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Yves Chartier, Professeur d'histoire de la musique à l'Université d'Ottawa : Documents pour servir à l'histoire de la théorie musicale.

Isidore de Séville (v. 560-636) : Originum sive Etymologiarum lib. III, xv-xxiii : De Musica (v. 615)1

Saint-Isidore, archevêque de Séville. Né à Carthagène ou à Séville vers 560, mort à Séville le 4. IV. 636. Issu d'une éminente famille hispano-romaine qui donna à l'Église deux autres évêques ─ ses frères Léandre, son prédécesseur au siège épiscopal de Séville, qui l'éleva, et Fulgence, évêque d'Astigi ou Ecija, ─ Isidore est, avec S. Augustin. Boèce, Cassiodore et S. Grégoire le Grand, l'une des figures les plus importantes du haut Moyen Age. Véritable restaurateur de la culture antique et patristique, il a laissé une œuvre abondante et variée où l'on trouve des indications précieuses pour la musicologie, en particulier dans son traité sur les devoirs ecclésiastiques (De ecclesiasticis officiis), où il se révèle un observateur attentif de la liturgie hispanique ou mozarabe, et dans sa grande encyclopédie didactique, Originum sive Etimologiarum libri XX, où une section entière est consacrée à l'harmonique ou science de la musique (lib. III, ch. 15-23). Contrairement à Cassiodore, qu'il suit pourtant de près, Isidore définit la musica à la fois comme une discipline intellectuelle (scientia) et une technique acquise par la pratique (ars, peritia), mentionne ses"inventeurs"bibliques (Tubal) et antiques (Pythagore, Amphion), note son influence sur les hommes (David calmant la fureur de Saül) et les animaux, et propose une double division tripartite qui fera fortune: d'après Cassiodore d'abord, par respect de la tradition scolaire (musica harmonica, rhythmica, metrica), ensuite d'après S. Augustin, mais en référence à la musique pratique : musica harmonica, organica, rhythmica ─ musique de la voix, des instruments à vent, à cordes et à percussion. Cette classification est complétée par un petit lexique de termes techniques, des considérations sur les différents timbres de la voix humaine et sur les proportions arithmétiques des consonances.

L'influence d'Isidore fut immense et ses Etymnologiae devinrent l'encyclopédie par excellence de l'Europe médiévale, comme en témoigne la quantité exceptionnelle de manuscrits existants (plus de 1100). Malgré un certain désordre dans la présentation des sources, son traité constitue la première tentative ─ encore timide et maladroite, certes, ─ de rapprochement entre la lettre morte de la théorie antique et la pratique vivante de son temps, qui donnera naissance, à l'époque carolingienne, à la formulation d'une grammaire musicale renouvelée.

Éditions

Opera omnia, dans Migne, Patrologia Latina, t. 81-84 ; Etymologiarum ... Libri XX, éd. W. M. Lindsay, Oxford, 1911, 2 vol. (réimpr. 1957 ; éd. reprise et corrigée par José Oroz Reta & Manuel-A

Marcos Casquero, San Isidoro de Sevilla, Etimologías, Edicion bilinguë I, Madrid, La Editorial Católica, 1982 (Biblioteca de Autores Cristianos, 433)

éd. critique ss la dir. de J. Fontaine dans la coll. ALMA (Auteurs latins du Moyen Age, Paris, Les Belles Lettres, 1981 -).

La section sur la musica dans M. Gerbert, Scriptores I, 20-25.

Concordance

Ana-Isabel Magallón Garcia, Concordantia in Isidori Hispaliensis Etymologias. A Lemmatized Concordance to the Etymologies of Isidore of Sevilla, Hildesheim, Georg Olms, 1995, 4 vol. (XXIV-2106 p.) (Alpha-Omega, Reihe A, Bände CXX, 1-4).

Bibliographie

P. Séjourné, Le dernier Père de l'Église : Isidore de Séville, Paris, 1929 ; W. Gurlitt,"Zur Bedeutungsgeschichte von musicus und cantor bei Isidore von Sevilla", in Akademie der Wissenschaften und der Literatur in Mainz, 1950

F. J. Léon Tello, "La teoria de la musica en las Etimologias", Saitabi 8 (Valencia, 1950), 48-58, et dans Musica I/2 (Madrid, 1952), 11-28

H. Hüschen, "Der Einfluss Isidors von Sevilla auf die Musikanschuung des Mittelalters", in Miscelanea en homenaje a Mons. A. Anglés I (Barcelone, 1958-61), 397-406

J. Fontaine, Isidore de Séville et la culture classique dans l'Espagne wisigothique, Paris, Études Augustiniennes, 1959, 2 vol. (fondamental ; 2e éd. révisée, 1985)

H. Avenary, "Musikalische Analecta aus Isidors Etymologiae: Campana, Tubae ductiles, Puncti", Die Musikforschung 21 (1968)

H. D. Goode & G. C. Drake, Cassiodorus : Institutiones Book II, chap. 5 ─ Isidore of Sevilla : Etymologies Book III, chap. 15-23, Colorado College Music Press, 1980 (Translations Series, XII).

Synopsis

Définition et étymologie de la musique (XV.)

Les découvreurs de la musique (XVI.)

Le pouvoir de la musique (XVII.)

Les trois parties de la musique (XVIII.)

La triple division de la musique (XIX.)

Terminologie musicale (XX).

Organologie (XXI-XXII).

Les proportions musicales (XXIII.).

