musicologie
31 octobre 2017, par Jean-Marc Warszawski ——

Le duo Repicco, les musiciens assassins italiens du xviie siècle, ceux qui furent assassinés

Repicco, Assassini, assassinati, œuvres de Pandolfi Mealli, Albertini, Marini, castaldi et Stradella. Jadran Duncumb (théorbe), Kinga Ujszászi (violon). Éditions Ambronay 2017 (AMY 308). Livret de Jean-François Lattarico.

Enregistré du 1er au 4 mars 2017, à Jujurieux.

Jadran Duncumb est né en Norvège, et ne s’est décidé à entrer en carrière avec sa six cordes, malgré des succès aux concours, qu’après avoir été déclaré jeune musicien de l’année par la BBC et avoir achevé ses études secondaires. Il  s’installe alors à Londres, puis investit luth et théorbe  sous la direction de Rolf Lisveland au Conservatoire supérieur de Trossingen.

Kinga Ujszászi est née quant à elle en Hongrie, musicienne de père et mère. Entre la pratique du piano et du violon, elle finit par se décider pour le plus transportable des deux qu’elle étudie à l’Académie Franz Liszt de Budapest, avant de bénéficier d’une bourse lui permettant d’intégrer la Royal Music Academy de Londres.

Jadran Duncumb et Kinga Ujszászi se sont rencontrés à Londres, y sont devenu le duo Repicco, théorbe et violon, finaliste du York Early Music Competition de 2013. Il fait sensation à la 22e Académie de musique baroque d’Ambronay, qui édite leur présent premier album.

Pour leur programme de musique xviie siècle, les deux musiciens n’ont pas choisi les œuvres de compositeurs ayant encombré les dictionnaires de la musique. Instrumentistes dans divers cours princières, parfois courant de l’une à l’autre dans l’empire, ils ont laissé quelques œuvres, quand elles ont été conservées, voire écrites. Alessandro Stradella sortant du lot par un important catalogue et des emplois institutionnels, telle la direction musicale du Teatro di Falcone de Gènes.

Mis à part  Biagio Marini (1594-1663), qui a accumulé des emplois dans de nombreuses villes de l’empire et assumé trois mariages, les autres sont liés à la chronique criminelle. D’où le titre générique du programme, « Assassins et assassinés ». Ignazio Albertini (1644-1685) musicien de l’impératrice Eleonora de Mantoue à Vienne, meurt poignardé. Le théorbiste Bellerofonte Castaldi (1581-1649), au service du cardinal Alessandro d’Este, est aussi guitariste, luthiste, poète satirique qui ne s’en laisse pas conter, prend part à l’exécution de l’assassin de son frère.  Alessandro Stradella (1639-1682) prend le large avec la maîtresse d’un autre. Ils sont rattrapés, entrent chacun dans un couvent, mais sont forcés au mariage. Après avoir signé le contrat de mariage, Castaldi est attaqué et laissé pour mort par deux individus qui se réfugient à l’ambassade de France, provoquant quelques perturbations dans les relations diplomatiques.  En poste à Gènes, il se fait assassiner pour de bon. Le violoniste Giovanni Antonio Pandolfi Mealli (1624-1687), en poste à Messine, assassine un chanteur-castrat, peut être en raison d’un désaccord dans le conflit franco-espagnol pour la possession de la ville.

Ce n’est pas vraiment là un critère musical, le crime, pas directement, mais tout en piquant la curiosité, évoquant la violence du temps, et une musique n’adoucissant  pas les mœurs des musiciens, c’est une bonne méthode pour dévoiler un art certainement plus imprégnée dans la bonne société du temps que celle fixée dans la mémoire collective actuelle. Paradoxalement, cette musique aux accents populaires, profane, faisant la part belle à l’improvisation, aux démonstrations d’effets et de virtuosité, une musique d’instrumentistes avant que de l’être de compositeurs, la normalité d’alors, est aujourd’hui surprenante (et l’exception du temps aujourd’hui normalité). En tout cas, ce cédé offre un beau point de vue et un bel exercice musical, où l’histoire est prétexte et non pas le but. Ignazio Albertini, Sonata no 1 (extrait), plage 1.


1. Ignazio Albertini, Sonata no 1 ; 2. Biaggio Marini, Cappricio ; 3. Bellarofonte Castaldi, Sonata Settima ; 4. Giovanni Antonio Pandolfi Mealli, Sonata, opus 4, no 4 ; 5. Improvisation de théorbe ; 6. Alessandro Stradella, Sinfonia no 2 ; 7. Giovanni Antonio Pandolfi Mealli, Sonata, opus 3, no 1 ; 8. Alessandro Stradella, Sinfonia no 9 ; 9. Ignazio Albertini, Sonata no 3 ; 10. Improvisation de violon ; 11. Alessandro Stradella, Sinfonia no 5 ; 12. Bellarofonte Castaldi, Furiosa corrente ; 13. Giovanni Antonio Pandolfi Mealli, Sonata, opus 3, no 5 ;

Jean-Marc Warszawski
31 octobre 2017


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