musicologie
Philharmonie de Paris, 17 décembre 2017, par Frédéric Norac ——

Un demi-Messie : Händel par Jordi Savall

Georg Friedeich Händel vers 1720. Anonyme.

La proposition paraissait assez improbable, voire un rien opportuniste en cette période d’avent. Le chef catalan n’entretient pas à notre connaissance de relation privilégiée avec le xviiie siècle, son domaine est plutôt le premier baroque et la musique ancienne. Mais après tout il n’y a aucune raison de cantonner un musicien à un répertoire unique et l’on était tout disposé à se laisser surprendre.

En fait de surprise, il n’y en eut pas vraiment, sinon assez mauvaise. Si la direction précise mais assez placide du chef catalan ne donne qu’un élan limité à l’orchestre, elle est encore portée dans la première partie par le mouvement ascendant de l’annonce messianique. Elle s’embourbe quelque peu dans le caractère doloriste et méditatif de la deuxième, peu aidée par des solistes que ne flatte guère l’acoustique de la grande salle de la philharmonie où leurs voix se perdent dans l’immensité du vaisseau et ne sont perceptibles directement que par les spectateurs face à la scène.

Le soprano de Rachel Redmond sonne clair et bien timbré et l’interprète séduit par de jolies variations et appoggiatures, mais, à part elle, seule la basse puissante et large de Matthias Winckhler paraît parfaitement audible dans tous ses registres et donne une belle profondeur aux ténèbres de son premier air. Le ténor Nicholas Mulroy plus étroit se révèle nettement moins flatté. Pour la partie de contralto, le chef a choisi de la confier à un falsettiste, cédant à une étrange manie, baroque au sens plein du terme, puisque la partie a réellement été écrite originellement pour une voix féminine. Le résultat est si catastrophique que le chanteur sera remplacé par un membre du chœur après l’entracte mais un peu tard car le grand air « He was despised » est déjà passé à la trappe de sa sourdine vocale. Aux saluts, la salle lui fera sentir toute l’étendue de sa déception.

Fort heureusement plus de la moitié de la musique est dévolue aux choristes et le grand triomphateur de ce concert reste la Capella reial de Caralynya, homogène, expressive, nuancée, captivante, même lorsque la trompette naturelle du Concert des Nations, particulièrement exposée dans cette œuvre, nous inflige ses errances tonales et ses problèmes de souffle. Le dernier mot du reste leur reviendra puisque c’est sur un bis du célèbre « Hallelujah » que s’achève cette soirée qui laisse l’impression de n’avoir entendu que la moitié, ou doit-on dire à moitié ? du chef-d’œuvre de Händel.

Frédéric Norac
17 décembre 2017
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