Le Texte

XV. Définition et étymologie de la Musique.

1. La musique est la connaissance pratique [peritia] de la mélodie2et se compose de son et de chant. Le mot 'musique' dérive des Muses. Les Muses, en effet, tirent leur nom de μασαι, qui signifie 'chercher'3, car c'est par leur intermédiaire, ainsi que l'ont soutenu les Anciens, que le pouvoir de la poésie lyrique et du chant a été "recherché".

Parce qu'ils sont une réalité sensorielle, les sons musicaux s'évanouissent et passent dans le temps mais s'impriment dans la mémoire. Voilà pourquoi les poètes ont imaginé que les Muses étaient filles de Jupiter et de Mémoire4. Si l'homme, en effet, ne les retient pas dans sa mémoire, les sons périssent, car on ne peut les écrire5.

XVI. Les découvreurs de la musique.

1. Moïse dit que le découvreur de la musique fut Tubal6, descendant de Caïn, avant le Déluge. Les Grecs, eux, disent que"Pythagore7 découvrit les fondements de cette science [artis] dans les sons produits par des marteaux et en frappant <du plectre sur> les cordes tendues". D'autres rapportent que Linus8 de Thèbes ainsi que Zéthus et Amphion ont été les premiers musiciens illustres.

2. Après eux, peu à peu, la pratique de cet art [disciplina] fut notamment soumise à des règles particulières [directa] et perfectionnée de bien des façons, et il était aussi honteux9 d'ignorer la musique que la lecture et l'écriture. C'est que la musique faisait alors partie intégrante non seulement des cultes, mais aussi de toutes les fêtes religieuses et de toutes les rémonies, joyeuses ou tristes, de la vie.

3. Et de même que, dans les actes cultuels, on chantait des hymnes, ainsi, dans les mariages, on chantait des hyménées10 et, dans les funérailles, des thrènes et des lamentations au son des tibiae11. Dans les banquets également, on se passait la lyre ou la cithare à tour de rôle, et chaque convive devait, son tour venu, entonner une chanson de table.

XVII. Le pouvoir de la musique.

1. Ainsi donc, sans la musique, aucune science ne peut être tenue pour parfaite, car rien n'existe sans elle12. On dit, en effet, que le cosmos lui aussi a été ordonné grâce à une sorte d'harmonie musicale, et que le ciel lui-même accomplit ses révolutions sous l'effet d'une mélodie harmonieuse.

2. La musique émeut la sensibilité, excite les passions opposées. Dans les batailles aussi, la sonnerie des trompettes enflamme les combattants, et plus leur éclat est violent, plus l'ardeur à combattre s'entrouve renforcée. S'il est vrai que le chant stimule aussi les rameurs, la musique incite également l'esprit à supporter les tâches pénibles, et un chant mélodieux soulage la fatigue de n'importe quel labeur.

3. La musique apaise encore les esprits excités, ainsi qu'on le lit de David13, qui, grâce à sa science [arte] du chant, arracha Saül à l'esprit impur. La musique incite aussi les bêtes sauvages, non moins que les serpents, les oiseaux et les dauphins, à écouter ses modulations."Et toutes nos paroles, tous les mouvements intérieurs liés à notre pouls, sont à l'évidence associés aux pouvoirs de la musique par le truchement des rythmes musicaux"14.

XVIII. Les trois parties de la musique.

1."Les parties de la musique sont au nombre de trois15 : l'harmonique, la rythmique et la métrique. L' harmonique est la partie qui, dans les sons, départage [distingue] l'aigu du grave. La rythmique est celle qui examine la rencontre des mots pour voir s'ils s'accordent bien ou mal ensemble. 2. La métrique est celle qui, grâce à des proportions démontrables, dévoile la mesure des divers mètres, tels, par exemple, l'héroïque16, l'ïambique, l'élégiaque, et tous les autres".

XIX. La triple division de la musique.

1. Pour produire tous les sons qui forment la substance des mélodies, la musique se présente sous trois formes. La première est l' harmonique, que constitue l'art vocal. La deuxième est l' organique [l'instrumentale], que produit le souffle <des instruments à vent>. La troisième est la rythmique, qui reçoit ses rythmes de la pulsation des doigts <sur les cordes>.

2. En effet, le son est émis soit par la voix <humaine>, comme dans le gosier, soit par le souffle, comme dans la trompette ou la tibia, soit par la pulsation, comme dans la cithare ou tout autre instrument dont la sonorité résulte de la percussion17.

XX. Première division : l'harmonique.

1. La première division de la musique est l'harmonique, c'est-à-dire la modulation de la voix : elle concerne les comédiens, les tragédiens, ou encore les choristes ou tous ceux qui pratiquent l'art vocal. L'harmonique produit un mouvement à partir de l'âme et du corps, et par ce mouvement est engendré le son musical qui, chez l'Homme, prend le nom de voix.

2. La voix est de l'air frappé par un souffle, d'où le mot 'verbe'18. Au sens propre, le mot `voix' appartient aux êtres humains ou aux animaux dépourvus de raison. Quant aux autres êtres, c'est abusivement et non au sens propre qu'on qualifie de voix leur sonorité, comme <dans les expressions>:"la voix de la trompette a retenti";"les voix <des flots> brisés contre la côte"19 . C'est qu'il est approprié de dire que"résonnent"les écueils du rivage ; et encore :"Mais la trompette, de son airain sonore, <fait retentir> au loin son chant terrifiant"20. L' harmonique est la modulation de la voix et l'accord ou la réunion de plusieurs sons21.

