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28 novembre 2016, par Jean-Marc Warszawski ——

L'art du madrigal selon l'ensemble Voces suave

L'art du madrigal

L'arte del madrigale, Œuvres de Monteverdi, Luzzaschi, Agostini, Gesualdo, etc., ensemble Voces suave. Éditions Ambrobay 2016 (AMY 306).

Enregistré à Jujurieux, 13-17 avril 2016.

Voces Suaves est un ensemble vocal d'une dizaine de membres rassemblés par le baryton Tobias Wicky en 2012, essentiellement sortis de la Schola Cantorum Basiliensis, auxquels s'adjoignent, selon les besoins, des instrumentistes.

Leur répertoire de prédilection est la musique des xvie et xviie siècles, avec une petite préférence pour l'italienne.

Ils ont publié coup sur coup, en 2016, deux cédés. L'un consacré  à la messe  et aux psaumes opus 36 de Maurizio Cazzati, avec l'organiste Francesco Saverio Pedrini, étudiant puis professeur à la Schola Cantorum Basiliensis, directeur artistique de l'ensemble depuis sa création jusqu'en 2015.

Le second cédé, celui-ci, consacré au madrigal, illustré par les œuvres d'une dizaine de compositeurs de la seconde moitié du xvie siècle, tous italiens, y compris le flamand Giaches de Wert, arrivé dès l'enfance en Italie.

Le madrigal témoigne de la vitalité montante de l'aristocratie d'argent italienne, favorisant une acculturation savante profane, éblouissante, qui va rapidement coloniser les cours princières et la haute société de l'urbanité européenne. Les poètes italiens, dès le xive siècle, brisent le monopole du latin pour écrire en langue vernaculaire. On connaît l'importance des « trois couronnes », Dante, Pétrarque et Boccace, mais leur souvenir sera vite balayé par le retour en force du latin avec les humanistes. Le xvie siècle est l'âge d'or de la littérature italienne, où les auteurs ont le désir de « parler aux gens dans une langue qu'ils comprennent », le succès est grand, et le parler populaire des villes fonde une poésie  particulièrement expressive, au service des sentiments inter-humains et de la sensualité, mais aussi à la technique sophistiquée (sans parler du théâtre, de la comédie, de la comedia del arte). Les musiciens, pour donner par avance raison à Jean-Jacques Rousseau sur les relations de la langue et de la musique, s'y accrochent avec la volonté d'incorporer structurellement dans leur musique la puissance des textes poétiques, mais aussi celle de sophistiquer leur art. Ils systématisent les effets expressifs : l'aigu pour les sentiments hauts, la joie, le ciel, le grave pour la tristesse et la mort, les montées ou descentes en petits ou grands intervalles sont aussi significatifs, on s'empare des effets de l'orateur, mais on peut aussi mettre la note sol sur le mot soleil, ou trois notes si on exprime trois choses, opposer deux mouvements contraires pour évoquer la Croix ou les relations entre deux êtres, etc. Un art du symbolisme et du rébus qui produira des musiques à décrypter, pour un public averti, réservé, d'où les termes de « musica reservata » et de « musica secreta » qui peuvent être attachés au madrigal.

Si les madrigaux de Monteverdi ou de Gesualdo sont bien connus, on appréciera la présence d'œuvres plus rarement mises au pupitre comme celles de Giaches de Wert, Cyprien de Rore ou Agostini, Luzzaschi.

Voces Suaves a fait partie en 2014 des résidences Jeunes Ensembles du Conservatoire de région d'Ambronay. Il a été sélectionné en 2015 pour faire partie du programme eeemerging (ensembles européens émergents), a été en résidence au Festival Händel de Göttingen et au Seviqc Brežice de Ljubljana.

Lia Andres (soprano), Christina Boner-Sutter (soprano), Gabriel Jublin (alto), Jan Thomer (alto), Tobias Wicky (baryton), Davide Benetti (basse), Orí Harmelin (théorbe).

plume 4 Jean-Marc Warszawski
28 novembre 2016

 

1-2. Giaches de Wert; O Ha ninfe adorn'e belle ; Sorgi e rischiara al tuo apparir iI cielo.

3. Giovanni Giacomo Gastoldi, O Cantiam lieti, cantiamo.

4. Luzzasco Luzzaschi, I' mi son giovinetta.

5. Giaches de Wert, Vicino un chiaro e cristallino fonte.

6. Lodovico Agostini, Non t'aricordi.

7-8. Giaches de Wert, O Tirsi morir volea ; Del vago Mincio sull'adome sponde.

9. Cipriano de Rore, El Anchor che col partire. Théorbe solo.

10. Carlo Gesualdo da Venosa, Sento che nel partire.

11. Lodovico Agostini, O Vita délia mia vita.

12. Claudio Monteverdi, Sfogava con le stelle.

13. Luca Marenzio, Potrô viver io più.

14. Claudio Monteverdi, 0 come è gran martire.

15. Alessandro Piccinini, Passacaglia (tablature de lute)

16. Claudio Monteverdi, T'amo mia vita.

17. Lodovico Agostini, All' arm' all' arme.

18. Duca Guglielmo Gonzaga, Padre, che'l ciel, la terra e'I tutto reggi.

19-20. Giaches de Wert, Hor si rallegri il Cielo ; Nella Incoronatione del Sereniss. Sig. Duca di Mantova.


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