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Concert inaugural flamboyant de Cecilia Bartoli et des Musiciens du Prince à Monaco

Cecilia BartoliCecilia Bartoli. Photographie © OMC.

Annoncée lors d'une conférence de presse à l'ambassade de Monaco à Paris le 1er juin dernier, la création au sein de l'opéra de Monte-Carlo, d'un ensemble baroque sous la direction artistique de la mezzo-soprano Cecilia Bartoli suscitait de très nombreuses attentes. Le concert inaugural Georg Friedrich Haendel, donné vendredi 8 juillet dans la Cour d'Honneur du Palais princier en présence de S.A.S. Le Prince Souverain Albert II et de S.A.R. La Princesse de Hanovre, les aura superbement comblées.

En maître de cérémonie, après de chaleureux remerciements, Jean-Louis Grinda a brièvement rappelé l'exigeant calendrier qui attendait la diva et sa nouvelle formation : pas moins de cinquante tournées pour ce concert sans oublier « l'exportation » de La Cenerentola prévue en février 2017 à Monaco et la participation au Festival de Salzbourg. Le directeur de l'opéra de Monte-Carlo qui avait présenté en mai dernier les détails d'une éblouissante saison 2016-2017, pouvait légitimement s'enorgueillir de cette « naissance » en ces temps où les phalanges musicales ont plutôt tendance à disparaître.

Cecilia BartoliCecilia Bartoli et les Musiciens du Prince. Photographie © Alain Hanel, OMC, 2016.

Sous l'impulsion du Konzertmeister Ada Pesch, vingt-neuf musiciens venus du monde entier ont ensuite interprété en ouverture la « Battaglia » de Rinaldo (1711) HWV 7, permettant à la diva de faire une entrée solennelle par la galerie d'Hercule et atteindre la Cour d'Honneur par le grand escalier à double révolution inspiré de celui du château de Fontainebleau. Une diva qui saura tout aussi bien embrasser « comme du bon pain » ses musiciens après chaque morceau. Outre cette pièce, jouée toute en subtiles nuances, de l'acte 3 du célèbre opéra d'Haendel, les Musiciens du Prince nous ont littéralement charmé par des sonorités élégantes, raffinées, en particulier dans l'ouverture de l'oratorio Il Trionfo del Tempo e del Disinganno (1707) HWV 46a : une musicalité d'une douceur suave teintée d'un érotisme diffus. L'enchanteresse ondulation des violons annonce ce qui sera sans doute le moment vocal le plus émouvant de la soirée : une interprétation hors norme du « Lascia la spina » par Cecilia Bartoli. La mezzo-soprano y développe ses — toujours — étonnantes capacités de puissante incarnation des notes, celles aussi d'une vocalité intense, profondément et amoureusement inspirée, où la mélodie de cette ultime manœuvre séductrice du plaisir, pourtant mille fois entendue, devient une sorte d'orgasme intérieur susurré à l'auditoire par un dialogue vocal et instrumental pianissimo : fascinant et délicieux à la fois. Mais Cecilia Bartoli ne se contente pas d'exécutions intimistes comme dans l'air de Dafne « Felicissima quest'alma » d'Apollo e Dafne (ca. 1709-10) HWV 122 en compagnie du magistral flûtiste Jean-Marc Goujon. Elle sait aussi virevolter et jongler de vocalises en crescendi, en coordination millimétrée avec l'hautboïste Pier Luigi Fabretti dans l'air « M'adora l'idol mio » de Teseo (1713) HWV 9 ou bien encore se mesurer aux facéties instrumentales du hautbois (Pier Luigi Fabretti) et de la trompette (Thibaud Robinne) dans un époustouflant et vertigineux « Destero dall'empia Dite » d'Amadigi (1715) HWV 11. Des vocalises dont la mezzo-soprano s'était déjà joué avec une déconcertante aisance dans « Scherza un mar », l'air d'Adelaide de Lotario (1729) HWV 26 et dans le très connu « Da tempeste », l'air de Cléopâtre du Giulo Cesare in Egitto (1724) HWV 17.

Sous les ovations, dans cette soirée dont nous aurons néanmoins regretté la brièveté — nous réclamons toujours la quantité lorsque la qualité nous subjugue mais préconisons l'inverse en cas d'échec —, la diva nous aura néanmoins honoré de deux bis : « A facile vittoria » d'Agostino Steffani (1654-1728) et une petite scène avec son trompettiste qui se clôt par un inattendu — hélas quelques mesures seulement ! — « Summertime », extrait du Porgy and Bess de George Gershwin. Devrons-nous la suivre jusqu'au Concertgebouw d'Amsterdam puis au TCE de Paris pour l'entendre plus avant ?

Palais PrincierEntrée du Palais Princier. Photographie © D. R.

Monaco, le 9 juillet 2016
Jean-Luc Vannier


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Mardi 30 Juillet, 2024