3. La consonance [symphonia] est une combinaison mélodique de sons qui s'accordent au grave et à l'aigu, soit dans le chant [voce], soit dans le souffle <des instruments à vent>, soit dans la percussion <des instruments à cordes>. C'est grâce à elle que les voix aiguës et graves s'accordent bien ensemble, et si l'on s'écarte de la consonance, le sens de l'ouïe s'en trouve heurté. Son contraire est la dissonance [diaphonia], <rencontre> de voix incompatibles et discordantes.

4. L' euphonie [euphonia] traduit la douceur de la voix. L'euphonie et la mélodie [melos] tirent leurs noms des mots"douceur"[suavitas] et"miel"[mel].

5. L'intervalle [diastema] est un écart [spatium] mélodique placé entre deux ou plusieurs sons.

6. Le diesis consiste en certains intervalles ainsi qu'en inflexions mélodiques et en modulations d'un son à un autre.

7. Le ton [tonus] est une intonation [enuntiatio] de la voix sur une hauteur donnée [acuta]. Il représente, en effet, la différence et la quantité de la mélodie qui résulte soit de l'élévation, soit de l'abaissement de la voix ; les musicistes [théoriciens] ont divisé le ton en quinze parties, dont l'hyperlydien est le dernier et le plus aigu, l' hypodorien le plus grave de tous.

8. Le chant [cantus] consiste en une inflexion de la voix : c'est que le son, en soi, est"continu"22 ; et le son précède le chant.

9. L' arsis est une élévation de la voix, c'est-à-dire une `intonation'. La thesis est un abaissement de la voix, c'est-à-dire une"cadence conclusive".

10. Les voix agréables [mélodieuses] sont délicates et riches, claires et hautes. Les voix claires [diaphanes] sont celles qui portent loin et remplissent un lieu de façon continue [continuo], telle une sonnerie de trompettes.

11. Les voix délicates sont celles auxquelles fait défaut un large souffle, telles les voix des petits enfants, des femmes et des malades. Il en est de même pour les cordes : les plus minces émettent des sons délicats et grêles.

12. Les voix riches [fortes, pingues] sont des voix d'où sort d'un seul trait un souffle abondant, telles les voix masculines. La voix aiguë est mince et haute, telle qu'on peut l'observer dans les instruments à cordes. La voix dure [dura] projette les sons avec violence, à l'instar du tonnerre ou des sons de l'enclume lorsque le marteau frappe le dur métal.

13. La voix rude [aspera] est rauque et se propage par émissions réduites et indistinctes. La voix"voilée"[caeca] est une voix qui, aussitôt exhalée, s'éteint complètement et, ainsi étouffée, c'est en vain qu'elle essaie de se prolonger, comme <le son émis par> des récipients de terre. La voix efféminée [vinnola] est une voix délicate et souple. Le mot vinnola vient de vinnus, qui désigne une boucle de cheveux délicatement frisée.

14. La voix parfaite, enfin, est haute, agréable [mélodieuse] et claire : haute, pour pouvoir atteindre un registre élevé ; claire, pour combler l'oreille ; mélodieuse, pour caresser l'âme des auditeurs. Si l'une de ces qualités fait défaut, la voix ne peut être dite parfaite.

XXI. Deuxième division : l'instrumentale (Organica).

1. La deuxième division est l'Instrumentale: <elle se manifeste> dans les instruments"qui, remplis d'un souffle, s'animent à l'image de la voix humaine : tels sont les trompettes, les chalumeaux, les flûteaux, les orgues, les pandores, et autres instruments semblables"23.

2. Organum est le terme général qui désigne tous les instruments de musique. Si l' organum est pourvu de soufflets, les Grecs le désignent alors sous un autre nom. Pour revenir au mot organum, celui-ci est le terme le plus usuel chez les Grecs <pour désigner un instrument>23a.

3. La trompette [tuba] a été, à l'origine, inventée par les Étrusques, dont Virgile a dit:"La clameur de la trompette étrusque gronde à travers les airs"24. On l'utilisait non seulement dans les combats, mais aussi dans toutes les festivités en raison de sa sonorité claire, flatteuse et joyeuse. D'où vient qu'il est dit dans le Psautier :"Sonnez la trompette au début du mois, au jour de votre fête solennelle"25. Les juifs, en effet, avaient l'obligation de sonner de la trompette au début de la nouvelle lune, ce qu'ils font encore de nos jours.

4. On rapporte que les tibiae ont été inventées en Phrygie ; qu'elles ont même été longtemps utilisées seulement dans les cérémonies funèbres, mais, par la suite, dans les rituels païens aussi. Les tibiae, croit-on, ont été ainsi nommées du fait qu'à l'origine, elles étaient faites de tibias de cerfs et de pattes de faons. Par la suite, on se mit à appeler ainsi, par abus de langage, même celles qui n'étaient pas faites avec les os de pattes d'animaux. D'où le mot tibicen [joueur de tibia], d'après le chant des tibiae.

5. Le chalumeau [calamus] est, à proprement parler, le nom d'un arbuste : il fut dénommé à partir du verbe `appeler' [calare], c'est-à-dire :"émettre des sons".26

6. Certains pensent que le pipeau [ou flûteau, fistula] a été inventé par Mercure, d'autres par Faunus, que les Grecs appellent Pan. D'autres attribuent son invention à Idis, berger d'Agrigente en Sicile27. Cet instrument est appelé fistula parce qu'il émet des sons. En grec, en effet, φ¢ς signifie `voix' [ou `note'], et στoλια, 'émission'28.

7. La sambyque [sambuca] est, selon les musicistes, une sorte de tambour [symphoniarum]29. Elle est faite d'une espèce de bois tendre dont on fabrique les tibiae. 8. La pandore tire son nom de son inventeur, dont Virgile a dit :

Pan, le premier, joignit des roseaux par la cire ;
Pan protège les brebis et leurs pasteurs30.

