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Michel Rusquet, Trois siècles de musique instrumentale : un parcours découverte —— La musique instrumentale de Beethoven à Schubert.

La sonate pour piano D 845 de Franz Schubert

schubert

L'œuvre instrumentale de Franz Schubert ; la musiqe de piano, les sonates ; D 157 ; D 279 ; D 459 ; D 537 ; D 557 ; D 566 ; D 567 ; D 568 ; D 571 ; D 575 ; D 613 ; D 625 ; D 664 ; D 784 ; D 840 ; D 845 ; D 850 ; D 894 ; D 958 ; D 959 ; D 960.

Voici la dernière des trois en la mineur, et en même temps la première sonate publiée du vivant du compositeur. D’humeur sombre et mélancolique, mais plus élégiaque et résignée que réellement tragique, elle se présente sous plusieurs aspects comme la sœur jumelle de la D 840  dont elle partage notamment le cadre en quatre mouvements (tous achevés cette fois), avec en premier un moderato et en dernier un rondo.

Rigoureusement architecturée, elle oppose un démenti à ceux qui, peut-être en raison de son contenu psychologique, ont voulu voir en elle moins une sonate qu’une immense fantaisie. Avec son thème scindé en deux éléments contrastants et complémentaires, et la présence répétée, et presque obsédante, d’une même cellule rythmique, le vaste moderato initial progresse avec une netteté  presque beethovénienne, de sorte que, dans cet univers à la fois mystérieux et désenchanté, la tension ne se relâche jamais, même si la passion reste contenue et ne s’élève que rarement à la violence.

L’andante poco moto qui suit (en ut majeur), avec son thème de Lied donnant lieu à cinq variations (seul cas de thème varié dans les sonates du compositeur), apporte un net apaisement ; toutefois, la troisième variation, qui vire au mode mineur, surprend par sa violence dramatique, et le thème même de ce mouvement « possède ce caractère chantant et limpide par lequel Schubert, tout comme Mozart, excelle à exprimer l’illusion du bonheur sur un fond de tableau enténébré. »23

Vient ensuite un long scherzo qui, sauf dans son trio élégiaque et pastoral, revient au la mineur et surprend par son côté « âpre et sauvage, aussi bien dans son rythme et ses accents dynamiques que dans ses brusques successions harmoniques. »24 Le rondo final (allegro vivace), qu’on a souvent rapproché de celui de la sonate en la mineur (K 310) de Mozart, témoigne d’un état de nervosité rarement rencontré chez Schubert ; ces deux morceaux « ne partagent pas seulement cette tonalité, mais le même rythme à 2/4, les mêmes croches affairées et fiévreuses, une écriture à deux voix, lucide, précise, étonnamment efficace, surtout la même continuelle angoisse, les mêmes éphémères éclairages du mode majeur. »25

Franz Schubert, Sonate en la mineur, D 845, opus 42, I. Moderato, II. Andante poco mosso, III. Scherzo, IV. Rondo, allegro vivace, Composée en mai 1825, éditée en 1826 par Anton Pennauer, dédicacée à l'archiduc Rudolph von Österreich, par Radu Lupu.

 

plumeMichel Rusquet
9 mars 2020

© musicologie.org

Notes

23. Harry Halbreich, dans Tranchefort François-René (dir.), « Guide de la musique de piano et de clavecin », Fayard, Paris 1998, p. 670.

24. Massin Brigitte, Franz Schubert, Fayard, Paris 1977, p. 1103.

25. Sacre Guy, La Musique de piano, Robert Laffont, Paris 1998, p. 2488-2489.

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