Caen, 16 mars 2024 —— Alain Lambert.
Un théâtre de Caen bien rempli pour cette 30e Nuit du jazz, la dernière pour le programmateur Michel Dubourg, animateur infatigable depuis 50 ans de ce lieu. Sur le thème du jazz féminin, avec trois styles bien affirmés.
Lakecia Benjamin 4tet à la Nuit du jazz. © Photographie Patricia Segretinat.
D’abord, de New York, Lakecia Benjamin au sax alto et au rap, accompagné d’Oscar Perez au piano et à l’orgue, Ej Strickland à la batterie et Elias Bailey à la contrebasse. Du jazz spectaculaire, où la musicienne se donne à fond sur un instrument qu’elle connait et maîtrise parfaitement. Avec deux dimensions très différentes, à peut être mieux équilibrer ; l’une frénétique où les stridences et la volubilité dominent, au point de faire oublier le Coltrane méditatif de My Favourites Things. Mais la reprise est, il est vrai, dédiée à Alice Coltrane. Et une autre, plus apaisée, comme ce solo décalé à la Dolphy du second thème, clamé et rapé. Ou ce blues tout enluminé, en solitaire, avant le magnifique Amazing Grace en duo avec le piano, et là, l’âme de Coltrane résonnait. Comme dans le superbe dernier thème en rappel, au jeu répétitif, envoûtant. Les trois complices sont excellents, le contrebassiste, solide, le batteur, puissant, et le pianiste, attentif et aux beaux solos fréquents.
Clémence Gaudin 4tet à la Nuit du jazz. © Photographie Patricia Segretinat.
À l’entracte dans les foyers, pendant le changement de plateau, la contrebassiste régionale Clémence Gaudin prend le relais avec son trio Black Pantone augmenté du violoniste Sébastien Guillaume, toujours Antoine Bouchaud au piano et Martin Mabire à la batterie. On les avait découverts en quatuor à triples cordes l’été dernier au festival Arches en jazz de Porbail, et malgré le brouhaha d’intermède, on a plaisir à retrouver leurs compostions et improvisations entre classique romantique et jazz bien balancé.
Gaby Hartmann 6tet à la Nuit du jazz. © Photographie Patricia Segretinat.
En seconde partie, la guitariste et chanteuse Gaby Hartmann, entourée de ses cinq musiciens, Florian Robin au piano et à l’orgue, Abdoulaye Kouyate à la guitare, Robby Marshall aux clarinettes, flûte et sax ténor, Elaine Beaumont à la contrebasse et Bruno Marmey à la batterie. Un jazz folk un peu délicat après la tornade américaine. Du moins pour les premières chansons. Puis l’ensemble prend de l’assurance et nous fait voyager au fil des langues, anglaise, française, arabe, portugaise avec des arrangements soignés, et la belle présence, entre autres, des guitares, des clarinettes et des claviers.
Le quartet normand assure la jam traditionnelle de fin de nuit, en hommage bien sûr au programmateur bientôt en retraite, mais pas en retrait, dont les photos du temps du groupe Impulsion Quartet dont il était le contrebassiste, ou les selfies avec les musiciens invités par lui, défilent sur un écran. [voir notre chronique en photos sur l’histoire du jazz à Caen dont Michel Dubourg est un des acteurs privilégiés]
L'année jazz n'est pas finie au théâtre : dans les foyers, le 23 mars Sylvain Boeuf 4tet, le 13 avril Daniel Zimmermann rend hommage à Gainsbourg et le 25 mai Boujou Jazz Factory propose son jazz normand.
Et un dernier concert au café Côté Cour avec le trio Atlantis le 3 avril.
Alain Lambert
16 mars 2024
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