Chez les païens, Pan fut, effectivement, un dieu pastoral qui, le premier, assembla des roseaux de longueur inégale pour les faire chanter et les construisit [réunit] avec un art consommé.

XXII. Troisième division : la Rythmique.

1. La troisième division, la Rythmique, a trait aux instruments à cordes et à percussion : à cette catégorie appartiennent les diverses espèces de cithares ainsi que le tambourin, la cymbale, le sistre, les vaisseaux [acitabula] d'airain et d'argent ou les autres objets qui, frappés à l'aide d'un morceau de dur métal, tintent mélodieusement, et tous les autres de la même espèce31.

2. Tubal, ainsi que nous l'avons rapporté ci-dessus32, est tenu pour l'inventeur de la cithare et du psaltérion. Chez les Grecs, toutefois, on croit que l'usage de la cithare aurait été l'invention d'Apollon. A l'origine, la forme de la cithare était, dit-on, semblable au thorax humain parce qu'on en faisait sortir le son à l'instar de la voix qui sort de la poitrine, et c'est pour cela qu'elle fut appelée ainsi. Le mot 'poitrine [thorax]', en effet, se dit κίθαρα33 en dialecte dorien.

3. Avec le temps, plusieurs types de cithares apparurent, tels les psaltérions34, les lyres, les barbitons, les cithares phéniciennes, les pektis et les cithares dites indiennes, qui sont jouées par deux <instrumentistes> en même temps. Il y a bien d'autres sortes de cithares, ou de forme carrée, ou de forme triangulaire.

4. Le nombre de cordes augmentant, les types <de cithares> se modifièrent. Ainsi, les Anciens nommèrent la cithare fidicula35et le joueur de lyre fidicen, parce que ses cordes s'harmonisent entre elles aussi bien que s'accordent des personnes entre lesquelles règne la bonne foi. La cithare antique possédait sept cordes. D'où également l'allusion de Virgile aux"sept sons distincts"<de la cithare>36.

5."Distincts", en effet, parce qu'aucune corde ne rend le même son que sa voisine immédiate. Et si ces cordes sont au nombre de sept, c'est ou bien parce qu'elles couvrent le registre complet de la voix, ou bien parce que le ciel résonne du chant des sept planètes37.

6. Le mot `corde' [chorda] vient de `coeur' [cor, cordis] parce que, de même que bat le coeur dans la poitrine, ainsi les cordes vibrent sur la cithare. Mercure, le premier, imagina les cordes et, le premier encore, fit rendre à des nerfs un son musical.

7. Le psaltérion, appelé communément canticus, tire son nom du verbe psallere38 parce que le choeur répond à l'unisson [consonando] à sa mélodie [vocem]. Il ressemble à une cithare barbare39, en forme de delta (Δ). Mais entre le psaltérion et la cithare, la différence est la suivante : le psaltérion est pourvu, à sa partie supérieure, d'une caisse de résonance faite de bois concave ; les cordes sont frappées au bas <de l'instrument>, mais les sons en sortent par la partie supérieure. La caisse de résonance de la cithare, elle, est à la partie inférieure de l'instrument. Les Hébreux ont usé d'un psaltérion à dix cordes [decachordon] parce que les commandements du Décalogue40 sont au nombre de dix.

8.Lyre se dit d'après λύρε_v, c'est-à-dire, d'après la variété des notes, parce qu'elle produit toute une variété de sons41. On dit que la lyre a été inventée, à l'origine, par Mercure, de la façon suivante : en se retirant dans son lit, le Nil avait laissé dans les champs divers animaux, parmi lesquels une tortue. Celle-ci se décomposa et ses nerfs demeurèrent tendus à l'intérieur de son écaille, qu'en frappant Mercure fit résonner. Sur ce modèle, Mercure fabriqua une lyre et la donna à Orphée, qui était passioné par cet instrument.

9. C'est pourquoi l'on croit qu'Orphée, grâce à son art, put charmer par les modulations de son chant, non seulement les bêtes sauvages, mais aussi les rochers et les forêts42. En raison de leur passion pour l'étude <de la musique> et en hommage à la poésie lyrique, les musiciens ont imaginé, parmi leurs fictions mythologiques, de la placer parmi les constellations43.

10. Le tambourin [tympanum] consiste en une peau ou une membrane de cuir tendue sur un seul côté d'un <cadre de> bois. C'est, en effet, une sorte de demi-tambour [symphoniae] qui ressemble à un crible. Le tympanon est ainsi appelé parce qu'il est un demi-tambour. (Voilà pourquoi une demi-perle est aussi appelée tympanum.)44A l'instar du tambour [symphonia], le tympanon est frappé à coups de petite baguette.

11. Les cymbales [cymbala] sont de petits vaisseaux [acitabula] qui, lorsqu'on les frappe, se touchent entre eux et résonnent. Elles sont appelées `cymbales' parce qu'elles sont frappées en même temps que l'on danse [cum ballematia]. (En grec, en effet, 'avec' se dit συv, et 'danse', βαλ)45.

12. Le sistre [sistrum] tire son nom de son inventrice. On assure, en effet, qu'Isis, une reine égyptienne, en fit la découverte. Juvénal <écrit> :"Puisse Isis frapper mes yeux de son sistre courroucé"46. Voilà pourquoi les joueuses de sistre sont des femmes, puisque l'inventrice de cet instrument fut une femme. Voilà pourquoi également, chez les Amazones, leur armée de femmes était appelée [convoquée] au combat au son du sistre.

