Dynam-Victor Fumet, Œuvres pour chœur a cappella et avec orgue. Chœur des Nouvelles Voix de Saint-Petersbourg, Mikhaïl Golikov, dir. Musique et Esprit, ME 0408/1, 2008.
Victor Fumet est né le 4 mai 1867 à Toulouse. Il y accomplit, au Conservatoire, ses études musicales. Il est admis au Conservatoire de Paris en 1885. Il y suit les cours d'orgue de César Franck, et de composition d'Ernest Guiraud. Il travaille au cabaret du Chat Noir, pour améliorer son quotidien, il y rencontre Érik Satie en 1887, avec lequel il a de nombreuses affinités, le goût de l'occultisme, de l'alchimie, des sectes religieuses, mais aussi un certain sens de l'engagement social. Satie est un temps rédacteur au journal l'Humanité, et s'occupe des enfants dans le besoin à Arceuil, où il habite. Fumet s'acoquine avec les anarchistes, et devient un proche de Kropotkin et de Louise Michel, il écrit dans « La Révolte ». Cet engagement lui coûte certainement le Prix de Rome, et l'arrêt de l'aide familiale, mais il y gagne un second prénom : « Dynam », comme « dynamite » . Il repasse sa place au Chat Noir à Satie. Il devient l'assistant de César Franck, puis organiste à Sainte-Clotilde. Il fait un séjour mouvementé en Amérique du Sud, passe dix années au Collège des Oratoriens de Juilly, et revient Paris en 1910, comme organiste et Maître de chœurs à Sainte-Anne, jusqu'à sa mort en juin 1949.
Les témoins de l'époque, concordent dans l'admiration superlative de ses improvisations au piano et à l'orgue.
Sa musique, tel que nous pouvons l'entendre dans cet enregistrement est fortement ancrée dans le romantisme, elle aime le large, l'ample, la démonstration sentimentale, l'altitude, l'effet grandiose, mais est exempt de tout formalisme académique. De ce point de vue, Dynam-Victor a même pris de belles distances avec ses maîtres, dont César Franck.
Son emploi de la tonalité, prend aussi des distances avec le traité d'harmonie académique, comme cela se fait à la charnière des XIXe-XXe siècles, avec Debussy ou Fauré, voire Satie. On y perçoit un net glissement vers la modalité, peut-être inspiré par la découverte enthousiasme de la musique ancienne, particulièrement de Palestrina, mais aussi parce que c'est une bonne solution technique « non violente », pour échapper aux effets épuisés de la tonalité académique.
Dynam-Victor Fumet est un compositeur qui entend, et se soucie peu des préceptes, ni pour les défendre ni pour les dépasser. Il suit ses visions, et les réalise avec le bagage et le goût qui sont les siens. Il n'est pas hors temps, mais il produit, assurément des objets uniques, du moins une œuvre unique.
Il n'est pas question de parties concertantes, de préparation ou de résolution des dissonances, d'enchaînent contrasté des mouvements. Mais tout est fluide, conduit, aboutit, avec un outillage technique inédit.
Sa manière de moduler, en abondance, ne rend pas un effet de fuite permanente, comme chez Wagner, mais a en soi des effets expressifs extrêmement efficaces. Les marches chromatiques, sur des durées longues, comme dans le mouvement « Automne » des « Quatre Saisons », sont saisissantes.
L'improvisateur de génie, prend un grand soin à la réalisation écrite, il a une plume méticuleuse, ses partitions fourmillent d'idées ciselées avec soin, on pourrait penser à son père qui exerçait l'art de l'horlogerie, mais il faudrait alors y ajouter l'art d'un joailler.
Jean-Marc Warszawski
21 octobre 2008.
À propos - contact | S'abonner au bulletin | Biographies de musiciens | Encyclopédie musicale | Articles et études | La petite bibliothèque | Analyses musicales | Nouveaux livres | Nouveaux disques | Agenda | Petites annonces | Téléchargements | Presse internationale| Colloques & conférences | Collaborations éditoriales | Soutenir musicologie.org.
Musicologie.org, 56 rue de la Fédération, 93100 Montreuil, ☎ 06 06 61 73 41.
ISNN 2269-9910.
Dimanche 11 Février, 2024