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1er avril 2013

—— Jean-Marc Warszawski

Amore Contraffatto : Cresta Gesualdo

amor contrafatto

Amore contraffatto : œuvres de Carlo Gesualdo et de Gianvincenzo Cresta. Ensemble XXI (Rachid Safir), Christophe Desjardins (viole). Digressione music 2012 (DCTT23).

La musique valant par ses interprètes, ce cédé ne peut être qu'un bon moment de musique à poser les yeux fermés sur son tourne-cédés. Formellement original, mais musicalement cohérent, il réunit des œuvres de Carlo Gesualdo né vers 1561 et de Gianvincenzo Cresta, né en 1968.

Le prince Carlo Gesualdo est connu pour avoir assassiné ou fait assassiner son épouse et l'amant de son épouse, et avoir ensuite passé le restant de ses jours enfermé dans son ténébreux château, l'affliction, les remords, la pénitence et la musique.

Certes, après son crime, il se retire quelque temps dans ses terres, plus pour se mettre à l'abri des vendettas que pour se préparer aux affres éternelles de l'Enfer. Mais il ne tarde pas à réapparaître dans le monde.

À l'Académie de la cour de son père, il s'était formé à la composition de madrigaux, genre musical savant, cherchant à être la contrepartie — signifiante — sonore de la poésie, genre vocal polyphonique qui laissera place à la mélodie accompagnée de la seconda prattica de Monteverdi et à l'Opéra. Il publie ses œuvres sous un nom d'emprunt, il faut tenir son rang princier.

Peut-être Gesualdo était-il quelque peu givré, visionnaire, pourquoi pas torturé comme Vang Gogh le sera en peinture. Il est surtout un excellent madrigaliste qui ose, plus que tout autre, forcer les effets au-delà des conventions, ouvrant, à la fin de sa vie, une possibilité d'explorations nouvelles dans les recherches d'expressivité de son époque. Mais comme on le sait, la mélodie accompagnée fait table rase et passer pour longtemps le goût pour la polyphonie.

C'est vers la fin de sa vie, en 1611, que Gesualdo publie, dans sa propre imprimerie, son livre de Repons pour l'Office des Tènèbres qui font aujourd'hui du grand répertoire vocal. Rachid Safir revient quant à lui à de vieilles amours, ayant enregistré ces Repons avec l'ensemble A sei voci pour Erato dans les années 1980.

Pour Gianvincenzo Cresta, Devequt (II), communion de la tradition juive, serait une réponse apaisée aux tourments (supposés ?) de Gesualdo.

Elle est composée sur des poèmes (laudes, louanges) de Jacopo da Todi, un franciscain du XIIe siècle, auquel on doit peut-être un célèbre Stabat Mater (qui pourrait être en fait de saint Bonaventure), très souvent mis en musique.

On peut rapprocher la vie de Jacopo da Todi de celle de Gesualdo. Homme de loi dont on dit qu'il ne fut pas toujours très scrupuleux, il tombe dans un profond mysticisme après la mort tragique de son épouse, entre dans les ordres rigoureux, polémique, combat le pape, fait de la prison, il est aujourd'hui toujours excommunié.

Les Laudes de Jacopo da Todi sont en forme dialoguée, ce que le compositeur symbolise par un dialogue du chœur avec une viole : per ensemble di vosi e viola narrante, pour ensemble vocal et viole récitante.

Réponse apaisée aux tourments supposés de Gesualdo ? Ce n'est pas évident, mais il est très tentant d'entendre une réponse musicale pertinente et directe par delà quatre siècles de temps, un fil renoué.

On est dans l'hiératique, le silence, la pureté, l'interrogation qui dépassent largement la religion, ou qui rend à l'humanité ce que la religion a confisqué.

Musicalement un très beau programme sous toutes les coutures.

Gesualdo, Plange quasi virgo (extrait de la plage 7)

.
Cresta, Possedi posseduta, (extrait de la plage 4).

Gianvincenzo Cresta (né en 1968), Devequt II : parole dalle laude di lacopone da Todi per ensemble di voci e viola narrante. Nolodirmai ; Nel suo demorare ; D'aver lo tuo amore ; Possedi posseduta.

Carlo Gesualdo, (1566-1613); Sei tenebrae responsoria del Sabatto Sancto — Sicut ovis ad occisionem, Jerusalem, surge, Plange quasi virgo, Recessit pastor noster, O vos omnes, Ecce quomodo.

Ensemble Solistes XXI, direttore Rachid Safir : Raphaële Kennedy, , Aurore Bûcher, Maryseult Wieczorek, Lucile Richardot, Laurent David, Randol Rodriguez-Rubio, Jean-Sébastien Nicolas, Jean-Christophe Jacques, Christophe Desjardins, viola.

Jean-Marc Warszawski
1er avril 2013
© musicologie.org


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