13. Le carillon [tintinabulum] tire son nom de son timbre, de même que l'applaudissement dérive des sons de la main, et le son strident de celui des portes à battants [valvarum].

14. La symphonia est le nom courant d'un instrument fait de bois évidé sur lequel des membranes sont tendues des deux côtés et que les musiciens frappent de part et d'autre à l'aide de petites baguettes, produisant ainsi, par la combinaison harmonieuse des sons graves et des sons aigus, une sonorité [cantus] des plus agréables.

XXIII. Les proportions musicales47.

1. Voici comment on calcule les rapports numériques applicables à la musique. Si tu poses comme termes extrêmes les nombres 6 et 12, tu vois qu'entre 12 et 6, la différence est de 6. Élève 6 au carré : 6 fois 6 font 36. Additionne les deux extrêmes : 6 plus 12 font ensemble 18. Divise 36 par 18 : tu obtiens 2. Ajoute ce nombre au plus petit terme, qui est 6: le total sera 8, qui constitue le moyen terme entre 6 et 12. Ainsi, 8 dépasse 6 de 2, c'est-à-dire du tiers de 6, et 12 surpasse 8 de 4, c'est-à-dire du tiers <de 12>. 8 est donc dépassé dans la même proportion qu'il dépasse <le nombre 4>.

2. Cette proportion, de même qu'elle se trouve dans l'univers en vertu de la révolution des sphères, prévaut également dans le microcosme, et bien au-delà de la musique produite par la voix [vocem], à tel point que sans la perfection de cette proportion <musicale> l'homme, étant dépourvu de cette harmonie, ne peut subsister48. Grâce à la perfection de cette harmonie musicale, les mètres [metra] aussi reposent sur l' arsis et la thesis, c'est-à-dire l'élévation et l'abaissement <de la voix>.

Notes

1.Édition critique utilisée : José Oroz Reta & Manuel-A. Marcos Casquero, S an Isidoro de Sevilla, Etimologías, Edicion bilinguë I, Madrid, La Editorial Católica, 1982 (Biblioteca de Autores Cristianos, 433), p. 442-455, qui reprend en la retouchant l'éd. de W. M. Lindsay, Oxford, 1911 (Scriptorum Classicorum Bibliotheca Oxoniensis ; édition non paginée). Autres éditions, non critiques: Gerbert, Scriptores I, 19-25 ; Migne, Patrologia Latina 82.163-169. ─ Traductions anglaises de ce chapitre : Oliver Strunk, in Source Readings in Music History, New York, Norton, 1950, p. 93-100 ; nouv. éd. 1998, p. 149-155 (trad. révisée par James McKinnon) ; Helen D. Goode et Gertrude C. Drake, in : Colorado College Music Press, Translations n° 12 (Colorado Springs, 1980), p. 13-20 (avec annotations minimales). Traduction de III. xv dans Ruth Halle Rowen, Music Through Sources and Documents, Englewood Cliffs, Prentice-Hall, 1979, p. 40-42. Il n'existe encore aucune traduction française intégrale de la grande encyclopédie d'Isidore de Séville, mais une nouvelle édition critique (avec traduction) est en cours depuis 1981 aux Éditions Les Belles Lettres de Paris (coll. A.L.M.A. : Auteurs Latins du Moyen Age), sous la direction du P r Jacques Fontaine. Traductions espagnoles : Luis Cortés y Góngora, Madrid, La Editorial Católica, 1951 (Biblioteca de Autores Cristianos), p. 82-87, et J. Oroz Reta, op. cit.

2. modulationis : de modus, tout ce qui a trait à la mesure des sons et des rythmes.
Sources d'Isidore (d'après J. Fontaine) : Censorin, De die natali X, 3 ; XI, 1 (Migne, PL 33.726) ; Augustin, Epist. 166 ; Cassiodore II. v. 1 (d'après Varron). Parallèles : Martianus Capella IX, 930; Isidore II.xxiv.15 ; Diff. II, 39 (Migne, PL 83.94b ; 190b) ; Aurélien de Réôme, Musica Disciplina, chap. II.

3. Étymologie fantaisiste, empruntée textuellement à Cassiodore (II.v.1), qui perpétue une tradition remontant à Platon (Cratyle, 406a). Cf. aussi Quintilien I. x. 22.

4. En grec : Mnémosyne, déesse de la mémoire. Isidore suit ici de très près Augustin, De ordine II, 14 (Migne, PL 32.1014). ─ Que la musique soit étroitement liée à la mémoire est un thème récurrent dans la poésie comme dans la littérature scientifique. Cf. Edmond Rostand, A la musique :"Mère du souvenir et nourrice du rêve, c'est toi/Qu'il nous plaît aujourd'hui d'honorer sous ce toit..."(musique pour choeur de voix de femmes de Chabrier) ; Claude Lévi-Strauss :"(...) comme l'a bien montré Proust, le plaisir musical survit à l'exécution et peut-être même atteint-il sa plénitude après : dans le silence rétabli, l'auditeur se retrouve saturé de musique, submergé de sens, en proie à une sorte d'envahissement qui le dépossède de son individualité et de son être : devenu le lieu de la musique, comme la statue de Condillac était odeur de rose"(L'Homme nu, Paris, 1971, p. 586).

5. Cette petite phrase, souvent citée, a beaucoup excité la sagacité des commentateurs, qui y ont vu tantôt la preuve que la notation musicale n'existait pas au temps d'Isidore, tantôt le contraire [en ce sens : H. Anglés, in The New Oxford History of Music II (Londres, 1954), p. 106]. A juste titre, la première opinion semble prévaloir. Parallèles : Isidore, III. iv. 3 ; Augustin, De ordine II, 4.

