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Jean-Marc Warszawski, 25 septembre 2011.

Claude-Jean Nébrac : Ercole amante aux tuileries : Mémoires imaginaires de Francesco Cavalli (1659-1662)

Claude-Jean Nébrac, « Ercole Amante aux Tuileries » : Mémoires imaginaires de Francesco Cavalli (1659-1662).  Editions Books on demand, 2011 [190 p. ; 18 €].

Voici un auteur surgit de l'inconnu, une maison d'édition qui n'en est pas une, et un livre au bout du compte très sympathique.

Il s'agit du carnet intime ou carnet de voyage imaginaire du célèbre compositeur vénitien Francesco Cavalli, pendant les deux années qu'il passe en France, à l'occasion des festivités du mariage de Louis xiv, pour lesquelles il doit composer un opéra.

Tout ne se passe pas pour lui comme prévu, c'est un peu la pagaille dans les préparatifs, l'aménagement de la salle et la construction des décors sont en retard, mais aussi, la cour française n'apprécie pas trop l'opéra italien.

Ce n'est ni par bêtise, ni par manque de culture, comme on ressasse ce préjugé de bon ton simplet. Ce qu'on aime à la cour de France, ce qu'on attend d'un beau spectacle est fort différent. La qualité du texte est essentielle, ce qui est difficile d'apprécier quand on ne comprend pas la langue italienne, mais encore, les règles théâtrales, que l'on peaufine depuis les poètes de la cour d'Henri iv, portent sur l'unité, 'équilibre de ce qui se passe sur scène et ce qui ne peut s'y passer, sur la crédibilité réaliste, on préfère les ballets aux intermèdes bouffons. Ce n'est pas qu'on soit allergique à la musique italienne, mais l'opéra italien est au goût de l'élite française quelque peu trivial, déboutonné, irréaliste, et aussi d'une durée interminable.

Bref, après deux années parisiennes Cavalli retourne dans sa Venise, et déclare à un directeur de théâtre qui lui réclame une commande, en souffrance, qu'après son voyage en France, il ne désire plus composer pour le théâtre.

Voilà le début d'une légende, dont on ne sait que très peu de choses. Peut-être s'est-il assez enrichi à Paris — il revient notamment avec un magnifique diamant, cadeau royal, pour ne plus avoir besoin de produire de la musique d'opéra.

Ce carnet,  ce récit à la première personne est une excellente idée de Claude-Jean Nébrac qui arrive à nous convaincre et à nous faire passer un bon moment de lecture.

Peut-être n'évite-t-il pas les pièges du genre, et attribuant à Cavalli de la fin du xviie siècle, la connaissance des livres d'aujourd'hui, peut-être est-on un peu frileux dans le jeu d'entre imagination et véridicité factuelle (le film de tavernier Que la fête commence, ou Le nom de la rose d'Umberto Eco seraient de bons exemples). Mais le choix de prudence de l'auteur est souple, cohérent.

Jean-Marc Warszawski
25 septembre 2011

Cavalli est un des plus importants compositeurs italiens de son temps. Élève, puis collègue et collaborateur de Monteverdi, il mène de front une carrière de musicien d'église et d'opéra, comme son maître. Son œuvre naît avec les théâtres payants de Venise, et il gravit tous les échelons de la hiérarchie qui lui est permise, jusqu'à la charge illustre de maître de chapelle de San Marco.

C'est le premier ministre Mazarin qui désire sa présence aux fêtes du mariage de Louis xiv. Cavalli hésite, il ne veut certainement pas perdre sa place d'organiste de San Marco, ni les commandes des théâtres italiens. De plus, la somme promise est nettement réduite au cours des négociations.

Par le jeu des ambassades, on lui assure de retrouver sa charge d'organiste à son retour, et de continuer à en être rémunéré pendant son absence.

En avril ou en mai 1660, Cavalli se met en chemin de France, avec cinq compagnons : deux chanteurs de San Marco, le soprano Giovanni Caliari, le ténor Antonio Poncelli, et un jeune serviteur Giacomo da Murano, qui est peut-être le copiste. Ils arrivent en juillet, après avoir fait un tour en Bavière.

Cavalli compose certainement son opéra Ercole amante, sur un livret de Buti (le surintendant des artistes italiens de la cour), au cours de la première année de son séjour.

On suppose que le retard de la construction de la salle et des décors sont les conséquences d'un manque de finances, voire d'un sabotage. L'opéra, long de six heures, est créé le 7 février 1662, dans une salle à l'acoustique si mauvaise, qu'on n'y entend pratiquement rien.


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