est diplômé pour le piano, le chant soliste et la direction, des académies de musique de Kattowitz et de Bydgoszcz. Il a chanté de nombreux rôles sur les scènes d’opéra et a fondé l’ensemble La Tempesta en 1998.
La reconstruction du passé étant une chimère anti-historienne, nous ne nous arrêterons pas aux considérations historicistes (qui ne sont pas de la musicologie) mises en avant dans le livret (allemand, polonais, anglais), nous préférons saluer l’interprétation de Jakub Burzyński, qui place ce programme au niveau des plus belles choses réalisées en musique ancienne, de William Christie à Leonardo García Alarcón.
Ce cédé est un événement, par sa musique grandiose, magnifiquement sépulcrale et inquiétante à en frisonner, en adéquation avec les lourds décors religieux de l’époque et avec ce que nous savons d’offices théâtralisés à l’hystérie.
C’est un événement par la découverte d’un important compositeur, très influencé depuis la Pologne par le style italien, ce qui nous permet de rappeler qu’à l’occasion de la grande immigration des musiciennes et musiciens italiens du 17e siècle, les cours polonaises en accueillirent beaucoup. Le pays, alors sous la domination des Jagellon, connaissait son âge d’or.
C’est un événement par la découverte d’un ensemble musical du plus haut niveau, tant par ses instrumentistes que par ses superbes voix.
Mikołaj Zieleński, « Magnificat a 12 », extrait de l'Offertoria (ici la Visitation, Mystères joyeux). Plage 2 (extrait). Jean-Marc Warszawski
15 juin 2018
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Jeudi 31 Octobre, 2024