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mercredi 12 novembre 2014

 

Jean-Nicolas Diatkine : récital Salle Gaveau

 

Par Jean-Nicolas Diatkine ——

Les premières sonates pour piano de Beethoven remportèrent immédiatement un grand succès auprès du public des salons viennois, succès auquel la virtuosité et la personnalité du compositeur-pianiste n'étaient pas étrangères. Revers de la médaille, Beethoven se plaignait souvent que ses sonates pour piano, tombées aux mains d'éditeurs peu scrupuleux, donnaient lieu à des transcriptions pour d'autres instruments de musique de chambre, transcriptions dont la qualité laissait évidemment à désirer à ses yeux. Ainsi la neuvième sonate de Beethoven est la seule dont celui-ci ait lui-même écrit la transcription pour quatuor à cordes, dans la même tonalité, et à laquelle il a attribué le même numéro d'opus. Mais la structure de cette sonate est déjà par elle-même si proche de celle du quatuor, avec ses quatre voix bien définies, dans le caractère du « quatuor dialogué » si cher à Haydn, qu'on se demande si ce n'est pas l'inverse qui s'est en fait produit : sa conception partait bien de l'idée d'un quatuor pour aller vers le piano. C'est ce qui donne à cette sonate son caractère particulièrement convivial, comme une conversation, parfois un peu épicée, entre amis…

Loin de cet élan de fraternisation qui culminera avec l'hymne à la joie vingt-cinq ans plus tard, on trouve chez Brahms et les huit pièces de l'opus 76 le retour à une solitude méditative, une confrontation entre le poète et les puissances de la nature, qui tend à identifier le microcosme de l'être ordinaire avec le macrocosme. Son moyen d'expression est pourtant si intime que le critique Hanslick y voyait des « romances sans paroles », et c'est bien le compositeur des Lieder que l'on y retrouve le plus souvent, avec cette capacité unique à suivre les méandres les plus subtils des textes qu'il met en musique.  La magie créative de Brahms nous permet de goûter ici aux mêmes émotions, mais cette fois, sans les mots…

L'évocation de la magie, du monde surnaturel propre au romantisme allemand, ne peut à mon sens mieux se révéler dans la musique française qu'avec Gaspard de la nuit, d'après les trois poèmes d'Aloysius Bertrand (1820) présentés par l'éditeur selon les vœux de Ravel avant chaque pièce dans la partition. Leur lecture suffit à elle seule à introduire parfaitement l'auditeur dans le monde du compositeur, monde où se découvre la fine dentelle de ses harmonies et de ses timbres. Soulignons seulement comment Ravel y exprime le caractère diabolique du lutin Scarbo : tout en se dilatant jusqu' à devenir aussi grand qu'une cathédrale puis rétrécir et disparaître sous le lit, il émet toutes sortes de sons inquiétants auxquels se mêlent des caractères de danses hispaniques parfaitement reconnaissables. La féminité de ces rythmes diaboliques nous emmène bien loin de Méphistophélès tel que Liszt le conçoit dans sa valse du même nom, valse dont la virtuosité a pourtant certainement influencé Ravel dans sa composition.

Enfin, écrire sur la musique de Chopin et la jouer est un paradoxe qui s'exprime clairement dans l'expression que celui-ci utilisait volontiers : « La plume me brûle les doigts ». Laissons donc le dernier mot à Marcel Proust : « Les phrases au long col sinueux et démesuré de Chopin, si libres, si flexibles, si tactiles, qui commencent par chercher et essayer leur place en dehors et bien loin de la direction de leur départ, bien loin du point où on avait su espérer qu'atteindrait leur attouchement, et qui ne se jouent dans cet écart de fantaisie que pour revenir plus délibérément -d'un retour plus prémédité, avec plus de précision, comme sur un cristal qui résonnerait jusqu'à faire crier -vous frapper au cœur. »

Jean-Nicolas Diatkine

 

mercredi 12 novembre 2014
Paris, Salle Gaveau

Jean-Nicolas Diatkine
piano

De la structure à la magie

Beethoven (1770 - 1827)
Sonate no 9 op.14 no 1

Brahms (1833 - 1897)
Huit pièces pour piano opus 6

Ravel (1875 - 1937)
Gaspard de la Nuit

Chopin (1810 - 1849)
3 Mazurkas
Sonate no 3 opus 58

Salle Gaveau 45 rue de la Boétie 75008 Paris. Tarifs : 45 €, 35 €, 25 €, 15 €. Réservation : 01 49 53 05 07. https://www.sallegaveau.com.

Jean-Nicolas Diatkine débute ses études musicales à 6 ans. Après une carrière de directeur de chant et d'accompagnateur, il décide à partir de 1999 de se produire en soliste.

On a pu l'entendre dans le cycle de concerts « Autour du Piano », au Festival de piano « Pianissime », à l'Opéra Bastille, au « Rode Pomp » de Gand.

Jean-Nicolas Diatkine propose un vaste éventail d'œuvres pour piano comme les Suites de Haendel, les Préludes de Shostakovitch, la Sonate Appassionata et l'Opus 101 de Beethoven, la dernière sonate D. 960 de Schubert, les Études symphoniques de Schumann, ou encore les quatre ballades de Chopin, des oeuvres rarement jouées de Liszt comme Les Réminiscences de Boccanegra, sans oublier les pièces de clavecin de Jean-Philippe Rameau.

Il a enregistré deux cédés de mélodies de Duparc et de Bizet, en compagnie du ténor Zeger Vandersteene (Gents Muzikaal Archief), et en solo des œuvres de Liszt, Schumann et Beethoven (Parnassié Éditions 2007).

La musique instrumentale de Silvius Leopold Weiss

 

Il appartient à une famille où on était luthiste de père en fils, et lui-même fut le dernier prince de cet instrument aristocratique, à une époque où celui-ci, passé de mode en France et en Italie, restait encore très prisé en Allemagne et dans l'est de l'Europe. À ses débuts, il servit pendant six ans en Italie, puis rentra en Allemagne où il allait faire une carrière des plus brillantes à la cour de Dresde. Sa réputation de virtuose, confirmée par des tournées prestigieuses, était considérable, mais ses contemporains, parmi lesquels un certain J.S. Bach, admiraient tout autant ses qualités de compositeur et ses dons d'improvisateur.

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