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Opéra Nice Côte d'Azur : une petite saison lyrique 2015-2016 et de grandes incertitudes

 

L'Opéra de Nice. Photograhie © D.R.

Nice, 2 juillet 2015, par Jean-Luc Vannier ——

Mieux vaut tard que jamais. Alors que se déroulaient, dans l'enceinte de l'opéra de Nice, des prises de vues pour un prochain épisode de la série « Section de recherche », André Chauvet, Président du Conseil d'exploitation de la Régie, entouré de Philippe Auguin, Directeur musical de l'orchestre philharmonique de Nice, de Marc Adam, Directeur artistique et d'Éric Vu-An, Directeur artistique des Ballets Nice Méditerranée, présentait jeudi 2 juillet à la presse spécialisée, la prochaine saison 2015-2016. Une présentation qui ressemblait à ce que Clémenceau nommait une « société d'admiration mutuelle » : un feu d'artifice de remerciements ainsi que des trombes d'éloges pour Marc Adam et sa saison 2014-2015 « tout à fait enrichissante », notamment pour sa « mise en scène réussie de Peter Grimes » et sa « capacité à trouver au pied levé une remplaçante » au rôle-titre de Semiramide, souffrante d'une grippe dès la première. Au point de devoir lui poser la question : « pourquoi dans ces conditions, avoir remercié Marc Adam » ? Lequel souhaitait, comme il nous l'avait confié, effectuer un nouveau mandat. Une question restée sans réponse.

Pour 2015-2016, l'établissement lyrique de la rue Saint-François-de-Paule ne propose que cinq titres : La Traviata en ouverture de saison le 11 novembre (direction Philippe Auguin) avec la soprano Cristina Pasaroiu sur laquelle nous avons émis quelques réserves dans son interprétation niçoise d'Adriana Lecouvreur en mars 2014. Prenant en compte la « réelle curiosité du public et des mélomanes niçois » auquel il a souhaité répondre et fort de son succès avec ce compositeur contemporain, Marc Adam enchaîne en janvier 2016 avec Death in Venice de Benjamin Britten d'après la nouvelle de Thomas Mann. Et ce, en coproduction avec le Landestheater de Linz : « une nouvelle maison lyrique » a-t-il précisé, qui « peut se targuer après deux saisons seulement de plus de 350 000 spectateurs pour 400 000 habitants ». La direction sera assurée par Roland Böer, aux commandes du Adriana Lecouvreur déjà cité et fera appel au ténor allemand Hans Schöpflin qui a déjà chanté le rôle de Gustav von Aschenbach au Gran Teatre del Liceu de Barcelone. En février 2016, la scène niçoise accueillera Il Barbiere di Siviglia de Gioachino Rossini produite par Il Circuito Lirico Lombardo, l'opéra de Côme, qui permettra de découvrir dans le rôle de Rosina une jeune mezzo-soprano, déjà mondialement plébiscitée, Ketevan Kemoklidze. En mars, une nouvelle production de Les Huguenots de Giacomo Meyerbeer : cette coproduction avec le Staatstheater de Nuremberg, ville jumelée avec Nice, sera dirigée par Yannis Pouspourikas, issu de la jeune génération des chefs d'orchestre français et mise en scène par Tobias Kratzer, metteur en scène tellement prometteur qu'il a été choisi pour la nouvelle version du Tannhaüser à Bayreuth dans deux ans. À côté d'Hélène Le Corre, entendue dans une éclatante Semele en février 2014 à Nice, la distribution fera découvrir le jeune et talentueux ténor d'outre-Rhin Uwe Stickert dans le rôle de Raoul de Nangis. Enfin, la saison se terminera en mai 2016 par une nouvelle production de Medea de Luigi Cherubini coproduite avec le Landestheater de Linz et interprétée dans sa version italienne par la soprano Nicola Beller-Carbone, « réservée depuis trois ans » dans le rôle-titre. Celle-ci a récemment triomphé à Monte-Carlo dans Lady Macbeth de Mtsensk.

Éric Vu-An, Directeur artistique des Ballets Nice Méditerranée, s'est « réjoui de tant d'émotions » qui attendent le public azuréen pour la saison chorégraphique à venir : « l'humour de Troy Game de Robert North, l'expressivité de l'Adagietto d'Oscar Araiz, présenté en avril 2013, l'hypnotique séduction d'Oceana de Lucinda Childs, offerte à Nice en création mondiale en octobre 2011 et l'optimisme de Coppélia » en décembre 2015.

Présentant à son tour la saison philharmonique de Nice, son Directeur musical Philippe Auguin qui partage et son travail et sa vie familiale entre Nice et Washington, a notamment mis en exergue « toute la pléiade de solistes et de chefs invités exceptionnels ». Le public niçois découvrira ainsi : la nouvelle « étoile, russe, du monde pianistique » Olga Kern, le tout jeune violoncelliste français Bruno Delepelaire, super-soliste au philharmonique de Berlin pour un « fulminant » Concerto de Dvořák et deux œuvres de Maurice Ravel, la nouvelle alto super-soliste de la philharmonie niçoise Magali Prévot dans le grand Concerto de Belà Bartók ainsi que la « première française du stupéfiant pianiste chinois de vingt-deux ans », Peng-Peng Gong pressenti pour être le prochain Lang Lang.

Malgré cette présentation très « urbaine et policée », force est néanmoins de le constater : de nombreuses incertitudes demeurent sur les perspectives de l'Opéra Nice Côte d'Azur. Qui remplacera Marc Adam dont les spécialistes n'ont pas vraiment compris les raisons de son éviction ? Celui-ci le confirme : « je regrette le manque de continuité qu'aurait permis un deuxième mandat ». « Je sens bien que j'étais sur la bonne voie en montant, pour Nice, un programme qui sortait des sentiers battus » précise encore Marc Adam, « convaincu que le public niçois a envie d'autres choses ». Mais comment faire avec un budget artistique qui, malgré les subventions d'équilibre, est passé de 5 millions d'euros en 2010 à 2,6 millions d'euros pour l'année à venir ? Marc Adam qui va monter un Eugène Onéguine à l'opéra de Taipeh en début de saison puis une Salomé de Richard Strauss en Autriche et un Fliegende Holländer de Richard Wagner à Erfurt pour 2016-2017, critique aussi « le manque de réflexion sur la structure de l'opéra de Nice à 5 ou 10 ans ». « Il faut » explique-t-il, « donner une personnalité morale à l'opéra, donner la responsabilité à 100%, c'est-à-dire une responsabilité qui engage réellement les décisions prises par la direction et qui permette aussi à cette direction de pouvoir prendre réellement les décisions » : « la seule façon », conclut-il, « de développer une politique artistique à moyen et long terme…une meilleure façon aussi de justifier les sommes d'argent public engagées pour la culture ». Outre une véritable vision lyrique, la nouvelle direction artistique prévue pour novembre prochain en profitera-t-elle pour améliorer le service de communication de l'opéra qui entend « confirmer seulement 48 heures à l'avance les places pour les critiques ou les chroniqueurs » ou déclarer « préférer les journaux version papier aux webmagazines dans l'attribution des places » (sic) ? Un autre spécialiste de l'art lyrique nous le confirmait récemment, sous couvert d'anonymat : « on ne gère pas un opéra comme un service technique de mairie et il existe des postes budgétaires qui coûtent parfois davantage qu'ils ne rapportent ». La culture et le clientélisme électoral n'ont jamais fait bon ménage.

 

Nice, 2 juillet 2015
Jean-Luc Vannier

L'Opéra de Nice. Photograhie © D.R.

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