6. Genèse IV, 21 ("Jubal, ancêtre de tous ceux qui jouent de la lyre et du chalumeau"). Isidore évoque encore Tubal [Jubal, Iubal] dans sa Chronica, ch. XIV (MGH, Auct. Antiq. XI, 428 = Migne, PL 83.1020B), et Victor Hugo fait allusion à cette légende dans son beau poème, La conscience, v. 35-36:"Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs / Soufflant dans des clairons et frappant des tambours ..."(La Légende des Siècles, I).

7. Ce passage est tiré textuellement de Cassiodore, II. v. 1 ; cf. Macrobe, In Somn. Scip. II. i. 13.

8. Linus de Thèbes : fils légendaire d'Amphimaros et d'une muse (Uranie, Calliope ou Terpsichore), on lui attribue l'invention du rythme et de la mélodie. Il aurait été le maître d'Héraclès (Hercule). Une légende tardive fait de lui le fils d'Hermès (Mercure) et le frère d'Orphée. Rival d'Apollon par la beauté de son chant, il aurait été tué par ce dernier. Cf. Hygin, Fabulae, 161.

Zéthus : frère jumeau d'Amphion, il s'adonnait à l'agriculture, à l'élevage et à la lutte plutôt qu'à la musique.

Amphion : fils de Zeus (Jupiter) et d'Antiope, il aurait reçu d'Hermès une lyre. Apollon, jaloux de son talent, l'aurait tué. Cf. Odyssée XI, 260 ; Pline, Hist. Nat. VII, 204 ; Ovide, Métamorphoses VI, 271; Hygin, fables 7 à 11 et 14. Tous ces noms figurent également chez Jérôme, dans sa traduction de la Chronique d'Eusèbe, ann. 596 (Migne, PL 27.208), tout comme chez Isidore, Chronica 63 (MGH, Auct. Antiq. XI, 435 = Migne, PL 83.1027A).

9. Chez les Grecs, en effet, mousikos signifie aussi bien `cultivé' que `musicien'. Son contraire, amousos, signifie 'inculte', 'ignare'. Cf. H.-I. Marrou, MOUSIKOS ANER, Étude sur les scènes de la vie intellectuelle figurant sur les monuments funéraires romains, Rome, 2e éd. 1964. ─ Sur les"progrès"des disciplines artistiques, cf. Aristote, De sophisticis elenchis, XXXIV.

10. Hyménées : poèmes grecs destinés à célébrer un mariage. Thrènes : lamentations funèbres chantées par les femmes grecques. Cette coutume existe encore aujourd'hui non seulement en Grèce, mais aussi en Sicile et dans de nombreux pays du Proche et du Moyen Orient.

11. Tibiae (en grec : auloi) : instruments d'origine phrygienne, de la famille des hautbois, à un ou deux tuyaux, à anche simple ou double, à la sonorité chaude et perçante, comme tous les hautbois orientaux encore en usage de nos jours. La phrase suivante est inspirée de Quintilien, I.x.19.

12. Cf. Quintilien I. x. 11 : la connaissance de la musique est nécessaire à la formation de l'orateur. On pourrait aussi ajouter cette pensée d'un autre philosophe-musicien (ou, davantage encore, peut-être, musicien-philosophe :"La vie sans la musique n'est qu'une erreur, une besogne éreintante, un exil"(Nietzsche, Lettre à Peter Gast, 15 janvier 1888). Cf. aussi la note 48.

13. David : épisode célèbre de l'Ancien Testament, I Samuel XVI, 14-23, emprunté par Isidore à Cassiodore (II. v. 9) et souvent cité comme exemple édifiant de l'effet moral de la musique chez les chrétiens, à côté d'un autre épisode de la légende de Pythagore apaisant le jeune homme ivre : cf. Réginon (G I, 235b).

14. Citation de Cassiodore, II. v. 2.

15. Passage tiré textuellement, sans doute par déférence, de Cassiodore, II. v. 5. (Cf. aussi Aurélien de Réôme, chap. IV). Mais à la classification cassiodorienne Isidore préfère de loin celle d' Augustin, développée au chap. XIX (cf. note 17).

16. L'héroïque : le mètre dactylique, composé de dactyles (une syllabe longue suivie de deux brèves), est le vers par excellence de la poésie épique ; l'ïambique (une brève + une longue) convient surtout à la poésie satirique ; l'élégiaque : distique composé d'un hexamètre (6 pieds) et d'un pentamètre (5 pieds). Cf. Augustin, De Musica II. viii. 15.

17. Ce passage dérive en partie de Cassiodore (II. v. 6), mais surtout d'Augustin, De Ordine II. xiv. 39 (Migne, PL 32.1013) ; De doctrina christiana II. xvii. 27 (PL 34.49) ; Expos. in Ps. CL (PL 37.1965).

18. Au sens de 'parole'. Étymologie fantaisiste, fréquente chez Isidore, qui fait dériver le mot verbum, 'parole', de verbera, 'coups', 'chocs' (en français : 'verges', au sens de 'fouet').

19. Citation de Virgile, Énéide III, 556.

20. Virgile, Énéide IX, 503. Outre leur valeur littéraire exemplaire, ces citations tirées d'auteurs classiques célèbres aidaient les élèves à retenir les préceptes du maître ou, dans le cas présent, l'enseignement d'Isidore.

