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Michel Rusquet, Trois siècles de musique instrumentale : un parcours découverte —— La musique instrumentale de Beethoven à Schubert.

Les danses au piano de Franz Schubert

L'œuvre instrumentale de Franz Schubert ; la musique de piano.

Plus de quatre cents danses recensées, dont une immense majorité (Valses, Ländler, Deutsche) appartient à l’univers de la valse, et, secondairement, une belle moisson d’éossaises et de menuets : toute sa vie ou presque, et surtout à partir de 1820, Schubert n’a cessé de faire danser la société viennoise, que ce fût par éditeurs interposés, car, dans ce domaine au moins, les vilains « marchands d’art » lui firent bon accueil, ou « en direct » à l’occasion des légendaires « schubertiades » (« Faites-nous danser, ami Schubert ! »).

On se perd un peu, naturellement, dans ce massif aux dimensions d’un continent, et il ne saurait être question ici de faire un inventaire de toutes ces miniatures. En même temps, on s’en voudrait de passer sous silence une production dans laquelle Schubert déploie des trésors d’imagination, de fraîcheur et de sensibilité. Car, dans ces pages, de pur divertissement, tantôt exubérantes de gaieté, tantôt teintées d’une insondable mélancolie, se rencontrent à tout instant « de troublantes confidences, exprimées à l’aide d’une inspiration mélodique, rythmique, et particulièrement harmonique, qui fera toujours la joie des amoureux de musique. »52

On en aura de beaux aperçus à travers quelques-uns des onze recueils publiés du vivant du compositeur ou peu après sa mort. Par exemple parmi les trente-six valses opus 9 (D 365), publiées sous le titre de « Premières Valses », qui incluent la célèbre et très expressive Trauerwalzer (« Valse triste » ou « funèbre »),

Franz Schubert, Trauerwalz, opus 9, no 2, par Paul Berkowitz (2009).

ou parmi les Douze Valses qui, à côté de Ländler et d’écossaises, furent réunies dans le recueil opus 18 (D 145), ou encore dans les dix-sept Ländler (D 366) publiés à titre posthume. On fera aussi volontiers un détour par les trente-quatre valses  « sentimentales » opus 50 (D 779), ne serait-ce que pour ne pas laisser passer le joyau que constitue la treizième de ces valses, justement marquée zart (« tendre »),

Franz Schubert, Valses sentimentales, opus 50, D 779, no 13, par Herbert Schuch (2015).

voire par les vigoureuses Ddouze valses « nobles », opus 77 (D 969).

Franz Schubert, Douze Valses nobles, opus 77, par Paul Badura Skoda.

On ne négligera pas non plus les joyeuses douze valses « de Graz », opus 91 (D 924) de l’automne 1827,

Franz Schubert, Douze valses de Graz, opus 91, par Michael Endres (2002).

et moins encore un cycle réuni et publié sous l’égide de Brahms en 1864, les douze Ländler, opus 171 (D 790).  Peut-être est-ce en effet le joyau de ce catalogue de danses : « On s’y éloigne, certes, de la danse populaire, des cotillons vite et gaiement troussés, en somme de la « schubertiade » ; mais la musique y gagne. Plus riches que toutes les autres valses et allemandes, dans les thèmes, dans les harmonies, les enchaînements, les tonalités choisies, elles entrent de plein droit dans l’univers lyrique du compositeur. Si ce n’était leur rythme uniforme, leur cadence attendue, ces pièces seraient tout simplement des « moments musicaux », des bribes d’« impromptus ».53

Franz Schubert, Douze Ländler, opus 171, D 790, par Alfred Brendel.

En dehors même des recueils publiés, certaines pièces vaudraient d’être signalées, comme l’allègre galop « de Graz » (D 925), ou, éventuellement couplé au sombre menuet en ut dièse mineur (D 600), le merveilleux trio en mi majeur (D 610),

Franz Schubert, Menuet, D 600 et trio D 610, par Arcadi Volodos (2019).

et on pourrait citer également les six Danses allemandes (D 820) qui ont eu l’honneur d’être orchestrées par Webern.

Franz Schubert, Six danses allemandes, D 820, par Michael Endres.
Anton Webern, Six danses allemandes, d'après les danses D 820 de Franz Schubert, Berliner Philharmoniker, sous la direction de pierre Boulez.

Mais à quoi bon s’étendre outre mesure sur ce répertoire de danses : prions plutôt le Ciel pour que les pianistes soient assez modestes et inspirés pour, de temps à autre, en inscrire quelques-unes à leurs programmes…

plumeMichel Rusquet
3 avril 2020
© musicologie.org


 

Notes

52. Harry Halbreich, dans Tranchefort François-René (dir.), « Guide de la musique de piano et de clavecin », Fayard, Paris 1998, p. 686.

53. Sacre Guy, La Musique de piano, Robert Laffont, Paris 1998, p. 2515.

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