21. Ces définitions d'Isidore sont tirées de diverses sources : Cassiodore, II. v. 7 ; les grammairiens Diomède (Keil, Grammatici Latini I, 420.9) et Marius Victorinus (Keil VI, 184.1 ; cf. IV, 426.9, et V, 126.2.) ; Martianus Capella IX, 948. Dans l'Antiquité, Aristote (Génération des animaux V, 7), Cicéron (De natura deorum II, 58 ; De oratore III, 57) et Quintilien (II.iii.32), que connaît Isidore, avaient tenté un typologie des voix humaines. Cf. Isidore I. xviii. 1 ; De eccles. off. II, 12 (Migne, PL 83.792B : sur la voix du chantre liturgique).

22. directus : sans inflexion ou modulation, c'est-à-dire sans intervalle ; en grec : syneche [συvεχ], par opposition à diastematikè [διαστεματικ] : cf. Boèce I, 8.

23. Suite de Cassiodore II. v. 6.

23a. Cf. Augustin, De doctrina christiana II. xvii. 27 (PL 34.49) ; In Ps. CL.

24. Virgile, Énéide VIII, 526 (remarquer l'hendyadin). Tentative de rapprochement entre t uba et tyrrhenus, 'étrusque'. Appris par coeur, ces vers du plus grand poète latin servaient d'artifice mnémotechnique pour retenir ce genre d'étymologie à nos yeux puérile.

25. Psaume LXXXI, 4. Il s'agit des néoménies juives, mentionnées par Augustin (Expos. in Ps. LXXX, 6; Migne, PL 37.1036).

26. Calendo (de caleo, calere, 'brûler, être rempli d'ardeur'). La leçon calando (de calo, calare, `appeler, proclamer') satisfait davantage au sens, mais est-elle attestée par la tradition manuscrite ? ─ Calamus (qui a donné au Moyen Age 'chalemie') signifie proprement 'roseau' et désigne soit un tuyau de flûte de Pan ou syrinx, soit encore la tibia (sur l'origine phrygienne de celle-ci, cf. Hygin, Fabulae, 165, et Fulgence, Mythol. III, 9).

27. Idis : surnom de Daphnis, demi-dieu sicilien, fils d'Hermès et d'une nymphe, à qui Pan, le dieu agreste, enseigna l'art de la syrinx (cf. Virgile, Bucoliques V, 20 et VIII, 68, d'après Théocrite, Bucoliques I, 64-142). Mais Isidore se souvient ici, sans doute, d'Hygin, Astron. II, 7.

28. En fait, , φ¢ς signifie"lumière"(ou"joie", ou"homme","mortel"), selon l'accent.

29. Isidore fait de la sambyque un tambour, alors que cet instrument d'origine babylonienne (sabbeka) désignait, chez les Grecs et les Romains, une petite harpe de forme triangulaire, parfois assimilée au psaltérion (cf. Sibyl Marcuse, M usical Instruments : A Comprehensive Dictionary, New York, Norton, 1975, s. v. Sambuca, Sambyke, Symphonia). Dans la phrase suivante, Isidore rapproche le grec σαμ_υκ_ du latin sambucus, 'sureau'.

30. Bucoliques II, 32-33. La pandore (assimilée ici par Isidore à une flûte de Pan ou syrinx) est, en réalité, un luth à long manche, à 3 cordes (selon Pollux), d'origine orientale, peu pratiqué par les Grecs et les Romains. Cf. Varron, De lingua latina VIII, 61 ; Martianus Capella IX, 906. ─ A propos de légende de Pan, inventeur de la syrinx, cf. la belle adaptation moderne de Jules Laforgue, Pan et la Syrinx (mis en musique par Jacques Chailley).

31. Suite de Cassiodore ii. v. 6.

32. Cf. chap. XVI et note 6 ci-dessus.

33. Rapprochement purement métaphorique entre κίθαρα, d'origine inconnue (peut-être un emprunt à une langue asianique ou méditerranéenne, selon les dictionnaires étymologiques grecs autorisés : Boissacq, Chantraine, etc.) et κίθαρoς, 'cage thoracique'.

34. Psaltérion : chez les Grecs, sorte de harpe. Jérôme utilise ce terme pour rendre l'hébreu nebel ou harpe verticale à 10 ou 12 cordes des Lévites, en forme de delta inversé (V), d'origine égyptienne. Après le X e s., psaltérion sera synonyme de rotte (crwth) et de dulcimer
Barbitos : lyre accordée au grave de la pektis, jouée avec un plectre, d'origine phrygienne (cf. Horace, Carm. I.i.34; I. xxxii. 4 ; III. xxvi. 4).
Pektis : sorte de lyre ou cithare grecque triangulaire, jouée avec un plectre et parfois identifiée à la magadis.

35. Fidicula : petite lyre romaine faite de bois de platane (Cicéron, De natura deorum II, 22).

36. Énéide VI, 646. Hémistiche souvent cité par les théoriciens de la musique médiévale, à des fins solfégiques.

37. Allusion au thème de l'harmonie des sphères célestes. Cf. notre traduction de Cassiodore, note 27.

38. Psallere. En latin biblique : chanter au son de la harpe, d'où 'psalmodier'. Cf. Augustin, In Ps. LXXX.

39. Nous dirions aujourd'hui : 'exotique'.

40. Le Décalogue : les dix commandements de l'Alliance donnés par Yahvé à Moïse (Exode XX ; XXXIV; Deutéronome, V). Le rapprochement a pu avoir été suggéré à Isidore par Augustin, De doctrina christiana II.xvi.26 (Migne, PL 34.48). Cf. aussi notre traduction de Cassiodore, note 11.

41. Certains dictionnaires étymologiques rapprochent λύρειv du latin laus, `louange' : étymologie très incertaine. ─ Orphée : cf. Horace, Odes I, 24.

42. Thème de la σύμπαθεια ou affinité étroite entre l'Homme et la Nature, qui partage ses sentiments, heureux ou malheureux. Ce lieu commun a été abondamment exploité à l'époque baroque : cf. certaines cantates d'Alessandro Scarlatti (Endymion, Venere et Adone, etc.) et de Händel.

43. Ou : les astres, les planètes.

44. Cette incise est sans doute une glose de la tradition manuscrite. ─ Le tympanon était associé au culte de Cybèle et de Dionysos (Bacchus) et joué par les femmes seulement. Cf. Pline IX, 35.

45. Peut-être une autre glose (ballematia est attesté dans le Corpus glossariorum latinorum V, 586.7, d'après βαλλιζ¢, `danser'. Sur l'histoire et la fonction de ce mot, cf. J. Fontaine, Isidore, p. 439 n. 2). Sur les vases grecs comme sur les mosaïques romaines, les joueurs de cymbales sont souvent représentés en position de danse : cf., pour tous ces instruments, les nombreuses illustrations (dont plusieurs en couleurs) rassemblées et commentées par Günter Fleischhauer dans Etrurien und Rom, Leipzig, 1964 (Musikgeschichte in Bildern, tome II/5), en partic. p. 97 (fig. 53) : mosaïque de la"villa de Cicéron"(Pompéi, fin IIe s. a. C.), dite"mosaïque des Dioscures de Samos", conservée au Museo Nazionale de Naples (Inv. 9985) et qui représente de façon très réaliste un joueur de tambourin, un joueur de cymbales et une joueuse de tibia.

46. Satire XIII, 93. Le sistre est un instrument d'origine égyptienne, introduit à Rome avec le culte d'Isis.

47. Cf. Boèce, I. M. II, 17.

48. Isidore reprend ici une idée qui remonte au moins à Philolaos, philosophe pythagoricien du V e s. a. C. et premier théoricien de la musique, pour qui les nombres étaient la substance même des choses (fragment 4, éd. Diels-Kranz, Fragmente der Vorsokratiker6, Berlin, 1952, 44 B 4 ; cf. Aristote, Métaphysique987 B, 1090 A ; J. Haar, Musica mundana : Variations on a Pythagorean Theme, diss. Harvard University, 1960, et B. Münxelhaus, Pythagoras Musicus. Zur Rezeption der pythagoreischen Musiktheorie als quadrivialer Wissenschaft im lateinischen Mittelalter, Bonn-Bad Godesberg, 1976).

Terminologie musicale

Les chiffres renvoient à la numérotation des chapitres.

Accentus, xx
Acuta (vox), xx
Acutus, xviii, xx
Arsis, xx, xxiii
Aspera (vox), xx
Barbarica (cithara), xxii
Barbita, xxii
Caeca (vox), xx
Calamus, xxi
Canere, xvi, xx, xxi
Canor, xix
Canticus, xvi
Cantilena, xix
Cantus, xv, xvii, xix, xx, xxi (tibiarum), xxii
Carmen, xxii
C(h)orda
Chorus, xxii
Cithara, xvi, xix, xxii
Clangere, xxi
Clangor, xvii, xx, xxi
Clara (vox), xx
Coaptatio, xx
Cohaerere, xviii
Concentus, xvii
Concinnere, xxii
Concordantia, xx
Concordia, xxii
Consonare, xxii
Cymbalum, xxii
Decachordon, xxii
Diaphonia, xx
Diastema, xx
Diesis, xx
Discrepans, xx
Discrimen, xxii
Dissonare, xx
Dissonus, xx
Dura (vox), xx
Elevatio, xx, xxiii
Emittere (sonos), xx, xxi
Enuntiatio, xx
Euphonia, xx
Fidicen, xxii
Fidicula, xxii
Fistula, xxi
Flatus, xix, xx
Gravis, xviii, xx
Harmonia, xvii, xx
Harmonica, xviii, xix, xx
Hyperlydius, xx
Hypodorius, xx
Incursio, xviii
Indica (lyra), xxii
Inflexio (vocis), xx
Lyra, xvi, xxii
Melos, xx
Mensura, xviii
Metrica, xviii
Metrum, xviii, xxii
Modulatio, xv, xvii, xx, xxii
Nervus, xxii
Organica, xix, xxi
Organum, xxi
Pandoria, xxi
Pectidis (lyra), xxii
Percutere, xix, xxii
Perfecta (vox), xx
Perspicua (vox), xx
Phoenices (lyra), xxii
Pinguis (vox), xx
Positio, xx, xxiii
Psalterium, xxii
Pulsus (digitorum), xix, xx, xxii
R(h)ythmica, xviii, xix, xxii
Sambuca, xxi
Sistrum, xxii
Sonare, xxii
Sonitus, xvi, xx, xxii
Sonus, xv, xvii, xix, xx, xxi, xxii
Suavis (vox), xx
Subtilis (vox), xx
Symphonia, xx, xxi, xxii, xxiii
Temperamentum, xx
Tenor, xx
Thesis, xx, xxiii
Tibia, xvi, xix, xxi
Tibicen, xxi
Tinnitus, xxii
Tintinabulum, xxii
Tonus, xx
Tuba, xvii, xix, xx, xxi
Tympanum, xxii
Vinnola (vox), xx
Virgula, xxii
Vox, xvii, xix, xx, xxi, xxii, xxiii


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Mardi 24 Janvier, 2023

bouquetin